Vue d'Allemagne, peut-on envisager un plan de relance ?

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, peut-on envisager un plan de relance pour l'Allemagne ?
(Crédits : DR)

VIDEO

Les chiffres du second trimestre l'ont confirmé : le PIB de l'Allemagne est en recul, et un troisième encore dans le rouge, ce qui signifierait techniquement qu'une récession, n'est pas à exclure comme le souligne le bulletin de conjoncture de la Bundesbank paru en août. Une situation qui fait évoluer les esprits outre-Rhin, du moins un peu. Certains s'interrogent désormais sur les dogmes budgétaires qui orientent la politique économique de Berlin.

 « Des mois sombres nous attendent, qui menacent de se transformer en années si les pouvoirs publics ne prennent pas de contre-mesures énergiques », prévient Joachim Lang, le représentant du patronat de l'industrie.

Percuté par le ralentissement chinois et les menaces sur le commerce mondial, le système productif s'inquiète, et plaide pour une relance de l'investissement public : un consensus se dessine désormais entre économistes du secteur privé et ceux de sensibilité sociale-démocrate ou proches des syndicats.

Mais pour l'heure, le gouvernement d'Angela Merkel fait mine de ne pas entendre. La chancelière  ne voit  pas aujourd'hui de nécessité de soutenir l'activité, et indique qu'elle réagira à l'avenir en fonction de la situation. Et pourtant, comme l'écrit le magazine Der Spiegel, « les doutes » sur l'équilibre budgétaire « s'intensifient au sein du gouvernement fédéral ». Lequel travaille en coulisses, selon la presse, sur l'idée d'un plan de 50 milliards d'euros afin de financer des investissements dans les infrastructures, une prime à la casse pour les chaudières au fioul ou encore des mesures de chômage partiel.

Un gros retard d'investissements

Néanmoins, la réorientation du modèle économique allemand aura besoin de bien davantage qu'un plan ponctuel, actionné seulement à la suite d'un choc majeur et d'une montée du chômage. Après le boom de la réunification, l'Etat a mis ses investissements à la diète. Pour les seules communes, au régime sec, c'est un retard d'investissements de 138 milliards d'euros qui a été identifié par la banque publique KfW.

En ajoutant la nécessité pour l'Allemagne d'investir pour relever ses défis éducatifs et de la formation professionnelle, du numérique et de la décarbonation des transports et l'économie, ou encore les besoins en logement, c'est un montant d'investissements publics de 450 milliards d'euros sur 10 ans, soit 45 milliards d'euros par an,  qu'il faudrait mobiliser selon Michaël Hüter, directeur de l'institut patronal IW. Pour Michaël Huter, un « fonds pour l'Allemagne » pourrait emprunter 450 milliards d'euros à l'échéance de dix ans, en profitant de la bonne affaire des taux d'intérêts négatifs. Marcel Fratzscher, président du DIW, de sensibilité sociale-démocrate,  fait une analyse très proche : il identifie la nécessité de dépenser plus de 50 milliards d'euros par an pendant 10 ans, une partie pouvant venir de co-investissements avec le secteur privé.

Pour lancer un grand programme pluriannuel d'investissements, l'Etat fédéral pourrait, en principe, passer par une structure dédiée, qui lui permettrait de contourner le « frein de la dette ». Ce mécanisme d'encadrement de la dette publique, inscrit dans la Constitution depuis 2009, s'applique aux dépenses inscrites au budget, pas à l'endettement de structures publiques comme celles qui ont été créées, par exemple, pour porter la dette des chemins de fer ou pour mener des sauvetages bancaires. Aller plus loin en programmant des investissements publics massifs hors budget serait un acte politique de rupture. Nous n'en sommes pas encore là.

Mais chacun se prépare pour le moment de vérité : le modèle économique allemand fondé sur une croissance axé sur les exportations et les excédents de la balance des paiements pour placer des capitaux à l'étranger ne sera pas soutenable éternellement.


>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 10
à écrit le 06/09/2019 à 15:49
Signaler
La question est: y-a t-il un problème en Allemagne ? Excédent budgétaire, dette publique par rapport au PIB qui ne fait que baisser, exports records qui vont certes baisser..... Cordialement

à écrit le 05/09/2019 à 9:54
Signaler
"le modèle économique allemand fondé sur une croissance axé sur les exportations et les excédents de la balance des paiements pour placer des capitaux à l'étranger ne sera pas soutenable éternellement.", oui et la raison en est simple : les ressource...

à écrit le 04/09/2019 à 19:36
Signaler
Berlin et Pékin sont dans la même situation. Que faire quand vous êtes une nation hyper-exportatrice et que vos marchés sont en train de se fermer ou que votre produit phare est en voie de déclin ? Réponse: il faut se recentrer sur son marche i...

à écrit le 04/09/2019 à 16:55
Signaler
il se trouve que le pb de l'allemagne, c'est pas l'investissement ils feraient mieux de diminuer les impots, vu que leur pb c'est la consommation juste l'oppose de la france bon, apres c'est sur, vu la complexite des Steuertabellen, c'est dur de v...

à écrit le 04/09/2019 à 11:51
Signaler
L’Allemagne doit décentraliser ou plutôt délocaliser toute son industrie dans les pays de l'UE qui se désindustrialise! Elle doit disparaître comme suprématie dans le domaine! Mais, comme la France, elle ne veut pas disparaître dans ce "bouillon de...

le 04/09/2019 à 13:40
Signaler
Pourquoi devrait-elle disparaître, si elle peut rester pour très longtemps le pays le plus prospère d'Europe?

le 04/09/2019 à 15:21
Signaler
Peut être parce que les nations sont portés a disparaître pour laisser place aux régions.

à écrit le 04/09/2019 à 10:23
Signaler
Comment relancer quand il y a pénurie de main d'oeuvre. Les investissements, qu'ils soient publics ou privés, utilisent de la main d'oeuvre pour leur création. Les banques allemandes sont aussi très fragiles, leur passif est insondable. Son niveau de...

à écrit le 04/09/2019 à 10:06
Signaler
Bienvenu en UERSS, empire qui était prévu pour durer mille ans, ils y croient encore visiblement...

à écrit le 04/09/2019 à 9:51
Signaler
Pourquoi vouloir "relancer" l'Allemagne ? Elle est très bien comme elle est ? "contre-mesures énergiques" : Contre-mesure contre quoi ? Contre le fait que le soleil se couche à la fin de la journée ? Tout cela est absurde.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.