Le cinéma français tente d'amadouer Neelie Kroes

Le cinéma français a décidé de prendre le taureau par les cornes. Lundi, Michel Hazanavicius, le réalisateur de The Artist et président de l’ARP (la société civile des auteurs-réalisateurs-producteurs), son vice-président Eric Tolédano, qui a réalisé Intouchables et la déléguée générale Florence Gastaud sont allés voir la vice-présidente de la Commission européenne Neelie Kroes, en charge de la société de l’information. L’objectif : faire de la pédagogie sur le modèle français du cinéma. «Nous ne comprenions pas son opposition au cinéma», témoigne Florence Gastaud. En désaccord avec les positions de la France sur la délicate question de la taxe télécoms, qui finance le cinéma (actuellement en renégociation à Bruxelles), Neelie Kroes n’avait par exemple pas répondu favorablement à l’ARP, qui l’invitait à venir s’exprimer aux Rencontres cinématographiques de Dijon en octobre dernier. La Commission européenne vient de lancer le chantier du droit d\'auteurCette rencontre intervient au moment où la Commission européenne lance un vaste chantier visant à moderniser les règles sur la circulation des contenus, avec comme fil rouge la réforme du droit d’auteur à l’ère numérique. Le calendrier des travaux a été annoncé le 5 décembre dernier. Avant de songer à une voie législative, la Commission tentera de trouver avec les acteurs des solutions pour lever les freins actuels. Parmi les objectifs: accroître la «portabilité» des contenus (par exemple un internaute français qui part à l’étranger ne peut plus se connecter à son offre VOD), améliorer l’accès aux oeuvres audiovisuelles et travailler sur la copie privée, cette taxe sur les supports vierges au profit de la culture qui fait débat. Cette phase de négociation a été poussée par le commissaire au marché intérieur Michel Barnier, qui considère que le cadre législatif en vigueur n’empêche pas les réformes. En revanche, si aucun consensus ne se dégage d’ici à un an, la Commission envisagera de légiférer.La vision libérale de Neelie KroesIl faut dire que des vents contraires soufflent au sein de la Commission européenne. Neelie Kroes a une vision très libérale de la culture à l’ère du numérique. Sur le fond, la commissaire considère par exemple que les contenus devraient circuler plus librement, sans être bloqués par des questions de territorialité, de droit d’auteur ou de chronologie des médias. Dans son esprit, il ne s’agit pas de tuer la culture mais plutôt de se donner une chance de voir émerger de nouveaux grands acteurs en Europe. De son côté, Michel Barnier défend au sein de la Commission la vision française de l’exception culturelle, son mode de financement et le droit d’auteur. Mais étant français, il peut être soupçonné à Bruxelles de défendre un lobby plutôt qu’un système.Les arguments du cinéma françaisC’est pourquoi il a semblé important au cinéma français d’aller faire entendre ses positions directement auprès de Neelie Kroes, et tenter de casser quelques idées reçues sur le système. «Michel Hazanavicius et Eric Tolédano lui ont expliqué qu’un film c’était seulement 10% d’argent public. Eric Tolédano lui a dit que les Etats-Unis avait récupéré tous les grands réalisateurs sud-américains, qui ne pouvaient pas faire de films dans leur pays. En France, nous réussissons à les conserver», indique Florence Gastaud. La délégation lui a également expliqué les différences de financement d’un film entre la France, où intervenaient plusieurs diffuseurs et les Etats-Unis, où un seul studio soutenait l’intégralité d’un film. Enfin, elle lui a assuré que le cinéma arrivait à s’entendre avec l’ensemble de la chaîne, opérateurs télécoms compris, qui interviennent via la taxe télécoms. «Il n’y a qu’un seul bad boy, c’est Free», complète Florence Gastaud.
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