Euro ? : le maillon fort, c'est le maillon faible ? !

Tout d'abord, une constatation?: les volumes sur les marchés d'actions, partout dans le monde, ont chuté et les analystes anglo-saxons commencent à affirmer cette semaine qu'il s'agit non pas d'un pur ralentissement conjoncturel mais d'une tendance structurelle. Parallèlement, les volumes sur le marché des changes explosent. Et il ne peut s'agir d'une simple coïncidence. Les traders, les hedge funds, les investisseurs ont conscience que nous allons assister à une guerre des monnaies qui a déjà commencé. Une guerre brutale et sans merci, dans laquelle nous allons voir émerger les alliances les plus improbables et où les victimes sont toutes désignées.La croissance est molle dans les pays développés et elle risque à tout moment de s'essouffler dans les pays émergés. Les consommateurs ne veulent plus consommer?; ils veulent, quand ils le peuvent, épargner. Dès lors, chaque pays veut relancer son économie en relançant ses exportations. Obama a même donné un objectif chiffré, inatteignable comme à son habitude?: doubler les exportations américaines en cinq ans. Or, les exportations américaines ne progressent pas ou peu. La Chine ne veut pas perdre son avantage majeur sur le commerce international. Le Japon vieillissant ne peut plus compter que sur ses exportations. Et l'Europe ne tient que grâce à l'Allemagne qui ne tient elle-même que par ses exportations.Or, désolé d'exprimer une évidence, mais pour qu'un pays exporte, il faut qu'un autre pays importe. Les États-Unis ont joué le rôle de déversoir pour toutes les exportations mondiales mais ils n'ont plus ni la volonté, ni les moyens de le faire. Chacun ne voit donc plus qu'une seule arme à utiliser?: le dumping de la monnaie. Avec un calcul simple, voire simpliste et qui n'est pas toujours vrai?: plus une devise baisse, plus les exportations d'un pays sont compétitives. Le Japon a utilisé cette arme pendant vingt ans et s'est hissé au 2e rang des puissances économiques. La Chine utilise cette arme depuis quinze ans et lui a ravi cette deuxième place récemment.Mais c'est là que cela se complique un peu. Le marché des changes est le seul marché où pour qu'un actif baisse... un autre doit monter et vice versa. Toutes les monnaies ne peuvent pas toutes baisser. Il faut, pour que le yuan baisse ou que le dollar baisse, qu'une ou plusieurs autres devises montent. Il faut donc des maillons faibles... des devises fortes. Des pays qu'on va pouvoir inonder d'exportations en les asphyxiant avec une monnaie forte.Première victime de cette chasse impitoyable?: le franc suisse. La Banque Nationale Suisse a tenté de résister en intervenant pour freiner la hausse du franc suisse mais elle a dû jeter l'éponge. Deuxième victime?: le yen. Le yen a atteint des niveaux record de hausse contre le dollar, du jamais-vu depuis quinze ans et la Banque du Japon essaie d'intervenir depuis quelques jours pour tenter de renverser la tendance. Mais ni la Suisse, ni le Japon ne suffiront à assouvir les appétits américains et chinois. Il faut du sang frais, une nouvelle victime. Et cette victime toute désignée, c'est l'euro. Quel paradoxe non?? Donné disparu il y a encore deux mois par les grands prévisionnistes qui voyaient sa chute inéluctable, l'euro a rebondi en ligne droite de 1,1875 à plus de 1,34. Les malheurs de l'Irlande et les inquiétudes sur les dettes périphériques européennes freinent certes un peu sa progression mais on sent monter un peu partout, dans les salles de marchés des grandes banques et des fonds spéculatifs, la conviction que la Chine et les États-Unis vont soudain se prendre d'un amour aveugle pour l'euro. Un amour intéressé bien sûr et un amour étouffant. Il suffirait que la Chine annonce qu'elle achète un peu de dette portugaise ou de dette grecque pour que le tour, pendable, soit complet. Une nouvelle farce est en train de se jouer, et l'Europe en sera le dindon. Le maillon... fort. Donc faible.
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