Dans la toundra culinaire qu'est le quartier de la Muette, entre faux asiatiques, cantines à « infrapeople » désastreuses et simili salons de thé, la naissance d'un vrai japonais est presque attendrissante. Murs clairs, lumière généreuse des larges fenêtres, belle cuisine ouverte : on retrouve la simplicité efficace et dépouillée des établissements nippons qui savent qu'on vient chez eux pour leur maîtrise des plats traditionnels et non pour les estampes.Attablé au comptoir de bois sombre, face à deux théières de thé vert, l'une en fonte noire, l'autre en céramique brute blanche, on apprécie les menus du déjeuner diligemment offerts par de jeunes femmes empressées mais discrètes. Le délicieux recentrage de nos existences émiettées s'opère, une question prévaut : saumon laqué ou sashimi ? Poulet fermier teriyaky au poivre ou chirashi ? Entrecôte parfumée au saikyou miso ou sushi d'anguille ? Chirashi et saumon laqué permettent de mesurer le talent du chef, un ancien de Nobu. Les amuse-bouches servis dans de ravissants ramequins mettent immédiatement la barre très haut. Les légumes de saison mijotés - brocolis, carottes, aubergines - sont magistraux de suavité ; le boeuf bourguignon en miniportion fait regretter la petitesse de son contenant. Le consommé aux herbes ne permet plus de doute : derrière le bar, en cuisine, officie un cador de l'Umami (goût savoureux).Le chirashi est du même acabit : riz parfaitement vinaigré, poissons nombreux et magnifiquement découpés. Le saumon, solaire dans sa solitude magnifiée par le reflet du miso, est exquis. Le sablé, aux deux glaces chocolat-mangue et à la mandarine confite, nous enchante et conclut un déjeuner réussi, détendu et pas cérémonieux. Une messe sans la pompe. Éric Matha [email protected] Kura, 56, rue de Boulainvilliers 75016 Paris. Tél. : 01.45.20.18.32.

latribune.fr

20 Févr 2011, 22:12

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