Tous tracés, tous fichés, tous fliqués...

la polémiqueDans le roman « 1984 », des « télécrans » installés dans les bureaux et les lieux publics permettent à la police de la Pensée de surveiller les faits et gestes des membres du parti. Écrit en 1948, le roman d'anticipation de George Orwell sonne comme une prémonition. Entre les caméras de surveillance, les cartes en tout genre (de transport, de crédit, de Sécurité sociale) et le téléphone mobile, il est déjà difficile de passer inaperçu ou de ne pas laisser de trace.Avec Google, qui nous suit partout sur la Toile, les réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter, où l'internaute dévoile sa vie et ses pensées, et des technologies comme la biométrie (fichage du corps) ou les puces RFID (qui récupèrent des données à distance), l'individu est pisté, fliqué, décortiqué en permanence. Ce n'est que le début. « Pour 2010, le gros souci, ce sont les nanotechnologies. Dans moins d'une dizaine d'années, trois-quatre ans en réalité, des puces invisibles capables de voir, d'entendre et de communiquer à distance vont voir le jour. Nous vivrons dans une société où il sera peut-être impossible d'être seul. Le droit à l'oubli, c'est le droit qu'on me fiche la paix. Si l'on n'y prend garde, nous n'aurons plus jamais cette liberté. C'est plus grave que la situation des Allemands de l'Est sous la Stasi », s'indigne le président de la Cnil, Alex Türk, qui invite les pouvoirs publics à s'emparer du débat. « Le Parlement va devoir se poser la question sur l'utilisation des nanotechnologies dans les microprocesseurs. »« droit à l'oubli »Légiférer en France ne suffira pas. Encore faudra-t-il que les autres pays en fassent autant. En la matière, les choses traînent. Malgré les avertissements de la Cnil, les pouvoirs publics ont attendu 2009 pour se réveiller. En décembre, la secrétaire d'État au numérique, Nathalie Kosciusko-Morizet, a organisé un atelier sur « le droit à l'oubli » numérique, invitant les acteurs du Net à s'entendre sur une charte. Des projets de loi ont été déposés, suggérant d'octroyer un droit opposable à l'internaute, de qualifier l'adresse IP (de l'ordinateur) en donnée personnelle et de soumettre les géants du Net américains (Ebay, Google, Facebook) aux règles informatiques et libertés locales. « Cette prise de conscience est une amorce, même si ni une charte ni une loi ne vont pas régler l'ensemble des problèmes », indique Alex Türk, pour lequel seule la mise en place de standards internationaux serait la solution. À Madrid en novembre, 80 Cnil se sont mis d'accord sur des principes de protection de la vie privée. Une avancée largement insuffisante. « C'est comme Copenhague, on est tous d'accord sur le constat. Mais on ne se donne aucune contrainte », se désole le président. Là aussi, l'Inde, la Chine, les États-Unis ou la Russie ne sont pas forcément favorables à la mise en place de normes. S. C.
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