Valoriser le carbone

De quoi DEMAIN sera-t-il fait ? Bpifrance mène une réflexion sur les sujets qui révolutionneront notre quotidien dans les années à venir, du point de vue de notre transport, notre alimentation, notre santé, notre façon de commercer et de travailler, grâce à l'innovation. Pour cela, Bpifrance anime une démarche collective en mode projet, pilotée par les collaborateurs de la banque publique et associant les acteurs des écosystèmes concernés. L'un des sujets stratégiques récemment traités a été les biocarburants avancés.
(Crédits : DR)

Créée en 2018 par deux ingénieurs agronomes, Amaury de Souancé et Simon Peltier, AgriCarbone est un « lieu de rencontre » entre agriculteurs, dont les déchets peuvent servir à divers usages, et industriels qui ont des besoins en énergie. Une façon de participer à la mise en place d'une filière à la hauteur de la demande.

Lors d'un pitch devant des investisseurs potentiels, ils ont décrit leur jeune pousse comme le « Tinder » de l'agriculture et de l'industrie... De fait, AgriCarbone, la société lancée en 2018 par Amaury de Souancé et Simon Peltier, tous deux ingénieurs agronomes, est une plateforme de rencontres. Entre des agriculteurs qui produisent, lors des récoltes, de la paille de colza, de blé, d'orge, d'avoine, de même que des résidus en tous genres (fumier, lisier...), d'une part, et des sociétés qui oeuvrent dans le secteur de la construction, en fabriquant des matériaux comme des panneaux agglomérés ou des balles qui s'insèrent dans des cloisons en bois pour l'isolation, ou des producteurs d'énergie qui recherchent des matières organiques pour faire fonctionner leurs unités de méthanisation ou de combustion, d'autre part.

Soutien de Bpifrance

Et les deux jeunes entrepreneurs ont su convaincre, puisqu'ils ont levé 375 000 euros auprès d'investisseurs et bénéficié également d'un prêt de Bpifrance. « Les biocarburants conventionnels, à base de colza ou céréales, par exemple, ont en effet leurs limites, tant au point de vue environnemental qu'en matière de concurrence avec l'alimentation », souligne Marc-Antoine Blanchet, au Pôle Investissements Transverses capital-risque de Bpifrance. AgriCarbone, en revanche, a tout bon. Son système s'appuie sur les seuls déchets de la production agricole et, en les valorisant, apporte un complément de revenus aux agriculteurs et aux éleveurs, de même qu'il permet de lutter contre le dérèglement climatique en offrant des produits de substitution biosourcés aux industriels de la méthanisation, de la combustion ou de la chimie du végétal, tout en favorisant la complémentarité territoriale et l'économie locale. En outre, « lorsque nous prélevons, lors de nos collectes, de la paille de colza, par exemple, auprès d'un agriculteur, nous lui proposons toujours en parallèle d'autres produits, collectés ailleurs, tels que du fumier ou du digestat issu de la méthanisation, pour faire en sorte qu'il puisse l'épandre dans ses champs afin de les fertiliser en enrichissant le sol en humus, explique Amaury de Souancé. Nous bouclons donc la boucle en ce qui concerne le cycle du carbone et nous pratiquons ainsi l'économie circulaire. »

Outre leur volonté d'oeuvrer à la durabilité de l'agriculture, les deux ingénieurs agronomes s'assurent de la qualité et de la disponibilité des produits envoyés en direction des industriels, et ce, dans le périmètre le plus réduit possible : quelques dizaines de kilomètres, en général, et de toute façon, moins d'une centaine.Pour l'heure, AgriCarbone, basée à Paris et qui compte cinq salariés, est active en Ile-de-France et dans le centre-ouest. Mais son but est de rayonner sur l'ensemble du territoire.

Au-delà des biocarburants avancés, qui seront de plus en plus en demande, ne serait-ce qu'en raison du prix toujours plus élevé de l'énergie fossile et de la nécessité de préserver l'environnement, d'autres usages de produits biosourcés, en particulier dans la chimie, sont à l'étude. « Cette filière a un très haut potentiel, du fait qu'elle exige beaucoup de matériaux, mais la biomasse disponible actuellement en France n'est pas suffisante », précise Amaury de Souancé. En effet, selon l'étude de l'Ademe, pour que l'économie française fonctionne avec 100% de gaz renouvelable en 2050, il faudrait non seulement réduire la consommation de ce combustible mais aussi utiliser toutes les ressources disponibles... Entre la production de biogaz, l'émergence des biocarburants avancés et les autres usages industriels de la biomasse agricole, la compétition risque d'être rude. « Notre but est de contribuer à la mise en place d'une filière qui soit à la hauteur de la demande et de créer des emplois », relève de son côté Marc-Antoine Blanchet, en faisant référence, au-delà de la production industrielle, à la décarbonation des transports.

Pour l'heure, en effet, les ressources ne sont pas assez captées et la production ne suffit pas à répondre aux besoins de certains secteurs, l'aviation en première position. « Il s'agit d'un choix de société », conclut Amaury de Souancé. En proposant une plateforme de mise en relation entre partenaires, fournisseurs et clients, en assurant la logistique pour la collecte et le « retour » de produits, AgriCarbone a bien l'intention de participer à cette transformation de la société.

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Commentaire 1
à écrit le 17/10/2022 à 14:17
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Il est assez amusant de voir comment les "mots" sont censés résoudre les problèmes."Par exemple, "révolutionner notre quotidien", mais la révolution n'est qu'une re-évolution, or l'évolution est un phénomène permanent dans tout le cosmos et donc pou...

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