« West Wing » et « Les cinq dernières minutes »

On a l'habitude d'opposer les séries télévisées américaines, rythmées et nerveuses, avec leur multitude de personnages secondaires et leurs cascades de rebondissements, aux feuilletons français plus économes en acteurs et en vitamines. Sur le petit écran de la vie politique, Nicolas Sarkozy nous a habitués, depuis sa conquête de l'UMP en 2004, à un rythme qui s'apparente davantage à celui d'une journée de Jack Bauer qu'à celui d'une semaine de Julie Lescaut. Mais il y a dans l'histoire de toute série des saisons qui sont moins réussies que d'autres. Et celle du remaniement restera comme un beau loupé, en dépit d'une petite injection d'adrénaline en plein week-end. Le « West Wing » (« À la Maison-Blanche », en version française) élyséen a aujourd'hui du plomb dans l'aile.Faut-il pour autant enterrer l'acteur principal ? Il ne faut pas oublier qu'il est aussi le producteur du show... Conscient du péril, Nicolas Sarkozy nous a ménagé quelques « cliffhangers », ces fins abruptes qui laissent le téléspectateur dans l'état d'un drogué en manque, en attendant l'épisode suivant. François Fillon sera-t-il un allié fidèle ou un rival encombrant pour la présidentielle ? Jean-François Copé fera-t-il de l'UMP le laboratoire d'idées du candidat Sarkozy ou la plate-forme de sa propre candidature ? Jean-Louis Borloo sera-t-il capable de jeter la rancune à la rivière ? Dominique de Villepin réussira-t-il à briser son superbe isolement ?La nouvelle saison semble donc plus prometteuse. Un Nicolas Sarkozy « protecteur » et son gouvernement « de combat » forment une « équipe de campagne » face à un pays irrité et sceptique. Et face à une gauche qui semble, de son côté, avoir du mal à trouver son tempo.Sur la route de 2012, le Parti socialiste a apparemment choisi le lent cheminement du célèbre commissaire Bourrel, qui s'exclamait : « Bon Dieu... mais c'est bien sûr ! » en démasquant le coupable dans « Les cinq dernières minutes ». On sait désormais que, au pays des éléphants, on méprise les lièvres et on célèbre les tortues.Cette semaine, tandis que Nicolas Sarkozy s'est évertué à relancer l'intérêt des téléspectateurs, en travaillant voix douce, imparfait du subjonctif et locutions latines, les socialistes ont renoué avec leur habitude de porter sur la place publique des différends qu'ils feraient mieux de régler entre eux. En question : le calendrier des primaires de désignation du candidat de 2012.Il y a ceux qui, comme François Hollande ou Manuel Valls, veulent suivre l'accélération donnée par Nicolas Sarkozy à la précampagne présidentielle, et donc organiser les primaires avant l'été 2011, et ceux qui, derrière Martine Aubry, préconisent de se hâter lentement et d'attendre l'automne 2011. Des arguments valables sont échangés de part et d'autre : le candidat désigné six mois avant l'élection aura un lourd handicap face au président sortant et devra unir les socialistes, la gauche et présenter un programme en un temps assez restreint, disent les premiers. Six mois pour une campagne, c'est bien assez, il faut d'abord travailler sur le projet et les alliances avant de choisir le candidat, répliquent les seconds. « Bon Dieu... mais c'est bien sûr ! se dit le téléspectateur, Martine Aubry veut laisser à Dominique Strauss-Kahn le temps de revenir ! »Car voilà que soudain, à gauche, la frontière se brouille entre séries hollywoodiennes et parisiennes... Cela tient sans doute au fait que le personnage principal vit actuellement à Washington. Cette semaine, Dominique Strauss- Kahn, qu'on appelle au PS « l'oncle d'Amérique », est venu se rappeler au bon souvenir des socialistes français.Lundi, sur France Inter, le patron du FMI, qui ne s'appuie que sur quelques lignes de dialogue dans le script, a rassuré les partisans de sa candidature en indiquant notamment son intérêt pour la « cohésion sociale » de la France. La petite touche de mystère sur ce séjour parisien a été fournie par une indiscrétion sur une rencontre - une réconciliation ? - entre Ségolène Royal et Dominique Strauss-Kahn. Les scénaristes n'ont rien laissé au hasard. Le petit déjeuner des anciens rivaux de 2006 a eu lieu... au Pavillon de la Reine, un hôtel proche de la place des Vosges. Il y a même eu un « crossover » plutôt réussi - ce terme désignant la rencontre entre les personnages de deux séries différentes - lorsque le directeur général du FMI a accepté de poser nuitamment pour les photographes, sur le perron de l'Élysée avec Nicolas Sarkozy, président du G20. Au milieu d'une rangée de gardes républicains aux casques étincelants. La suite en 2012 ?Par Hélène Fontanaud journaliste au service France
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