Le Brexit, une opportunité pour accélérer la transformation des banques

A moins de 500 jours de la sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne, l'incertitude demeure sur les conditions d'application et l'impact réel de cette décision sur le secteur financier, mais le compte à rebours est enclenché et le déménagement annoncé de l'Autorité bancaire européenne à Paris scelle définitivement la fin de l'hégémonie de Londres sur la finance européenne. Par Marie Garnier, Associée du cabinet Exton Consulting.
Marie Garnier, Associée Exton Consulting.
Marie Garnier, Associée Exton Consulting. (Crédits : DR)

Au cours des dernières décennies, Londres s'est affirmée comme la principale plateforme de services financiers pour les banques internationales, proposant produits, services et conseils à leurs clients en Europe continentale. Ceci a pu se faire grâce au développement du «passeport européen» dans l'Espace économique européen (EEE) permettant à ces banques de se passer d'accords locaux dans ce marché unifié. Aujourd'hui, environ 1/4 des revenus des services financiers au Royaume-Uni est lié à l'activité avec l'Union européenne (1). Pour certaines banques internationales telles que JP Morgan, cela peut même représenter jusqu'à 75% de leur personnel. Cela concerne un large éventail d'activités, principalement dans la banque d'investissement et la gestion d'actifs.

Aujourd'hui, si les conditions de départ du Royaume-Uni de l'Union européenne ne sont pas clairement définies, les négociations se tendent et la perspective d'un Brexit « dur » ne peut plus être écartée. Ainsi, être prêt pour mars 2019 quand cela deviendra une réalité, nécessite pour les banques de rapidement anticiper les impacts, d'évaluer les risques et les mesures à prendre pour y faire face, notamment en matière de déménagement d'activités au sein de l'Union européenne afin de pouvoir continuer à servir leurs clients hors du Royaume-Uni.

La concurrence est vive entre les grandes villes financières européennes, Paris, Francfort, Dublin ou encore Luxembourg, et chacune se bat pour se positionner comme le nouveau centre financier de l'Union européenne. Le déplacement de potentiellement 40.000 « Brexfugees » du Royaume-Uni vers l'UE aura un impact majeur sur les économies locales. Dans cette bataille, Paris vient de gagner une manche importante avec l'arrivée annoncée de l'Autorité bancaire Européenne et développe l'attractivité de son écosystème FinTechs (2).

Dans ce contexte, il est essentiel pour les banques de se pencher le plus tôt possible sur deux éléments clés :

  • Définir leur stratégie de service : l'intensité et l'urgence de la réaction de la banque face aux impacts du Brexit doivent être guidées par l'impact sur les ventes et la relation client de cette nouvelle situation, donc notamment par la part des activités transfrontalières GB / UE dans son activité. Le type d'approche à adopter en découlera, selon l'importance de cet impact, à savoir : faut-il prendre des paris rapidement pour se positionner parmi les premiers et s'assurer d'être prêt le jour J, ou vaut-il mieux attendre une clarification de la situation, adopter une stratégie de « suiveur » évitant les sur-réactions et bénéficier de l'expérience des concurrents, au risque de ne pas accéder aux premiers choix, par exemple en termes de localisations.

  • Revoir leur organisation et leurs localisations en fonction de critères externes (écosystème financier et économique, qualité de vie, etc.), mais aussi internes, tels que leurs agréments et présences locales existantes, l'organisation de la distribution, du « booking », les accords juridiques existants, etc.

Au-delà de cette situation, les banques d'investissement et de financement sont confrontées à des enjeux majeurs tels que l'amélioration de leur productivité, l'optimisation de leur distribution, la nécessité de se réorganiser pour assurer la conformité des activités aux nouvelles normes, etc. S'il est clair que le Brexit est apparu à l'ordre du jour des banques sans y être invité, et au vu de l'importance de ses impacts potentiels - les coûts estimés pourraient s'élever jusqu'à 1 milliard de dollar - cela s'imposera probablement comme un des sujets clés pour les prochaines années.

Ainsi, il pourrait être judicieux pour les banques concernées de saisir cette occasion unique pour repenser globalement leurs activités et actionner l'ensemble des leviers nécessaires à l'amélioration de leur rentabilité, en s'attaquant plus largement à ces défis au sein d'un programme global de transformation. De l'étude à la feuille de route et la mise en œuvre, en passant par l'étude des différents scenarii possibles et leurs impacts, les 500 prochains jours devraient être bien remplis !

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1 - Source : marketmogul.com, LSE.

2 - Création du Swave en octobre 2017 : dispositif initié par l'Etat, opéré par Paris&Co et mis au service du privé pour accompagner les jeunes pousses de la FinTech en leur proposant des services et des offres innovantes dans les domaines de la néo-finance, la cybersécurité, l'intelligence artificielle, la finance durable et solidaire.

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Commentaires 5
à écrit le 22/01/2018 à 9:14
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On ne s'inquiète pas pour les banques on s’inquiète surtout par contre de l'invasion de la finance qui a anéantie l'économie britannique menant à la décision du brexit. "L’Angleterre, 
nouveau royaume des inégalités" https://www.capital.fr/econom...

à écrit le 21/01/2018 à 15:38
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En tout cas, le Brexit n'aura AUCUN impact notable sur la City de Londres et encore moins sur son économie n'en déplaisent aux journaux et aux économiste pris dans l'Idéologie. Je l'ai dit il y a 2 ans, je le reconfirme maintenant et je le dirais ...

le 22/01/2018 à 8:04
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Le Brexit ne s'est toujours pas produit alors parler d'un succès est prématuré, voire relève de souhaits idéologiques déconnectés de la réalité, surtout à l'heure ou la croissance accélére partout sauf au RU.

à écrit le 21/01/2018 à 14:08
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Le Brexit c’est une forme de ré-sélection capitaliste de l’après 1970... C’est une «  forme de division » fiscale pour verrouiller l’evolution Économique de certains groupes.

à écrit le 20/01/2018 à 15:09
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LCL va avoir de gros problèmes car ils ne respectent pas de puis plus de 7 ans les critères de Bâle 3 principalement dans le financement des entreprises ! Leur licence bancaire est en jeu !!!!

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