Impôts : guider son client pour sa déclaration

Avec la multiplication des réformes, remplir sa déclaration de revenus n'a jamais semblé aussi ardu que cette année. L'exercice est pourtant simple... à condition de se poser les bonnes questions.
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Rarement la période de la déclaration de revenus aura autant laissé les contribuables perplexes. Il faut reconnaître que, cette année, tout concourt à ce que l'on en perde son latin. Coup de rabot sur les niches fiscales, alourdissement des prélèvements sociaux comme des taux d'imposition sur les plus-values, réduction accordée à l'investissement PME, réforme de la fiscalité (évoquée puis reportée fin 2010)... les atermoiements des élus ont largement contribué à déboussoler les ménages. On les comprend. Pourtant, la quasi-totalité des mesures adoptées lors de la loi de finances ne concerne pas la déclaration de revenus 2010 (voir illustration) que chaque contribuable doit remplir avant le 30 mai.

Pour ne rien arranger, la déclaration d'ISF a été décalée à septembre, en attendant le vote du projet de loi portant sur la réforme de la fiscalité mi-juillet. À l'inverse, les mesures votées fin 2009 dans la loi de finances 2010, sont, quant à elles, entrées en vigueur !

Autant dire qu'un point sur la situation est plus que jamais nécessaire. Pas de panique : les changements sont en fait assez marginaux cette année. D'abord, les démarches ont été à nouveau simplifiées. De nouvelles cases préremplies ont fait leur apparition, et le contribuable pourra moduler ses mensualités de paiement directement par Internet. La réforme sur le mariage, le Pacs et le divorce n'est, quant à elle, applicable qu'à compter du 1er janvier dernier. Pas de changement, donc, pour un changement de situation matrimoniale ayant eu lieu en 2010 : il faudra comme auparavant remplir 3 déclarations (1 commune après la date du mariage, et 1 par personne pour la période précédant le mariage).

La fiscalité évolue

Les changements les plus notables concernent la fiscalité. Le seuil de cession sur les valeurs mobilières (actions, Sicav, etc.) de 25.830 euros existe toujours pour les revenus 2010. Sous ce seuil de ventes réalisées dans l'année, les plus-values ne sont pas imposables. En revanche, contrairement aux années précédentes, elles supporteront des prélèvements sociaux dès le premier euro.

La tranche la plus élevée du barème, qui passe de 40 % à 41 %, entrera également en application pour les revenus 2010. Quant au plafonnement global des niches fiscales, qui représente le montant maximal que l'on peut retrancher de ses impôts, il passe à 20.000 euros plus 8 % du revenu net imposable.

Enfin, le crédit d'impôt pour l'achat d'une résidence principale, bien que supprimé depuis, reste valable pour les acquisitions signées en 2010. Tout comme les réductions offertes par l'investissement en loi Scellier, pourvu que le compromis de vente (ou la réservation) ait été signé avant le 1er janvier dernier. Les différents coups de rabot, en revanche, concerneront la déclaration sur les revenus 2011.

Ces nouveautés mises à part, tout contribuable doit continuer à se poser comme chaque année les bonnes questions s'il veut optimiser, pour ne pas dire réduire, le chèque qu'il enverra au Trésor public. Pour vous aider dans vos choix, nous avons demandé à l'Ordre des experts-comptables Paris-Île-de-France de nous livrer leurs conseils (voir ci-dessous).

Françoise Berthon, présidente de l'Ordre des experts-comptables Paris Île-de-France :

« Il faut toujours vérifier les chiffres inscrits sur la déclaration de revenus préremplie »

À cause de la fiscalité toujours plus complexe, recourir à un professionnel devient presque indispensable pour les cadres et les non-salariés.

Comment les contribuables appréhendent-ils les changements permanents en matière de fiscalité ?

Pour eux, remplir la déclaration devient chaque année plus complexe. Au lieu de supprimer purement et simplement certaines niches fiscales, le gouvernement plafonne, rabote et, du coup, complexifie. Sur le terrain, nous devons être très vigilants car les contribuables peuvent être rapidement noyés.

La déclaration préremplie a pourtant été enrichie dans un souci de simplification, justement...

C'est vrai. Pour le contribuable salarié qui a effectué quelques dons, la déclaration est devenue très simple, même s'il faut toujours vérifier les chiffres pré-remplis. Mais pour un cadre, ou un travailleur non salarié, tout devient plus compliqué dès lors qu'il perçoit des revenus locatifs, qu'il dispose d'un portefeuille d'actions, ou qu'il déclare une femme de ménage...

En quoi les experts-comptables sont-ils armés pour répondre à ces problématiques de déclaration sur le revenu ?

Depuis cette année, notre fonction a été élargie à la déclaration des particuliers. Cette avancée répond à une véritable demande de nos clients pour qui nous travaillons déjà sur les aspects professionnels. Les experts-comptables sont des professionnels de la fiscalité, qu'elle concerne le particulier ou l'entreprise. Et ils constituent un véritable conseil de proximité.

Que pensez-vous de la réforme de l'ISF en cours ?

Si le projet est voté en l'état, je trouve qu'elle arrive à point nommé. Avec la flambée de l'immobilier, de plus en plus de contribuables devenaient assujettis à l'ISF à cause de la résidence principale, malgré l'abattement de 30 %. Le seuil de 1,3 million me paraît plus juste. Et la simplification du barème, avec seulement deux tranches, va également dans le bon sens.

4 questions à se poser :

1 - Parents : combien de parts faut-il déclarer ?

Avant tout, il faut savoir que les parents isolés peuvent bénéficier d'une majoration de leur quotient familial égale à une demi-part supplémentaire au titre de la première personne à charge lorsqu'ils vivent seuls (sont donc exclus les couples vivant en concubinage). Dans ce cas, il faut cocher la case T page 2 de la déclaration 2042.

Si vous ne respectez pas la condition de vivre seul au 1er janvier 2010, vous pouvez toutefois encore bénéficier de la demi-part supplémentaire si vous avez bénéficié de la demi-part pour l'imposition des revenus de 2008 et 2009. Selon votre situation, il conviendra de renseigner les rubriques cadre A, case E ou K, L et N.

Pour les couples ayant un enfant étudiant, il peut se révéler plus avantageux de ne pas réclamer le bénéfice de l'exonération des salaires afin de préserver le droit à la prime pour l'emploi. Car il faut déclarer un minimum de revenu imposable pour en bénéficier. Il faudra en revanche déclarer la totalité des salaires que l'enfant a perçus.

Pour les enfants majeurs, enfin, un choix s'impose : le rattachement au foyer fiscal ou la déduction d'une pension alimentaire. Avantages de la première solution ? Majoration du quotient familial et abattement pour enfant à charge sur la taxe d'habitation. Bien sûr, il faudra alors déclarer les éventuels revenus de l'enfant. La pension alimentaire, quant à elle, est déductible du revenu imposable, limitée à 5.698 euros par an (3.359 euros s'il vit à la maison).

2 - Frais professionnels : déduction forfaitaire ou frais réels ?

Au moment d'établir leur déclaration, les salariés doivent choisir entre la déduction forfaitaire de 10 % et la déduction des frais réels. Chaque membre du foyer fiscal peut choisir la déduction la plus appropriée.

La déduction forfaitaire de 10 % couvre les frais professionnels courants (transport du domicile au lieu de travail, restauration sur le lieu de travail, dépenses de documentation personnelle...). Attention, les allocations destinées à couvrir de telles dépenses doivent être ajoutées au revenu imposable, sauf exonération expressément prévue (contribution de l'employeur aux titres restaurant ou aux frais de transport en commun).

Mais tout salarié peut opter pour les frais réels. Il suffit de remplir la case correspondante sur la déclaration et d'être en mesure de justifier du montant des frais déduits. Attention, il faut alors réintégrer dans ses revenus les allocations pour frais d'emploi versées par l'employeur.

Le principe est similaire s'agissant des frais de transport, pour ceux qui utilisent leur véhicule personnel. L'évaluation forfaitaire, réservée aux propriétaires de leur véhicule, se fait au moyen du barème kilométrique publié chaque année par l'administration. L'évaluation réelle est possible à condition d'en justifier le montant.

Ce qu'il faut déduire : les sommes correspondant à la dépréciation annuelle du véhicule, les intérêts de l'éventuel emprunt, les frais d'usage (carburant, stationnement, assurance), d'entretien et de réparation.

3 - Quel régime appliquer pour les revenus locatifs ?

Lorsque l'on a perçu des revenus de biens donnés en location, on doit bien évidemment les déclarer. Toutefois, il faut distinguer les revenus de location nue des revenus de location meublée.

Les revenus issus d'une location nue sont à déclarer dans la catégorie des revenus fonciers. Si leur montant n'excède pas 15.000 euros, un régime simplifié d'imposition s'applique : le micro-foncier. Les revenus sont portés directement sur la déclaration 2042 et l'administration pratique sur ce montant un abattement forfaitaire pour charges égal à 30 %. En contrepartie, aucune déduction n'est possible.

Si le contribuable en fait la demande ou s'il perçoit plus de 15.000 euros de loyers, il passera au régime réel d'imposition. Une déclaration 2044 ou 2044 S devra être remplie, et son montant net reporté sur la déclaration 2042.

S'il s'agit d'une location meublée, le système est différent. Les revenus entrent alors dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et non des revenus fonciers.

Deux possibilités existent : le régime micro-BIC ou le régime réel. Vous relevez du régime micro-BIC lorsque vos recettes n'excèdent pas 32.100 euros. Le revenu imposable étant ensuite déterminé après un abattement forfaitaire pour frais de 50 %.

Au-delà, c'est le régime réel d'imposition qui intervient. Dans ce cas, les recettes sont retenues pour leur montant réel. Les revenus de location meublée doivent être reportés dans la déclaration 2042 C.

4 - Comment déclarer les primes exceptionnelles perçues ?

Tous les contribuables ayant perçu des revenus exceptionnels, comme des primes ou des différés (rappels de salaires, rappels de loyers, etc.), peuvent éviter la progressivité de l'impôt sur le revenu et donc une imposition excessive au regard des revenus perçus d'ordinaire. Il leur suffit pour cela d'appliquer le système dit du « quotient ».

Pour en bénéficier, le contribuable devra inscrire le total de ses revenus dans le cadre prévu à cet effet en page 3 de la déclaration n°2042 (ligne 0XX).

Plusieurs conditions sont toutefois requises. D'une part, les revenus à imposer selon le système du quotient ne doivent pas être inclus dans les autres revenus déclarés. D'autre part, un revenu est considéré comme exceptionnel lorsque son montant est supérieur à la moyenne des revenus imposables des trois années précédant sa perception. Une rémunération variable régulièrement attribuée ne pourra donc être prise en compte. En revanche, le système du quotient s'applique quel que soit le montant des revenus différés.

Le fameux « quotient » qui sera pris en compte est obtenu en divisant le montant des revenus exceptionnels (ou différés) par un coefficient. Pour les revenus exceptionnels, celui-ci est fixé à 4. Pour les revenus différés, il est égal au nombre d'années civiles correspondant aux échéances normales de versement, augmenté de un. Une prime de 16.000 euros pour un revenu ordinaire de 45.000 euros permettra ainsi d'économiser 1.431 euros !
 

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