Les sanctions de l'AMF vont s'alourdir

Les effets de la crise se font-ils sentir à travers les dossiers que traite la commission des sanctions actuellement ?Compte tenu de la durée de l'enquête ou du contrôle, puis de l'instruction devant la commission, nous n'avons pas encore traité suffisamment d'affaires nées après le début de la crise pour en tirer des conclusions nettes. J'ai néanmoins le sentiment que la part relative des dossiers portant sur la gestion d'actifs et la commercialisation augmente par rapport à celle sur l'information financière ou les abus de marché. Par ailleurs, la commission a été saisie d'un peu moins de dossiers en 2009 que les années précédentes ; et 2010 va sur les traces de 2009. Y a-t-il un lien avec la crise ? C'est possible ; ce ne serait pas illogique ; mais gardons-nous d'interpréter trop vite.Le nombre de vos décisions attaquées en justice semble en légère diminution. Quelle en est la raison selon vous ?Voici trois ou quatre ans, la quasi-totalité de nos décisions donnaient lieu à un recours lorsqu'elles prononçaient une sanction. Ce n'est plus le cas. En 2009, c'est moins de la moitié des décisions prononçant une sanction qui ont été contestées devant la cour d'appel ou le Conseil d'État. Et pour les six premiers mois de 2010, à peine plus d'un tiers. Peut-être parce que nous « anonymisons » davantage. Sans doute parce que, grâce à la procédure de récusation, il n'y a plus guère de contestation de l'impartialité de tel ou tel membre. Plus profondément, parce qu'il n'y a pas de divergence de jurisprudence entre la commission des sanctions et nos juridictions de recours, que cette jurisprudence est désormais bien connue ? nous avons fait beaucoup en ce sens ?, et qu'ainsi l'issue d'un recours est beaucoup plus prévisible. En tout cas, cette meilleure acceptation de nos décisions est une donnée très positive.Mais en appel, les juges ont tendance à diminuer les amendes que vous prononcez. Ainsi, la sanction à l'encontre de Vivendi Universal a été ramenée de 1 million à 500 000 euros...C'est beaucoup moins général que vous ne paraissez le penser ; c'est le jeu normal des voies de recours et cela ne traduit aucune divergence d'approche... En 2008 d'abord, puis voici quelques jours, le législateur a relevé le plafond des sanctions pécuniaires, qui est passé de 1,5 million d'euros à 10 millions en 2008 et maintenant à 100 millions. Ces dispositions ne sont pas rétroactives, mais nous allons commencer à appliquer le texte de 2008. Il est exclu que le montant des sanctions soit majoré dans la même proportion que le plafond, mais il nous appartiendra de tenir compte de la prise de position du législateur. La loi de régulation bancaire et financière adoptée le 11 octobre qui relève en effet le plafond des sanctions, prévoit également d'autres évolutions...Toutes les modifications qui viennent d'être apportées à la procédure de sanction sont bienvenues. Techniquement parce qu'elles l'améliorent. Politiquement, parce qu'elles expriment l'attachement du Parlement et du gouvernement au pouvoir de sanction de l'AMF : elles le confortent dans son principe et renforcent ses moyens d'action. Parmi les plus notables et répondant à un souhait ancien de l'AMF, que Michel Prada avait souvent exprimé : la procédure de transaction et la possibilité pour l'autorité de poursuite de former un recours contre nos décisions. S'y ajoute la publicité des audiences.La publicité signifie que le public pourra assister à l'audience. Est-ce la conséquence de l'incompréhension suscitée par votre décision de ne pas sanctionner dans l'affaire EADS ?Il est certain que si, dans cette affaire, l'audience avait été publique, il y aurait eu moins d'erreurs dans la presse ! En tout cas c'est une évolution importante. Jusque-là, l'audience n'était publique que si une des personnes mises en cause le demandait, ce que, pour ma part, je n'avais jamais vu. Désormais, la publicité sera la règle, comme devant les juridictions de droit commun. L'image et l'autorité de l'AMF ont tout à gagner à cette transparence. Propos recueillis par Olivia Dufou
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