Le manque d'efficacité de nos dépenses sociales

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, le manque d'efficacité de nos dépenses sociales

Trop de dépenses sociales, c'est ainsi que trop souvent est posée la question du social en France, avec l'idée que ces dernières nuisent à notre compétitivité. Alors, oui, c'est un fait, le poids des dépenses sociales est important en France. C'est la principale source d'écart des dépenses publiques avec le reste des pays développés. Rappelons très vite des ordres de grandeurs.

La protection sociale, y compris les dépenses de fonctionnement et d'investissement qui lui sont attenantes, c'était 24,4% du PIB en 2016, contre 20% en moyenne pour la zone euro, et 13,6% pour l'OCDE. Si l'on ajoute les dépenses d'investissement social, l'éducation et la santé notamment, la France creuse encore l'écart, avec 8,1% du PIB de dépenses pour la santé, contre 7,1% en moyenne pour la zone euro, et 7,8% pour l'OCDE et 5,4% pour la santé, contre 4,6% pour la zone euro et 5,2% pour l'OCDE.

Lorsque l'on additionne ces trois grandes fonctions, protection sociale, éducation et santé, la France est assimilable à une économie scandinave. Mais nous l'avons souligné maintes fois, cette approche comptable, ne dit pas grand-chose, à part le fait que nous avons opté pour des systèmes collectifs d'assurance et de gestion des grands services collectifs. Lorsque la ponction n'est pas assurée par l'État, elle est assurée par le privé. La vraie question est celle de l'efficacité de ces dépenses.

Les résultats positifs sont tangibles en France, d'un stricte point de vue social : Les inégalités, et notamment les phénomènes de concentration de richesse sont relativement bien contenus. La France est un des pays où le pouvoir d'achat des retraités est le mieux préservé par rapport aux actifs, et où les phénomènes de pauvreté sont les plus faibles. Le chômage est certes plus élevé qu'ailleurs, mais en contrepartie, la France a moins développé les emplois de bas salaires etc.

Mais il y a aussi nos grandes zones de dysfonctionnement social. Qui soulignent les limites d'une approche purement comptable des choses.

Parmi elles il y a  d'abord la trappe que constitue le chômage en France. Qui souligne l'inefficacité des dispositifs d'accompagnement, de prospection des emplois, de formation et de reconversion. C'est tout cet ensemble qui est en échec en France. Où pour des dépenses comparables à celles de l'Europe du Nord, les résultats demeurent très en deçà. Pour une raison simple : la politique sociale qui prévaut en France est passive. Son volet actif, réparateur, est sous équipé. Pôle emploi est saturé humainement parlant. Les outils numériques de prospection et d'appariement des offres et des demandes mis à disposition des chômeurs sont  sous-développés. Le maquis du système de formation s'avère insuffisamment fléché vers les chômeurs, et inefficace en matière de reconversion. En cela, la France n'est pas un vrai modèle de flexisécurité. Pour prendre la mesure de l'importance de l'accompagnement humain des assurés sociaux dans le Nord de l'Europe, il suffit de regarder la part des rémunérations dédiées à la protection sociale.  Elle oscille entre 3 et 5% du PIB contre 1,3% en France. Les dépenses sociales sont peut-être d'un même montant. Elles ne sont pas de même nature, ni animées de la même philosophie.

Autre point noir, c'est notre système éducatif, sous doté humainement au niveau du primaire, comme en témoigne les taux d'encadrement des classes à ce stade de la scolarité. Ce n'est plus le cas ensuite. Mais ces années d'apprentissage, sont, on le sait décisives sur la suite du parcours. Les classements PISA en témoignent. Moins en termes de niveau moyen, finalement comparables à ceux de beaucoup des grandes économies. Mais surtout en termes de reproduction des inégalités.

Dernier point noir enfin, la santé. Le système fonctionne globalement. Mais la saturation des urgences est le révélateur de la mauvaise allocation des moyens. Le système ne coûte pas beaucoup plus cher qu'ailleurs, mais entre les déserts médicaux, le report de la dépendance sur l'hôpital, les numérus clausus mal calibrés par le passé, il est clair que le défi dépasse de beaucoup le simple enjeu comptable. 
Ce défi, on le voit est d'abord organisationnel.

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Commentaires 6
à écrit le 09/05/2018 à 13:08
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Il faut tenir compte du role de l'énergie. Lisez et appliquer la note n°6 du CAE. C'est la seule solution. Qui arrivera t il à le comprendre?

le 10/05/2018 à 10:04
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@ Gépé, Bonjour, je pense que les «  taxeurs » ont compris l’importance de «  l’énergie » mis à part le décret ministérielle de février 2018 ( qui limite le taux du gaz)et les chèques énergies , tous les Français ont du voir leur facture de gaz tri...

le 10/05/2018 à 10:38
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Je précise que la réduction du cout du travail favorise la développement de l'économie et que l'augmentation du prix de l'énergie favorise la protection du climat.

le 11/05/2018 à 13:10
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Merci pour votre réaction. Il faut raisonner "à niveau constant". Ce que je propose concerne la répartition des prélèvements actuels, sur la production et sur la consommation. La note n°6 du CAE permet de vérifier l'importance de cette répartition av...

à écrit le 09/05/2018 à 12:07
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la part des salariés du public dans l'emploi total est de 29% en Suède/Danemark (25% en Finlande) contre 21,4% en France (Government at a Glance 2017, OCDE). le pourcentage de travailleurs dans la Santé/Social est plus élevé de 2 à 4 points (Health ...

à écrit le 09/05/2018 à 11:04
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Vous devriez plutôt faire un article (si vous en avez le courage, car ça contrarierait des personnes très puissantes) sur le % des dépenses publiques captées par une minorité d'ultrariches. Ce serait nettement plus édifiant.

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