L'Allemagne s'accroche à son modèle exportateur

conjonctureL'économie de l'Allemagne se résume souvent à un mot : l'export. En 2008, les exportations représentaient 51 % du PIB, contre 30 % en 2000. Aucun grand pays, pas même la Chine, n'est aussi dépendant de son commerce extérieur. Cette situation s'appuie sur la forte compétitivité de l'industrie allemande acquise au prix d'un sacrifice de la demande intérieure : la hausse de la TVA pour financer des allégements d'impôts pesant sur les entreprises, la réforme du marché du travail ou la modération salariale ont gelé la consommation des ménages, dont la part dans le PIB est passée de 59 % en 2005 à 56 % en 2008. Mais l'économie allemande connaissait une forte croissance grâce à la hausse des exportations de biens d'équipement vers les pays émergents. En 2006, l'Allemagne a affiché une croissance de 3 %, contre 2,3 % pour la France.Mais ce modèle n'est pas sans danger. À l'automne dernier, avec la crise, la demande mondiale disparaît, les exportations reculent de 30 %. En un an, la richesse allemande s'effondre de 7 %, revenant à son niveau de 2005. Du jamais-vu depuis 1945. Le gouvernement ne peut agir qu'à la marge, malgré deux plans de relance à 80 milliards d'euros. Il ne peut relancer le vrai moteur de l'économie : les usines chinoises. En juin, le « Financial Times Deutschland » lance la charge : « Il ne s'agit pas d'un modèle, mais d'un désastre », affirme le quotidien, qui vante alors le modèle? français ! En août, la référence de la presse anglo-saxonne, « The Economist », parle d'« erreur gigantesque ». En Allemagne, les syndicats et le parti de gauche Die Linke approuvent.Mais dans les milieux économiques, c'est l'union sacrée autour du modèle national. « Quand j'entends que nous devons abandonner notre modèle exportateur, je me demande d'où nous pourrons tirer une demande intérieure supplémentaire », s'interrogeait Dennis Snower, le président de l'institut économique IfW de Kiel. Pour beaucoup, l'épisode conjoncturel ne remet pas en cause la force de l'économie allemande : « Le modèle connaît une phase de faiblesse, pas une crise existentielle », résume Michael Hüther, le président d'un autre institut, l'IW de Cologne. Un choix difficileLe mois dernier, le retour à la croissance a réglé son compte à la critique. Du coup, dans les milieux d'affaires, on réclame de nouveaux allégements fiscaux et une plus grande flexibilité de l'emploi pour permettre aux entreprises de mieux profiter encore de la reprise mondiale. Si la question du modèle économique ne fait plus débat dans la campagne, le prochain gouvernement devra pourtant savoir s'il entame un rééquilibrage du système par l'adoption, par exemple, d'un salaire minimal, ou s'il renforce la dépendance de l'Allemagne aux marchés internationaux. Romaric Godin, à Francfort
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