Miquel Barcelo à Toulouse pour un retour aux sources

Art contemporainPar Yasmine Youssi, à ToulouseToulouse, 1982. Une exposition de la galerie Axe art actuel consacrée à un jeune peintre espagnol repéré à Barcelone puis exposé à la Documenta de Kassel quelques mois auparavant, attire tous les regards. Yvon Lambert descend de Paris et signe immédiatement le jeune homme dans sa galerie. Jean-Louis Froment, alors directeur du CAPC de Bordeaux, lui propose une exposition. Miquel Barcelo est lancé. L'artiste revient aujourd'hui dans la Ville rose, pour présenter ses ?uvres de jeunesse au musée des Abattoirs. Soit une centaine de dessins, lithographies, tableaux ou sculptures, souvent inédits, réalisés entre 1973 et 1982, accompagnés d'un superbe catalogue conçu comme un annuaire téléphonique. Tous donnent à voir la genèse de son travail et la manière dont il s'est nourri des autres pour construire un univers et un langage à nul autre pareil. En prenant toujours en compte son environnement, qu'il s'agisse alors des villes de Palma ou de Barcelone. Dévoilées dans des salles aux couleurs éclatantes ou dans la nef en brique rose du musée, ces pièces prennent ici toute leur ampleur et dialoguent avec des ?uvres récentes disposées en contrepoint pour souligner l'évolution du travail de Barcelo.fiction narrative« Pour comprendre cet ensemble, il faut le replacer dans son contexte », souligne Jaume Reus, l'un des commissaires de l'exposition. Né dans un petit village des Baléares, Miquel Barcelo est entré dans le monde de l'art alors que l'Espagne vivait ses dernières années sous Franco. Avec l'ambition de sortir son île de son autarcie artistique. Il rompt avec l'abstraction de ses aînés, embrasse la fiction narrative, ose la couleur.Les Toulousains découvrent ainsi en 1982 un extraordinaire bestiaire hanté par la figure d'un chien agressif représenté dans des tableaux aux accents baroques. Comme dans « Brega de Cans » (1981), grande toile bleue figurant le quadrupède courant dans la nuit avec un homme dont on ne voit que la jambe. On aperçoit au loin Barcelone. « Cette idée de la conception et du cadrage l'amènera à de très grands formats », explique Alain Mousseigne, le directeur des Abattoirs. Son triptyque d'un monde sous-marin peuplé de crabes jaunes, de requins ou de raies esquissés comme s'il s'agissait d'un croquis (sans titre, 1981), annonce les vitraux imaginés des années plus tard pour la cathédrale Saint-Pierre de Palma. Barcelo commence aussi à s'interroger sur le passage du temps. Il le fait dans de drôles d'installations comme celle réunissant dans des cases des pattes de poule dont l'ongle a été verni. Pour représenter un paysage, il collecte différents éléments in situ et les emmagasine dans des box, interrogeant là encore le processus de transformation des matières organiques. Et il se représente à travers ses mégots de cigarette figés dans le plâtre avec des allumettes, des crayons ou des styles. Autant de genre ou de thématiques que l'artiste continue de creuser aujourd'hui. En témoigne ce crâne de dinosaure en bronze transformé en auto. Et puis il y a ce tableau d'un gorille plein de sagesse, observant l'espace, probablement conscient du chemin parcouru depuis la première exposition de l'artiste à Toulouse en 1982. n« Barcelo avant Barcelo », au musée des Abattoirs de Toulouse jusqu'au 28 février. www.lesabattoirs.org.
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