Les pays émergents multiplient les entraves aux flux de capitaux

La déferlante d'effets pervers causés par la crise financière pose aujourd'hui un sérieux problème aux pays émergents. Victimes de leur succès économique, ils attirent les capitaux du monde entier comme des aimants. Résultat : une revalorisation à marche forcée de leurs monnaies face au dollar, qui lamine leur compétitivité. Au point que bon nombre d'entre eux sont prêts à succomber à la tentation de l'autodéfense monétaire, via des mesures de contrôle des mouvements de capitaux.Cette nouvelle alerte mondiale trouve ses racines dans le changement radical de comportement des acteurs des marchés. Après une phase d'aversion au risque aiguë, ils ont retrouvé l'appétit pour les placements aventureux, délaissant le dollar qu'ils avaient plébiscité, lestés des liquidités pléthoriques déversées sur l'économie mondiale pour lutter contre la crise. Assorti de taux voisins de zéro, le billet vert, tombé hier à un nouveau point bas de quinze mois face à l'euro (près de 1,51 dollar pour un euro), leur sert de vecteur pour mettre en place des stratégies de « carry trade » consistant à jouer sur les écarts de rendement. Leur arbitrage se fait en faveur des monnaies émergentes les mieux rémunérées. C'est ainsi que le real brésilien affiche un regain de vigueur de 34 % face au dollar, le rand sud-africain de 29 % ou le won sud-coréen de 9 %. Une appréciation d'autant plus malvenue que la Chine, leur grand partenaire commercial, a restauré le lien fixe de son yuan avec le dollar depuis la mi-2008, qui se dévalorise donc dans les mêmes proportions face à leurs monnaies nationales.balise de détresseDans une première étape, les puissances émergentes avaient tenté de contenir le phénomène par des interventions massives sur le marché des changes. En vain, sauf pour la Chine dont le yuan n'est pas convertible. Aujourd'hui, ces pays sortent la balise de détresse et deux d'entre eux sont passés à l'acte en instaurant des contrôles sur les flux de capitaux. Le Brésil a ainsi imposé fin octobre une taxe de 2 % sur les investissements étrangers en titres brésiliens, mesure renforcée le 19 novembre par une imposition de 1,5 % sur la conversion par les non-résidents d'ADR (« american depositary receipts ») de sociétés brésiliennes en titres locaux. À la mi-novembre, Taiwan avait également imposé des restrictions draconiennes aux investissements étrangers en dépôts à terme locaux. Le prochain pays à passer à l'acte pourrait être l'Indonésie, candidate à la limitation des achats de titres de la dette publique à court terme par les étrangers, mais ils sont légion à agiter la muleta, Corée du Sud, Inde, Kazakhstan, Russie et Thaïlande en tête. Même s'ils ne prennent encore que des mesurettes, le danger réside dans la prolifération des entraves aux flux de capitaux, facteur aggravant des déséquilibres économiques mondiaux. n
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.