Les départements menacent de ne plus verser le RSA !

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  648  mots
Dominique Bussereau (ici en 2009), président de l'Assemblée des départements de France demande à l'Etat de venir aider les départements à payer le RSA
A 15 jours de son congrès, l'Assemblée des départements de France (ADF) met la pression sur le gouvernement sur le versement du RSA. Faute de compensation intégrale de l'Etat, les départements font face à une forte hausse de leurs dépenses en faveur du RSA qu'ils ne peuvent plus assumer.

Décidément, les collectivités locales sont inquiètes pour leurs finances publiques. Une dizaine de jours après le coup de colère des maires qui ont protesté contre la baisse de la dotation de l'Etat (11 milliards d'euros sur trois ans), c'est au tour de l'Assemblée des départements de France (ADF) de pousser un « coup de gueule » à deux semaines de son 85ème congrès qui se tiendra du 14 au 16 octobre à Troyes dans l'Aube. Ce sont notamment les dépenses sociales que doivent assurer les départements qui « étranglent leurs finances », selon les termes de l'ADF. Le nouveau président de l'Assemblée des départements de France, Dominique Bussereau (président « Les Républicains » du conseil départemental de Charente-Maritime) estime ainsi que « dix départements ne pourront plus financer le RSA [revenu de solidarité active] d'ici la fin de l'année ». Déjà, les départements du Nord et de la Seine-Saint-Denis ont appelé au secours.
Parmi l'ensemble des collectivités territoriales, le département est en effet le niveau compétent pour assurer la solidarité et verser les allocations individuelles de solidarité (AIS) sociales.

RSA un "reste à charge" de 4 milliards d'euros pour les départements

Ainsi, globalement, l'Etat verse chaque année aux départements 6,4 milliards d'euros au titre du RSA. Mais cela ne suffit pas, le "reste à charge » des départements ne cesse d'augmenter. Après 3,3 milliards d'euros en 2014, il atteint 4 milliards cette année. De leur côté, le "reste à charge" pour la prestation de compensation du handicap (PCH) a progressé de 10,9% par an depuis 2012 et celui de l'allocation personnelle d'autonomie (APA) de 20,6%. Au total, pour l'ensemble des AIF, le "reste à charge" non compensé par l'Etat s'élève à 8,1 milliards, soit une progression de 13,2%  depuis 2012.
D'où un sentiment d'étranglement. L'ADF a donc demandé à l'Etat de « trouver une solution pérenne au financement du RSA par la solidarité nationale ». En d'autres termes, elle ne combat pas l'idée d'une recentralisation du "RSA"  - c'est-à-dire que son versement incomberait de nouveau à l'Etat - même si cela "va à l'encontre d'une politique de décentralisation, précise Dominique Bussereau, mais nous sommes pris à la gorge".

Des pertes de recettes pour les départements

Les départements ont d'autant plus l'impression d'être au bord de l'asphyxie qu'ils s'estiment victimes d'un véritable effet ciseau. Si leurs dépenses sociales augmentent, dans le même temps leurs recettes diminuent. D'abord, la baisse des dotations de l'Etat va se traduire pour eux par un manque à gagner de 4 milliards d'euros. Et la décision - prévue par la loi NOTRe - de doubler la part de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) attribuée aux régions aux  dépens des départements va également les priver de 4 milliards d'euros. Et ce n'est pas l'augmentation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) accordés aux départements qui viendra compenser cette perte.

L'ADF attend donc un geste rapide de Manuel Valls, en tout cas avant le congrès de l'Association. "Nous voulons des mesures à court terme pour nous aider à passer la fin de l'année et des mesures plus pérennes pour financer les AIS", précise Dominique Bussereau.

Le 2 mars dernier, Manuel Valls avait décidé d'installer un groupe de travail dédié à cette question de financement des AIS. Une nouvelle réunion doit avoir lieu ce mardi soir 29 septembre pour trouver une solution. Dans l'immédiat, l'ADF demande a minima que l'Etat prenne à son compte l'augmentation du "reste à charge" entre 2014 et 2015, soit 750 millions d'euros. En attendant des mesures plus drastiques.

Et Dominique Bussereau de prévenir: "Si l'Etat ne bouge pas avant notre congrès de la mi octobre, ça va être sportif, les départements pourraient décider de ne plus payer que 8 ou 9 mois de RSA"... Façon d'accentuer la pression sur le gouvernement.