Rodolphe Belmer, le directeur général de Canal Plus, devait être très heureux jeudi soir lorsque son groupe a confirmé son projet de lancer une chaîne TNT gratuite en utilisant son canal « bonus ». C'est lui qui a soutenu ce projet, convaincu son patron Bertrand Meheut, initialement réticent, puis le principal actionnaire, Vivendi. Un tel projet présente moult avantages pour Canal. D'abord, cette chaîne en clair pourra être un outil de promotion pour l'abonnement à la chaîne cryptée, comme le sont déjà aujourd'hui les plages de programmes en clair. « Le groupe estime qu'un tiers des abonnés souscrivent pour des raisons d'image », rappellent les analystes de la Société Généralecute; Générale.Ensuite, Canal pourra capitaliser sur l'expérience déjà acquise avec ses six heures d'émissions en clair par jour. Ces plages « collectent de la publicité avec un rendement exceptionnel, grâce à des parts d'audience culminant à 8 % en avant-soirée. La part du marché publicitaire de Canal Plus atteignait ainsi 5 % en 2010, malgré une audience moyenne de 3,1 % », ajoute la Société Généralecute; Générale. Nomura abonde : « L'audience des tranches en clair a été quasi stable depuis 2002, malgré une fragmentation très significative. Et leur chiffre d'affaires est resté stable en 2009, résistant au retournement du marché. Elles rapportent une marge élevée : elles représentent 4,5 % du chiffre d'affaires, mais une part estimée à 24 % de la marge brute d'exploitation. » Concurrence avec TF1 et M6Explication : les tranches en clair - comme demain la future chaîne bonus - visent les hauts revenus, les CSP+, cible vendue 56 % plus cher aux publicitaires que les ménagères de moins de 50 ans, en coût GRP. Pour Philippe Nouchi, directeur de l'expertise média chez Reload (Publicis), « il est malin de cibler les CSP+, qui sont devenus plus difficiles à toucher depuis la suppression de la pub en soirée sur France Télévisions. Cette future chaîne va surtout permettre à Canal d'avoir une offre gratuite plus puissante, avec trois chaînes TNT (plages en clair de Canal, chaîne bonus et iTélé) et le placera forcément en concurrence avec TF1 et M6 dans les arbitrages budgétaires, alors qu'aujourd'hui son faible poids sur le marché publicitaire en fait un acteur secondaire délaissé par certains annonceurs. »Publicis estime que le marché publicitaire peut absorber 3 à 4 nouvelles chaînes gratuites. Même son de cloche chez Alain Weill, président de NextRadioTV, qui soutient le projet de Canal : « Il est faux de dire que le marché ne peut pas supporter plus de chaînes gratuites. Plus de 50 chaînes ne vivent que de la publicité aux États-Unis, et plus de 25 en Angleterre. » TF1 et M6 ne sont pas de cet avis. Leurs titres en Bourse ont accusé le coup vendredi (? 3,5 % pour TF1 et ? 1,5 % pour M6).Le projet de Canal, qui compte « mutualiser certaines dépenses » entre chaînes cryptée et en clair, pourrait poser des problèmes de concurence quant à l'acquisition des droits de films et séries, puisque Canal est en position dominante sur les achats destinés aux chaînes payantes, comme l'aurait pointé le ministère de la Culture.

latribune.fr

28 Mars 2011, 12:28

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