Fonds indiciels cotés complexes : le retrait du label « OPCVM » fait débat

L'idée, avancée par Jean-Claude Trichet, président de la Banque centrale européenne, apparaît difficilement applicable. Cela nécessiterait une remise en cause de la directive sur les fonds coordonnés.
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Et si on retirait le label UCITS (OPCVM) aux ETF synthétiques (fonds indiciels cotés coordonnés intègrant un swap) ? « Cela aiderait à maintenir la confiance dans ce label si des produits complexes donnent lieu à des problèmes dans le futur. » Cette proposition ne vient pas d'un fervent supporter des ETF physiques (ces fonds détiennent les titres du CAC 40, par exemple, lorsqu'il s'agit de le répliquer), mais de Jean-Claude Trichet, président de la Banque centrale européenne, qui s'exprimait comme président du CERS (conseil européen du risque systémique).

Pour certains, ces propos sont réducteurs. « Tout d'abord, UCITS n'est pas un label mais une norme, rappelle un acteur de la Place. Dans sa réponse à la consultation de l'ESMA (l'autorité européenne des marchés) sur les ETF UCITS et les UCITS structurés, le CERS pointe du doigt les produits à effet de levier et inverse (qui parie sur la baisse). De plus, l'ESMA n'évoque pas la suppression du label. » L'autorité veut développer des lignes directrices pour les ETF synthétiques. Pour Yvette Roozenbeek, directrice chez Eurogroup Consulting, « la protection des investisseurs reste la priorité. Plus de transparence sur la structure des produits, sur les frais ne peut être qu'une bonne chose. » D'autant que l'essentiel de l'offre est constitué d'ETF simples. Mais depuis 2007, les dérivés sont dans le collimateur des régulateurs. « Pourquoi ne pas supprimer les dérivés de tous les fonds coordonnés », s'interroge un spécialiste. La place évoque aussi la création d'une catégorie « UCITS complexes », par opposition aux non-complexes. L'AMF fait déjà cette distinction pour les fonds à formule, régis par la directive MIF. Il s'agirait d'appliquer cette même distinction aux produits de la directive UCITS.

Modifier les directives

Mais qu'implique la proposition de Jean-Claude Trichet ? « Cela nécessite de modifier les directives OPCVM, ce qui n'est pas si simple, explique Stéphane Puel, associé au cabinet Gide Loyrette Nouel. Il faut revoir les règlements d'application, les textes de transposition en droit local. » Pour Jean-Baptiste Coiffet, associé en charge de la gestion d'actifs chez Equinox Consulting, « on retournerait dans une logique complexe de distribution des produits, la notion de passeport disparaîtrait, les acteurs et les produits seraient de nouveau soumis à l'agrément des régulateurs locaux. Cela ralentirait le développement des ETF. » Et comme il faut tout mettre dans des cases, où classer les ETF « délabellisés » ? Si ces ETF restent des fonds, « dans la directive AIFM (alternative investment fund mangers), répond Stéphane Puel. Par définition, tout ce qui n'est pas UCITS est AIFM. » Mais alors que les UCITS sont « passeportables », c'est-à-dire commercialisables n'importe où et auprès de tout type de clients, ce ne sera plus le cas. Sous AIFM, auront accès aux produits les investisseurs professionnels et, le cas échéant, le particulier si le régulateur l'autorise. De même, seuls les professionnels pourront, à la suite de l'exercice du passeport, souscrire aux produits des pays européens tiers. Le périmètre de distribution est donc réduit. Perdre le label UCITS serait donc financièrement préjudiciable pour certaines maisons.

Au final, la proposition de Jean-Claude Trichet, difficile à mettre en place, ressemble davantage à une mise en garde à l'industrie. Mais au regard de la demande pour ces fonds - 113 milliards de collecte à fin août - leur fin n'est pas encore programmée.

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