La simplification du millefeuille administratif attendra

La création de la Métropole du grand Paris aurait pu être l'occasion de simplifier les structures administratives. Las... Par Steven Zunz, Président de Domaines Publics

L'annonce, le 25 novembre dernier par la Société du Grand Paris des maîtres d'œuvres chargés de construire la future ligne 15 du métro, en ferait presque oublier l'incertitude qui pèse sur le projet de métropole qui doit voir le jour le 1er janvier 2016. À sa décharge, celui-ci est censé répondre à une situation sociopolitique inextricable marquée par d'importantes inégalités, d'incessantes échéances électorales, une superposition de collectivités érigées en baronnies. En France, on n'apprécie guère le changement. Surtout lorsqu'il vise à atténuer des logiques de territoires, voire des querelles de chapelles.

En témoigne le décalage entre les objectifs affichés - alléger, clarifier, simplifier -, et la réalité institutionnelle issue de la loi du 27 janvier 2014 dite de « modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles » ou « MAPTAM ». Non seulement la loi ajoute deux nouvelles strates au millefeuille - les établissements publics territoriaux (E.P.T) et la métropole -, mais elle consacre en outre l'autonomie des premiers au détriment de la seconde.

Un édifice gangréné

Compétences, périmètre, structures, fiscalité, c'est tout l'édifice qui s'en trouve gangrené. Le projet prévoit que le territoire de la métropole couvre l'ancien département de la Seine ainsi que les agglomérations et les communes limitrophes. Dans le même temps, il préserve et conforte l'existence de « pôles d'équilibre » comme le plateau de Saclay ou Roissy. De leur côté, les structures administratives institutionnalisent un compromis entre intégration et fédération.

La métropole est un établissement public de coopération intercommunale (E.P.C.I.) sui generis à fiscalité propre, qui regroupe la capitale, le département de Paris et les E.P.T. Ces derniers sont des établissements publics qui regroupent des communes et des agglomérations dans des ensembles cohérents d'au moins 300 000 habitants. Les baronnies, loin de disparaître, changent de taille, tout en demeurant homogènes sur les plans politiques et sociologiques.

 Pas sûr que le citoyen s'y retrouve

S'agissant des compétences, la métropole reçoit des pouvoirs de coordination et d'orientation plus ou moins normatifs, tels que le schéma de cohérence territoriale (S.C.O.T.), la mise en cohérence des schémas de distribution des flux (électricité, gaz, chaleur, froid), le développement économique, la qualité de l'air et la protection de l'environnement. Les E.P.T, quant à eux, reçoivent le « pouvoir de faire » puisqu'ils exercent les compétences des communes : politique de la ville, assainissement et eau, gestion des déchets ménagers, action sociale (sauf le logement social). Ils demeurent en outre les autorités régulatrices de la distribution d'électricité. La distinction entre le « logement », de la compétence de la métropole, et l'« urbanisme », qui relève des E.P.T, est maintenue.

Les transports quant à eux restent la chasse gardée (et partagée) de la Région avec le S.T.I.F, de la société du Grand Paris et de la R.A.T.P. Pas sûr que le citoyen s'y retrouve. En ce qui concerne la fiscalité, si l'objectif à l'horizon 2020 semble clair - contribution foncière des entreprises aux E.P.T ; contribution sur la valeur ajoutée à la métropole -, le régime transitoire l'est beaucoup moins. En cause : le refus du Gouvernement de reconnaître aux E.P.T le statut de collectivité territoriale et l'hétérogénéité de taux de la C.F.E sur les territoires. D'où la nécessité de mettre en place un système complexe de compensations.

Résistances passives

Pour ces raisons, la métropole du Grand Paris se trouve plutôt à la croisée des chemins qu'au bout du tunnel. D'autant qu'elle devra faire face à de nouvelles échéances, notamment présidentielles et législatives, ainsi qu'à des « résistances passives » sur le terrain. Rien n'empêche un maire de reprendre à l'agglomération les compétences non-obligatoires qu'il lui avait concédées. Comme rien n'interdit à une agglomération de rétrocéder des compétences qu'elle a reçues. Des élus pourraient enfin être tentés d'adopter leur budget avant le 31 décembre pour qu'il soit effectif avant le 1er janvier 2016, date officielle de création de la métropole.

Faut-il désespérer ? Non, à condition que les responsables nationaux apportent une réponse simple à une question simple : à quoi doit servir la métropole ? À coordonner l'action des maires ? À résoudre les problèmes de logement et de transport en Île-de-France ? À se substituer à d'autres collectivités comme les départements ou la région ? De la réponse à cette question découleront les compétences, le périmètre et les structures. Restera alors à définir les rapports entre l'Etat et une « métropole-monde » qui représente 20% de sa population, 30% de son PIB et 40% de sa fiscalité. D'ici là, fluctuat et...fluctuat.

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