Que peut attendre la France d'une hausse des salaires en Allemagne ?

C\'est nein ! Dans un entretien accordé au quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), Jens Weidmann, le président de la Bundesbank a été très clair : une hausse des salaires en Allemagne n\'est souhaitable pour personne. « Du fait de relations commerciales relativement faibles avec les pays de la périphérie, ceux-ci ne profiteraient pratiquement pas d\'une baisse de la compétitivité [allemande] et d\'une hausse de la consommation en Allemagne. Au final c\'est la zone euro dans son ensemble qui serait en plus mauvaise posture », a-t-il déclaré.Le SPD en campagneReste que le sujet enfle outre-Rhin et ce, dans toutes les sphères. A moins de six mois des prochaines élections législatives qui se tiendront le 22 avril, le SPD a fait de la hausse des salaires un de ses thèmes forts de campagne pour empêcher Angela Merkel de faire un troisième mandat. Pour l\'instant, la chancelière allemande s\'oppose à une hausse des salaires, comme elle refuse la création d\'un salaire minimum généralisé tel qu\'il existe en France. Elle serait plutôt favorable à un SMIC par secteur d\'activité lorsqu\'il n\'existe pas d\'accord entre les partenaires sociaux. Actuellement, en Allemagne, un minimum salarial est respecté dans quelques secteurs particulièrement exposés au risque de dumping salarial. C\'est le cas de l\'intérim, des soins aux personnes et du BTP notamment. Quatre millions de salariés bénéficient de ce minimum salarial imposé par le gouvernement fédéral.Les avions de Lufthansa cloués au solDans les entreprises, l\'agitation gagne également. IG Metall négocie actuellement avec la fédération des employeurs de la métallurgie un nouvel accord pour les 3,5 millions de salariés du secteur. Ce lundi, presque tous ses vols de la compagnie aérienne Lufthansa ont été annulés en raison d\'une grève de son personnel au sol. Le syndicat allemand des services Verdi réclame pour quelque 33.000 salariés de Lufthansa, personnel au sol et une partie du personnel en cabine, une hausse de salaire de 5,2% sur douze mois pour en Allemagne. Il demande également des garanties d\'emploi. Or, selon le syndicat, Lufthansa n\'a pour l\'instant proposé qu\'entre 0,4 et 0,6% d\'augmentation sur douze mois. Une première grève d\'avertissement avait déjà entraîné l\'annulation de la plupart des vols fin mars.La fonction publique n\'est pas épargnée. Mercredi, les postiers allemands s\'étaient mis en grève afin de faire pression sur Deutsch Post, à qui ils réclament une hausse de 6% des salaires. D\'autres débrayages sont prévus d\'ici la reprise des négociations, le 25 avril.La France soutient le combat des salariés allemands ...La semaine dernière, Arnaud Montebourg avait exhorté le gouvernement allemand à s\'engager en faveur d\'une augmentation des salaires lors d\'un déplacement à Düsseldorf.Selon le ministre du Redressement productif, une revalorisation globale des salaires aurait deux effets vertueux : un renforcement de la compétitivité du made in France et une augmentation de la demande adressée à la France sachant qu\'actuellement, 15% environ des exportations tricolores prennent le chemin de l\'Allemagne, faisant de la première économie de la zone euro notre principal partenaire commercial.Sur le premier point, Denis Ferrand, économiste au COE-Rexecode est dubitatif. « Réclamer une augmentation des salaires en Allemagne pour renforcer notre compétitivité consiste en quelque sorte à leur demander de faire le boulot à notre place ! C\'est au gouvernement français de s\'évertuer à mettre en place les conditions permettant de restaurer la profitabilité des entreprises », estime-t-il. Le sujet a été maintes fois rebattu en France et les propositions sont nombreuses pour déclencher un choc de compétitivité. Les 35 mesures contenues dans le plan Gallois en sont l\'exemple le plus récent. « Le gain de compétitivité serait assez faible car les salaires continuent d\'augmenter en France », relativise Nicolas Bouzou chez Asteres.Une augmentation de la demande globale dans la zone euroSur le second point, celui-ci est un peu plus enthousiaste. « L\'Allemagne étant le principal marché de la zone euro, une hausse des salaires augmenterait mécaniquement la demande globale de la zone euro. Ce serait un petit bol d\'aire pour les voisins de l\'Allemagne, celle-ci continuant de s\'opposer à une dévaluation du taux de change de l\'euro face au dollar pour compenser la politique d\'austérité menée dans la plupart pays de l\'Union européenne », explique Nicolas Bouzou.Denis Ferrand est moins convaincu. « Après des années de modération salariale, il y a certes de la place pour une hausse des salaires en Allemagne. Les pressions à la hausse sont d\'autant plus vives que le chômage est à son point d\'équilibre. Si un effet sur l\'export français est envisageable, il est toutefois difficile d\'en évaluer l\'ampleur car une hausse des salaires pourrait déséquilibrer l\'équilibre actuel entre l\'emploi et les salaires en Allemagne, au détriment de l\'emploi », explique l\'économiste toute n rappelant que la consommation des ménages progresse actuellement de 1% par an outre-Rhin depuis quelques années alors qu\'elle s\'est stabilisée en France. 
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