Et le Comité international olympique (CIO) s'est mis hors-jeu

Par Michel Cabirol  |   |  639  mots
Le Comité international olympique (CIO) a décidé dimanche de priver de Jeux Olympiques de Rio la lanceuse d'alerte russe, Ioulia Stepanova spécialiste du 800 mètres
Le CIO a décidé de ne pas suspendre la délégation russe des Jeux olympiques de Rio et d'en priver en revanche... la lanceuse d'alerte russe, l’athlète spécialiste du 800 mètres, Ioulia Stepanova.

Faible avec les forts et fort avec les faibles. Le Comité international olympique (CIO) a décidé dimanche de ne pas suspendre la délégation russe des Jeux olympiques de Rio et d'en priver en revanche... la lanceuse d'alerte, Ioulia Stepanova. C'est pourtant cette athlète russe qui a révélé l'une des plus grandes affaires de dopage de ces dernières décennies. Soit ni plus, ni moins un système de dopage organisé au plus haut niveau politique en Russie. Un pays habitué des podiums. En 2012, il avait ainsi décroché le troisième meilleur total de médailles toutes disciplines confondues.

Décidément le sport n'a pas du tout envie de lever le voile sur ce qui se cache dans ses arrière-cours. Ioulia Stepanova se voit interdite de JO à Rio, qui commencent le 5 août, en raison d'un contrôle positif qui remonte à 2013. Pour cela, elle avait été très justement punie pour cet écart et par conséquent suspendue deux ans de compétitions. C'est donc un très mauvais signal pour les futurs athlètes lanceurs d'alerte, qui voudraient dénoncer certaines sales pratiques dans leur sport. Ils savent aujourd'hui qu'ils n'auront pas le soutien des plus hautes autorités sportives internationales telles que le CIO, qui a privilégié la lettre à l'esprit de l'olympisme.

La Charte olympique définit l'Olympisme comme "une philosophie de la vie, exaltant et combinant en un ensemble équilibré les qualités du corps, de la volonté et de l'esprit. Alliant le sport à la culture et à l'éducation, l'Olympisme se veut créateur d'un style de vie fondé sur la joie dans l'effort, la valeur éducative du bon exemple et le respect des principes éthiques fondamentaux universels".

Stepanova avait réussi les minima

Ioulia Stepanova, exilée aux Etats-Unis, méritait plus que quiconque de participer aux JO de Rio. Pour deux bonnes raisons, cette spécialiste du 800 mètres avait gagné son sésame après avoir réalisé les minima pour les JO, et elle a déclenché une enquête sans précédent sur les pratiques de dopage organisées en Russie. Le rapport, élaboré par le juriste canadien Richard McLaren pour le compte de l'Agence mondiale antidopage (AMA), a d'ailleurs fait état de cas de dopage répandus de sportifs russes et de dissimulations lors d'une série de Jeux olympiques d'été et d'hiver et en particulier lors des jeux d'hiver de Sotchi, organisés par la Russie.

L'avocat canadien, qui a dirigé la commission indépendante de l'AMA chargée de rédiger le rapport, a assuré lui-même lundi dernier que le ministre russe des Sports a supervisé cette manipulation. Selon lui, le personnel du laboratoire russe était obligé de participer à ce système de dopage d'Etat. Le président du CIO, Thomas Bach, avait alors estimé que les résultats du rapport illustrent "une atteinte choquante et sans précédent à l'intégrité du sport et des Jeux olympiques".

Remerciement du ministre des sports russes

Dimanche, c'est bel et bien le CIO qui a pris une décision choquante et qui porte atteinte à l'intégrité du sport, des Jeux olympiques et de l'esprit olympique. Et ce n'est pas tout. Car d'une façon très cynique, le CIO a lancé une invitation aux JO de Rio à Ioulia Stepanova et son mari, pour lui "exprimer sa reconnaissance (...) pour sa contribution à la lutte contre le dopage et à l'intégrité du sport".

En tout cas, le CIO a toute la gratitude de la Russie. Ainsi, le ministre russe des Sports, Vitali Moutko, s'est dit reconnaissant de voir que le CIO n'avait pas prononcé l'exclusion de son pays des Jeux de Rio, et a souligné que le dopage était un problème mondial qui ne touchait pas que la Russie...