« La gastronomie provençale ne se limite pas à la bouillabaisse »

Parce qu’alimentation, circuits courts, soutien aux filières et à l’innovation composent un tout, Martine Vassal, présidente d’Aix-Marseille Provence, détaille ce que MPG porte comme philosophie.
Martine Vassal, présidente d’Aix-Marseille Provence.
Martine Vassal, présidente d’Aix-Marseille Provence. (Crédits : Jean-Paul HERBECQ)

Pourquoi avoir choisi de consacrer une année à un événement consacré à la gastronomie ?

Il y a sur ce territoire une véritable dynamique portée par tous les acteurs de la filière gastronomie. Cet élan, nous devons l'accompagner et le pérenniser parce qu'il constitue un vecteur de rayonnement pour la Provence. Nos producteurs, nos vignerons et nos chefs emblématiques sont nos meilleurs ambassadeurs. Cette richesse culinaire mérite d'être valorisée. Après Marseille Provence 2013 capitale européenne de la culture, Marseille Provence capitale européenne du sport 2017, nous avons voulu valoriser une nouvelle thématique qui correspond à l'ADN de notre territoire. La gastronomie est un symbole identitaire fort de la Provence, qui est au cœur de notre patrimoine immatériel : comme nous protégeons et valorisons nos bâtiments historiques, nous devons entretenir la gastronomie qui est une culture vivante. C'est aussi un lien intergénérationnel qui m'est cher, les recettes de nos grands-parents se transmettant de génération en génération.

La gastronomie est forcément liée à l'agriculture, à la valorisation des produits du terroir, aux circuits courts... On ressent un intérêt vif pour une alimentation davantage en phase avec les valeurs d'authenticité. Un tel événement joue-t-il le rôle de levier économique ?

La filière agricole est un pilier de notre économie locale qui représente 11 000 emplois permanents et 15 000 emplois saisonniers. Et elle doit encore se renforcer. J'ai à cœur d'œuvrer au développement d'une agriculture locale de qualité et accessible à tous. En partenariat avec le PETR [Pôle d'équilibre territorial et rural, ndlr] du Pays d'Arles, la Métropole vient d'ailleurs de lancer un Projet alimentaire territorial (PAT) visant notamment à rapprocher producteurs, transformateurs, distributeurs, collectivités territoriales, associations et consommateurs. Elaboré avec l'ensemble des acteurs publics et privés, le PAT s'appuie sur la participation de tous. Plus d'une centaine de propositions alimentent déjà le plan d'action qui sera déployé l'an prochain. Nous voyons aujourd'hui les limites d'une agriculture mondialisée et nous voulons privilégier les circuits courts, la qualité gustative de notre alimentation et lutter contre le gaspillage des fruits et légumes.

Comment accompagner les filières à se structurer, à trouver leur équilibre économique, notamment ?

Cela passe par de nombreuses actions concrètes. Nous multiplions notamment les marchés de producteurs, par un soutien logistique fort, afin de recréer du lien entre le monde de la ferme et les consommateurs. La Halle Terres de Provence a rassemblé en 2018 63 producteurs et 124 000 visiteurs à Plan de Campagne et Pertuis, notamment. Mais nous agissons en réalité sur l'ensemble de la filière. Par exemple en modernisant le MIN des Arnavaux à Marseille, qui commercialise chaque année 500 000 tonnes de produits alimentaires : ce plan d'investissement de 80 millions d'euros bénéficiera d'une aide de 25 millions du Département et de 10 millions de la Métropole. Nous aidons aussi de jeunes agriculteurs à s'installer sur des terres que nous sanctuarisons dans nos documents d'urbanisme pour les réserver à la production alimentaire. C'est essentiel.

Le melon de Cavaillon ou le rosé sont nés d'innovations. Aujourd'hui on parle beaucoup de foodtech. De quelle façon encourager et valoriser l'innovation ?

C'est un sujet essentiel. J'ai lancé le mois dernier le « Smart food challenge » qui met en compétition des startups qui réfléchissent à des solutions innovantes pour faciliter l'accès aux produits locaux ou pour accompagner l'agriculture vers des pratiques nouvelles. L'idée est de répondre aux besoins pour valoriser les filières en circuitcourt et pour transmettre les bonnes pratiques d'alimentation au bénéfice de la santé publique. Nous soutenons aussi au quotidien toutes les initiatives qui permettent à la technologie d'apporter un plus à l'action de l'homme. C'est le cas quand nous accompagnons les startups du territoire au CES de Las Vegas ou au Salon Vivatech, où nous leur permettons de rencontrer des prospects ou des financeurs pour développer leur activité. En matière d'agriculture, nous encourageons également les expérimentations et nous avons remis plusieurs prix de l'Innovation lors du Salon des agricultures de Provence, organisé sur le quelques semaines, avec 60 000 visiteurs. On a ainsi pu mettre à l'honneur cette année des cosmétiques au lait de brebis, des ruches connectées, des desserts au riz de Camargue ou encore les champignons de Marseille qui n'ont rien à envier à ceux de Paris ! Nous donnons un coup de projecteur aux producteurs qui prennent des initiatives.

MPG2019 est aussi un outil d'aide à la revalorisation du centre-ville. Comment le rendre pérenne ?

La revitalisation des centres-villes est une de mes priorités à l'échelle du territoire. La Métropole a déjà agi à Aix-en-Provence, Salon, La Ciotat, Cassis... et vient de s'engager dans la requalification de sa capitale avec l'opération « Marseille change ». Nous venons également de voter des délibérations cadre pour lutter contre la vacance commerciale, nous testons les boutiques à l'essai... Et dans le domaine de la gastronomie, nous essayons de nous appuyer sur l'existant pour redynamiser des artères commerciales comme la rue de la République : création du restaurant éphémère de MPG2019, délocalisation événementielle de marchés de producteurs, expositions culinaires, cours de cuisine... Je souhaite d'ailleurs créer une grande halle gourmande à Marseille comme ça se fait à Lisbonne ou Barcelone : nous cherchons le lieu idéal qui permette l'accès des camions et qui soit bien desservi par les transports en commun. Avec une vue sur mer, ce serait parfait !

La notoriété du territoire en matière de gastronomie se devait-elle d'être renforcée ?

La gastronomie provençale ne se limite pas à ses plats les plus populaires comme la bouillabaisse ou les pieds et paquets. Nous avons un vrai savoir-faire, près
de 35 produits labellisés AOP AOC issus d'un terroir exceptionnel, des chefs étoilés reconnus. Ce n'est pas pour rien que l'événement Good France, porté par le ministère des Affaires Etrangères, a choisi cette année la Provence pour faire découvrir les saveurs de nos terroirs aux quatre coins du monde : de Séoul à New York
en passant par Bruxelles et Paris, avec un grand dîner aux pieds de la Tour Eiffel !

La gastronomie n'est-elle pas finalement un vecteur d'attractivité territoriale comme toute autre filière ?

Effectivement. On voit de plus en plus se développer le tourisme gastronomique avec des visiteurs qui viennent pour découvrir des restaurants étoilés, faire la route
des vins, ou découvrir nos recettes traditionnelles plus pittoresques. Nous avons des paysages et un climat exceptionnels, un patrimoine riche qui remonte aux époques grecque et romaine, un littoral qui fait des envieux et des saveurs uniques qui font de la Provence une destination touristique de premier choix. 8 millions de touristes viennent chaque année en Provence et nous avons enregistré en 2018 une hausse de 11 % de la clientèle étrangère. Nous avons travaillé sur la marque territoriale « One Provence » qui vient d'être dévoilée. La gastronomie provençale est une carte de visite exceptionnelle que nous pouvons adresser au monde entier !

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Commentaire 1
à écrit le 07/08/2019 à 15:30
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Le triptyque huile d'olive, ail, herbes de Provence correctement dosé est un réhausseur de goût formidable dans les recettes locales et d'ailleurs, à condition d'être noyé par un p'tit rosé frais et fruité à p'tit prix. La gastronomie provençale n'es...

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