« L'Amérique latine manque encore de vision pour son développement»

Comment l'Amérique latine a-t-elle traversé la crise économique mondiale ? La crise a interrompu le cycle de croissance qu'a connu la région entre 2003 et 2008, mais l'Amérique latine s'en est bien tirée, puisqu'en 2009, la contraction du PIB n'a été que de 1,8 %. Et si l'on excepte le Mexique, dont l'activité, très dépendante des Etats-Unis, a reculé de 6,5 % l'an dernier, l'évolution du Pib de la région serait à peu près 0 %. A des degrés divers, tous les pays de la zone avaient profité d'un contexte économique international porteur pour réduire leur vulnérabilité financière. Le ratio de dette sur Pib avait baissé partout, de même que le rapport entre dette sur exportations. Enfin, ces pays, échaudés par leurs relations tendues avec le FMI lors de crises précédentes, ne voulaient pas s'en remettre au Fonds...On a l'impression qu'à la meilleure performance économique correspond également une plus grande maturité politique...En tout cas, la grande volatilité, politique et économique, qui caractérisait ces pays semble désormais appartenir au passé. L'offre politique est plus variée, même si, dans certains cas, la polarisation est encore prégnante, comme au Venezuela. Les crises, à l'exception du Honduras, se sont de surcroît résolues via les mécanismes institutionnels en vigueur. Enfin, les alternances - je pense au Chili, par exemple, qui a vu un entrepreneur de droite remplacer la présidente de gauche aux dernières élections, ont lieu sans difficultés, et les politiques adoptées sont de fait centristes. Ceci est d'autant plus remarquable que ces sociétés sont encore très inégalitaires et il y existe donc une « conflictualit頻 naturelle. Comment, justement, éliminer l'écart immense entre riches et pauvres ? Hélas, malgré les progrès réalisés, il manque encore à l'Amérique latine une vision pour son développement à long terme. Les situations sont variées, et certains pays ont une élite politique meilleure que d'autres, mais même au Brésil, pays leader de la région, certains éléments font défaut : les investissements publics sont insuffisants, l'épargne nationale aussi et la capacité d'innovation est faible. Ainsi, alors que la Corée du Sud investit 3% de son PIB dans la recherche et le développement, le Brésil n'en consent que 1 % et c'est le mieux placé de toute la région. Propos recueillis par Lysiane J. Baudu carlos quenan, economiste chez natixis et professeur à l'institut des hautes etudes de l'amerique latine
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