« Notre politique industrielle est un échec »

STRONG>Elie Cohen Professeur à Sciences po et membre du CAELes candidats putatifs à la présidentielle de 2012 se ruent sur les sites industriels. Quelle lecture en faites-vous ? Depuis 2004, la classe politique a pris conscience de la gravité de la désindustrialisation qui, contrairement à ce que l'on croyait jusque là, ne s'accompagne pas en France d'une montée en gamme des services. Ce sont des services à la personne à faible valeur ajoutée et générant peu de croissance que la France a développés. Mais cette prise de conscience s'est accompagnée de la mise en place de nombreux outils de politique industrielle. Quelle a été leur efficacité ? La France a effectivement exploré plusieurs voies de politique industrielle : la voie colbertiste, avec la création de l'Agence de l'innovation industielle chargée de sélectionner et de soutenir les grands projets industriels. Puis elle a voulu aider les PME via une sorte de «Small Business Act», en fusionnant la banque BDPME et l'ANVAR, l'agence de l'innovation. Puis, pour stimuler la R&D, elle a créé l'Agence Nationale de la Recherche à côté du CNRS. Enfin, pour agir à l'échelle du territoire, elle a créé des pôles de compétitivité. Résultat ? Qu'il s'agisse de la valeur ajoutée industrielle, de l'emploi ou des parts de marché de l'industrie française à l'export, tout a continué à chuter! Pourquoi ces efforts ont-ils si peu payé ?Parce que nous avons répartis nos faibles moyens sur trop de combats à la fois. Nous n'avons pas voulu faire de vrais choix. Face à ces actions dispersées, les forces de désindustrialisation en oeuvre ne pouvaient qu'être les plus fortes. La France pâtit aujourd'hui de coûts salariaux unitaires qui n'ont cessé de monter depuis dix ans et se trouvent aujourd'hui plus élevés qu'en Allemagne, notre premier concurrent. Alors que ses exportations étaient tirées par les grands contrats, elle peine aujourd'hui à en décrocher, comme le montre nos échecs dans le nucléaire. Enfin, malgré toutes les aides fiscales que nous avons consenties, notre effort de recherche reste au niveau très bas de 2 % du PIB, avec un taux de transformation encore plus faible. C'est une erreur d'avoir voulu tout faire avec si peu de moyens. Propos recueillis par Valérie Segond
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