Réduire les inégalités de genre dans le secteur des fintechs

OPINION. Lundi 17 octobre 2022, Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, a annoncé rendre obligatoire, pour les start-ups cotées faisant partie du Next 40 et du French Tech 120, la publication de leur index d'égalité professionnelle à partir de 2023. Un nouveau pas pour encourager les femmes à faire carrière dans le secteur des technologies. Par Kate Solovieva, Vice-présidente, Services financiers - Europe chez IDA Ireland
(Crédits : DR)

Pour reprendre les mots de Susan Wojcicki, CEO de YouTube :

« Bien que nous ayons besoin de plus de femmes diplômées dans le domaine technique, j'aime toujours rappeler aux femmes qu'il n'est pas nécessaire de posséder un diplôme scientifique ou technologique pour faire carrière dans la technologie ».

Par ailleurs, la nouvelle génération de jeunes femmes entrant sur le marché du travail a grandi dans un monde saturé de technologies, caractérisé par une innovation constante. Il n'est donc pas surprenant qu'elles soient déjà mieux préparées que les générations précédentes à intégrer le secteur des technologies. Cette évolution technologique leur offre un avantage considérable, ainsi qu'un éventail de possibilités bien plus large.

La technologie est désormais transversale et touche tous les secteurs, tels que la finance, le marketing, l'éducation, l'environnement, l'alimentation, etc. Le milieu de la Fintech (contraction de « technologie financière » pour désigner des petites entreprises (start-up et PME) qui fournissent des services financiers grâce à des solutions innovantes - source Bercy Infos Entreprises) a notamment connu une croissance considérable ces dernières années, et exige des professionnels qu'ils soient de plus en plus qualifiés dans plusieurs domaines. Naturellement, nous nous attendrions à ce que cela se traduise par davantage d'opportunités pour les personnes issues d'horizons plus larges. Cependant, les femmes demeurent sous-représentées. En effet, alors que d'autres régions du monde comme le Moyen-Orient et l'Afrique progressent sur la voie de l'inclusion, une étude de Findexable révèle que l'Europe compte 2,5 fois moins de femmes CEO qu'au Moyen-Orient dans la fintech. Cet écart représente une occasion manquée, compte tenu de la nature potentiellement disruptive de nombreuses fintechs, en particulier celles ciblant les domaines à forte croissance axées sur la diversité. La prise en compte de la diversité des genres sera en effet déterminante pour tenir cette promesse et atteindre le succès.

L'exemple de l'Irlande

L'Irlande est l'un des pays qui déploie le plus d'efforts pour intégrer les femmes dans le secteur des technologies. En effet, selon le rapport 2020 sur l'Etat de la Technologie en Europe, elles représentent 32% des développeurs de logiciels dans le pays, contre une moyenne de 30% dans le reste de l'Europe. Afin d'accompagner cette évolution, le ministre irlandais de l'Éducation et des Compétences prévoit d'ailleurs d'augmenter à 40% le nombre de femmes choisissant des filières STIM (sciences, technologies, ingénierie et mathématiques) pour l'obtention de leur certificat de fin d'études.

Aussi, les étudiantes manifestent un potentiel et un intérêt considérables pour l'étude des STIM. Selon une enquête menée auprès de plus de 2 500 écolières irlandaises, 85% d'entre elles déclarent qu'elles aimeraient en savoir plus sur les STIM ou les carrières dans ce domaine ; mais 93% des enseignants interrogés indiquent que la confiance en soi des filles constitue un obstacle majeur à la promotion des STIM. Le défi n'est donc pas tant de susciter l'intérêt que de doter les étudiantes des compétences pratiques dont elles ont besoin pour accroître leur confiance en leurs propres capacités.

Bien qu'il soit absolument nécessaire de promouvoir la présence des femmes au sein de l'entreprise, il est également important d'encourager davantage l'ascension des femmes - toujours plus nombreuses - à des postes de direction. A ce titre, un rapport de Grant Thornton International indique qu'encore 18% des entreprises irlandaises ne comptent aucune femme à des postes de direction, en hausse importante par rapport aux 8% identifiés en 2019. Il ressort de plus que 17% n'en comptent qu'une seule à ce type de postes. Ce faible taux d'accession des femmes à de hautes fonctions constitue un autre défi à relever pour garantir simultanément diversité et performances commerciales optimales.

Des mesures pour réduire l'écart en France

Si en France, de nombreuses femmes travaillaient dans le secteur des technologies aux premières heures de l'informatique, les hommes ont progressivement dominé ce secteur au cours des dernières décennies. Alors que les femmes représentent 45% des étudiants du secondaire qui choisissent les sciences, seules 20% d'entre elles deviennent ingénieures. En ce qui concerne les start-ups françaises, 28% des employés sont des femmes - mais ce chiffre chute à 16% si l'on considère uniquement les femmes ingénieures. Afin de lutter contre ce déclin, la France s'est fixée pour mission de proposer de nouvelles initiatives visant à mieux intégrer les femmes dans les STIM. L'initiative la plus notable remonte à 2017, le gouvernement français ayant proposé un plan pour promouvoir l'égalité des sexes dans l'écosystème tech, avec l'aide de 15 organisations.

En outre, si seulement 10% des start-ups en France sont actuellement fondées par des femmes, les entreprises comptant au moins une femme fondatrice affichent un taux de prospérité supérieur de 63% à celui des entreprises dominées par les hommes. Ces résultats démontrent que l'inclusion et la diversité sont un moteur de performance. Ils illustrent également l'un des avantages conférés par la présence accrue de femmes dans les entreprises, à savoir qu'elles peuvent apporter une perspective différente de celle des hommes en matière d'idées et d'approches. En outre, les organisations qui prennent en compte différents points de vue en tireront profit, car elles seront en mesure de s'adresser à un marché plus vaste. Pour combler ces inégalités, un évènement axé sur la diversité dans l'entreprise, le Women in Tech Global Summit, dont la prochaine édition se tiendra en mai 2022 à Paris, a permis dès 2020 de relancer le débat sur les défis auxquels les femmes sont confrontées dans le secteur des technologies et de promouvoir des exemples de réussite qui ont contribué à l'émancipation des femmes et des filles dans le monde entier.

Le fait que de nombreuses femmes se heurtent encore à des obstacles en termes de représentation au sein des entreprises technologiques, et des organisations en général, n'est un secret pour personne. Cependant, il ne faut pas ignorer les avantages qui découlent du leadership des femmes. L'inclusion et la diversité au sein d'une organisation, synonymes de complémentarité et de synergie des idées, induisent de nouvelles stratégies, permettant d'élargir les portefeuilles de clients et de tendre vers une société plus égalitaire. Aussi, la nouvelle génération de femmes entrant sur le marché du travail a grandi dans un monde technologique en perpétuelle évolution. Celles-ci sont désormais mieux équipées et plus déterminées que jamais à briser le plafond de verre auxquels les générations précédentes ont été confrontées dans le monde professionnel.

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Commentaire 1
à écrit le 22/10/2022 à 17:28
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Il faut simplement dire, vouloir en rabaisser le niveau ! :-)

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