Et si Laurence Parisot réussissait son coup au Medef ?

Jouer la montre, prendre son temps. Laurence Parisot est une fine tacticienne. Dans sa tentative pour rester à la tête du Medef à l\'issue «normale» de son mandat le 1er juillet prochain, elle est en train de marquer des points. Pas étonnant de la part de quelqu\'un qui a déjà démontré son savoir-faire lors des précédentes échéances. En 2005, elle devint la première femme à prendre la tête de la très masculine organisation patronale, terrassant durant sa conquête des poids-lourds du monde patronal et industriel, tels Yvon Jacob, Francis Mer ou Guillaume Sarkozy. En 2010, une «blitzkrieg» lui a assuré une réélection dans un fauteuil pour un deuxième mandat de trois ans. Et maintenant, on le sait, la présidente a opportunément ouvert en janvier la question d\'un changement des statuts du Medef pour lui donner la possibilité de rester après juillet, durant au moins encore deux ans, à la tête de l\'organisation. Pour ce faire, le comité statutaire du Medef a été saisi de plusieurs questions, dont l\'une sur la durée des mandats. Et nombreux pensent qu\'il prend opportunément son temps pour remettre son avis. Le comité consulte, compulse les archives du Medef et de son ancêtre le CNPF, etc. Sachant aussi que ce comité est présidé par Georges Drouin, ancien président du Groupement des professions des services... et proche de Laurence Parisot. Mais quel serait l\'intérêt de faire ainsi traîner les choses?Des postulants coincés dans leurs starting-blocksIl y a plusieurs hypothèses. D\'abord, ce processus bloque dans leurs starting-blocks les candidats déjà déclarés à la succession de Laurence Parisot, tels Thibault Lanxade, PDG d\'Aquoba, Pierre Gattaz, le président du groupe des fédérations industrielles (GFI) et fils d\'Yvon Gattaz, ancien président du CNPF et Jean-Claude Volot, l\'ex médiateur de la sous-traitance. Sans parler d\'un futur et potentiel candidat, Geoffroy Roux de Bézieux, PDG de Virgin Mobile France qui guette l\'avis du comité statutaire pour se déclarer. Quant à Frédéric Saint-Geours, président de l\'UIMM (métallurgie), il faudra attendre le 6 mars et la convention de sa fédération pour connaître ses intentions. Mais pas sûr que celui qui est encore directeur des marques de PSA franchisse finalement le Rubicon... Du moins cette année. Tous ces postulants sont gênés aux entournures par la décision de Laurence Parisot qui a, de facto, gelé le processus électoral. Certes, officiellement, les statuts du Medef prévoient que la campagne électorale interne doit durer deux mois. Elle doit donc être lancée au plus tard le 1er mai si Laurence Parisot devait être remplacée le 1er juillet.Laurence Parisot a besoin de temps pour convaincreMais, dans les faits, les précédents scrutins l\'ont montré, notamment celui de 2005, les manœuvres débutent bien plus tôt que les deux mois officiels. Or, pour l\'instant, rien ne bouge ou presque. De quoi faire les affaires de Laurence Parisot. Elle a besoin de temps pour rallier à elle un maximum de suffrages, d\'où ces nombreux déplacements en régions. En effet, la réforme des statuts qui permettrait à l\'actuelle présidente de rester à son poste doit être acceptée par l\'assemblée générale du Medef (555 votants) avec une majorité des deux-tiers. Or, pour le moment, Laurence Parisot n\'a pas cette majorité. Les grosses fédérations (métallurgie, bâtiment, etc.) et des Medef territoriaux importants (Paca, Languedoc, Rhône-Alpes) ont fait connaître leur opposition. Alors, pour les convaincre, Laurence Parisot dramatise une situation économique et politique déjà peu réjouissante, en expliquant que, dans ce contexte, ce n\'est pas le moment de changer le capitaine et une équipe affutés sur les dossiers... Et ça peut marcher, comme l\'explique un cadre du Medef: «Certes, les dirigeants d\'entreprises n\'apprécient pas trop ce qu\'a fait Laurence Parisot. Mais ils aiment encore moins quand le Medef se déchire au vu et au su de tout le monde. La situation économique est déjà assez difficile comme ça. En fait, ils sont assez moutonniers, alors si l\'actuelle présidente sait les rassurer, ils accepteront sa réforme pour éviter les crises.»Bref, Laurence Parisot a des chances de parvenir à ses fins. Et on peut imaginer qu\'après quelques semaines un peu virulentes en interne, le réflexe légitimiste jouera -surtout face à un gouvernement socialiste- et que les choses rentreront dans l\'ordre.  
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