La France est riche de son épargne de proximité

Les premières « Assises de l\'entrepreneuriat » viennent de s\'ouvrir à Bercy. Formons le vœu que ces « États généraux de l\'entreprise » soient le creuset de propositions concrètes pour moderniser les circuits de financement actuels des PME et ETI. Car amorcer la croissance suppose une volonté de sortir des sentiers battus et de toutes les allégeances. Cela suppose aussi une révolution culturelle pour les politiques et les citoyens : aux premiers de créer un environnement favorable et de reconnaître le rapport de causalité entre le niveau de risque pris par les investisseurs et leur juste rémunération; aux seconds de retrouver un attrait pour leurs entreprises.Nos PME doivent être financées pour grandir et embaucher, et l\'être de manière prévisible en fonction de leurs capacités et de leurs projets. Mais aujourd\'hui ce n\'est plus le cas car elles dépendent trop de prêteurs dont les comportements ne sont pas nécessairement pérennes.Les financements de nos entreprises moyennes proviennent en effet de deux sources principales : les banques, dont le rôle évolue en fonction des régulations internationales, et le crédit interentreprises, qui repose sur des assureurs crédit dont l\'intervention est dépendante de facteurs de court terme. C\'est notre particularisme français.Aucune autre source n\'est significative ni déterminante : le capital développement, trop insusant; le marché financier, quasi inexistant pour les entreprises moyennes; les business angels : marginaux en phase de création et invisibles en développement. On peut le regretter et remarquer la « réserve » des investisseurs institutionnels, eux aussi guidés par la régulation internationale.Pourtant la France est riche de son épargne, et en particulier de son épargne financière (livret A, LDD et assurance-vie); mais celle-ci n\'est pas orientée vers l\'investissement entrepreneurial. Il est dès lors essentiel de redonner aux Français l\'envie d\'investir dans leurs entreprises moyennes qui ne bénéficient pas de ces circuits.Repenser la rencontre de l\'entreprise et de l\'épargnantIl faut à la fois repenser les circuits qui leur sont accessibles mais qui ne marchent pas, ou mal - FIP, FCPI... -, et inventer des marchés nouveaux, adaptés tant aux enjeux des épargnants qu\'aux moyens des PME. Ils devront disposer de règles et de procédures conçues pour ces entreprises dans des conditions de prix adaptées, tout en orant une sécurité susante aux investisseurs privés.C\'est cela « désintermédier » - et il est nécessaire de faire preuve de pédagogie sur cette solution contestée jusqu\'à présent par les banquiers ou les politiques. Repenser la rencontre de l\'entreprise et de l\'épargnant à côté des circuits traditionnels - banques universelles et véhicules collectifs des grands assureurs -, c\'est contribuer au rééquilibrage du financement des PME. C\'est aussi redéfinir les places respectives des financeurs traditionnels publics et institutionnels et des particuliers.Peut-on y parvenir? Oui, en favorisant l\'esprit et la culture d\'investissement, par un alignement des avantages fiscaux, et en encourageant et en rémunérant justement la prise de risque. Les plus-values sur des investissements dans des PME, si importantes soient-elles, quand elles ont créé de la richesse et des emplois en France, ne peuvent pas être vilipendées et surtaxées. Même si l\'investisseur n\'est pas l\'entrepreneur.Cette finance-là est bien loin d\'un capitalisme obscur et incontrôlable. Elle est éthique et sociétale, pour autant qu\'elle se pratique à travers des produits d\'investissement simples et lisibles et des modalités de transaction compréhensibles par tous, dans un cadre clair.Les épargnants doivent apprendre que le risque de ce type d\'investissement, s\'il est encadré, n\'est pas supérieur à celui d\'un investissement sur les marchés traditionnels voire dans des véhicules collectifs : sur le long terme les performances des entreprises patrimoniales et des entreprises non cotées sont supérieures à celles des grands groupes.Qu\'attendent dès lors nos gouvernants pour encourager l\'investissement de proximité dans des entreprises dynamiques et redonner aux plates-formes régionales leurs lettres de noblesse?______*Bernard Cohen-Hadad est président du think tank Etienne Marcel et président de la commission financement de la CGPME - Anne Binder est membre du bureau exécutif de PME Finance, associée d\'Administrances, co-fondatrice de Voxfemina.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.