Sweet bureauCe sera une journée exceptionnelle, une journée pas comme les autres. Inoubliable. Vous préparez un bon petit déjeuner pour ne pas rater une miette de cette journée que vous attendez et appréhendez. Vous êtes vite prête à partir. Il fait froid mais votre moral reste au beau fixe. Vous êtes ailleurs et bien là quand même. Vous vous jurez de vous souvenir de chaque minute. Vous imaginez déjà l'album de cette journée unique. Vous le feuilleterez quand vous n'aurez pas le moral. Vous n'aviez jamais remarqué ces panneaux d'affichage sur le chemin du bureau et cette drôle de porte cochère baroque encadrée de cariatides, comme sorties de l'ombre aujourd'hui, pour que vous les remarquiez.Vous comptez les arrêts de bus et essayez de vous souvenir de leurs noms. Vous apercevez un jardin qui s'était jusque-là dérobé, un chat, des enfants, un fleuriste et de jolies fleurs blanches en vitrine, la maison d'un grand homme, une ligne de train désaffectée. Le trajet, ce matin, est une promenade.votre dernier jourIl flotte dans le hall comme une odeur de fleurs fanées. Dans les ascenseurs aussi. C'est la première fois que vous la remarquez. En poussant la porte de l'« open space », vous avez un petit pincement. Vous reprenez votre souffle et vous souriez à chaque visage que vous croisez. Vous êtes sûre qu'ils savent, eux aussi, que vous ne les reverrez sans doute jamais plus.Il ne reste pas grand-chose de vous sur votre bureau. Vous avez déménagé le week-end précédent pour ne pas vous embarrasser l'esprit et garder les mains aussi libres que votre c?ur est léger. Aujourd'hui, c'est votre dernier jour. Vous avez décidé de laisser venir à vous l'imprévu. Vous êtes prête à tout entendre, à tout voir, à tout faire.Vous allumez votre écran. Vous répondez à quelques e-mails de clients à qui vous dites au revoir. Comme d'habitude, votre téléphone n'arrête pas de sonner. Comme d'habitude, vous prenez un café avec vos collègues. Comme d'habitude, vous envoyez les relevés de commandes à la comptabilité. Comme d'habitude, vous pestez contre votre gomme qui n'efface rien. Vous mangez un sandwich au bistrot d'à côté. L'après-midi s'écoule tranquillement. Quand vient votre dernière heure, elle ressemble à toutes les autres. Vous rangez votre bureau, laissez la clé sur le tiroir. Vous faites le tour de l'open space. Votre dernière journée a été une journée comme les autres. n

latribune.fr

18 Déc 2009, 1:39

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