On les avait laissés à Cannes, en prise avec une actrice de seconde zone totalement oubliable, qu'ils étaient censés surveiller (« l'Actrice », éditions Le Passage). Costes et Bernstein, « agents de recherche médiocres, gardes du corps déchus, mercenaires déshonorés » mais surtout « la plus belle paire de couillons de la banlieue ouest », poursuivent leurs investigations culturelles. Dans leur ligne de mire cette fois-ci, les beaux-arts. L'occasion pour Philippe Colin-Olivier, le père en écriture de ces deux zozos, de commettre avec « Tableaux d'honneur » un nouveau polar aussi captivant et hilarant que les précédents.Plus fauchés que jamais, endettés jusqu'au point de se faire trucider s'ils ne remboursent pas leurs dettes au plus vite, Costes et Bernstein en viendraient presque à bénir le ciel lorsque Detoni, un marchand d'art véreux, leur demande de dérober deux fausses toiles de François Boucher appartenant à un collectionneur auquel il les a vendus. L'opération menée tambour battant se règle en moins de deux. Sauf que les deux compères confondent Boucher le peintre du XVIIIe avec un ex-taulard tombé pour le braquage du Crédit Continental de Yerres. Et finissent par dérober deux Fragonard invendables parce que volés à des familles juives pendant la guerre. Mieux encore, ils ont commis leur larcin à la barbe d'un autre barbouze, lui aussi sur le coup, et bien décidé à récupérer ce qu'il considère comme son bien.Philippe Colin-Olivier mène là une intrigue remarquablement documentée sur le monde de l'art, tenue de la première à la dernière ligne. Mais c'est aussi son écriture qui ferre le lecteur. Si la langue est souvent le parent pauvre des polars, rien de cela ici. Il y a du Audiard dans les dialogues. Et la bêtise de Costes et Bernstein contraste avec la richesse d'une langue qui la sublime et la rend jubilatoire. Pour Philippe Colin-Olivier, « Costes a une cervelle de protozoaire » et Detoni est si snob qu'il est du genre « à vouvoyer sa bite ». On en redemande ! Yasmine Youssi? « Tableaux d'honneur », Le Passage, 211 pages, 17 euros.

latribune.fr

26 Juill 2010, 21:24

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