Les 7 engagements de Martin Bouygues auprès de Montebourg

Par Delphine Cuny  |   |  953  mots
« Nous nous engageons à ne procéder à aucun licenciement collectif, plan social, plan de départs volontaires dans le cadre de cette fusion » assure Martin Bouygues dans sa lettre au ministre du Redressement productif.
Dans une lettre adressée au ministre du Redressement productif, le PDG du groupe de BTP promet formellement d'investir dans la fibre 400 millions d'euros par an et de rapatrier des centres d'appels en France notamment.

La lettre aurait pu commencer par un « moi, premier actionnaire de Bouygues Telecom-SFR je m'engage », sur le mode de l'anaphore du candidat à la présidentielle François Hollande. Martin Bouygues a voulu formaliser par écrit, de manière solennelle, des engagements, au nombre de sept, en cas de succès de son offre de rachat de SFR à Vivendi, énoncés dans un courrier à Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, qui en a livré quelques paragraphes ce mardi matin lors d'une interview sur RTL. Voici la liste complète des engagements pris par le patron du groupe de BTP, qui ne diminue pas d'intensité sa campagne pour emporter SFR face à son rival Altice-Numericable. 

1. Investissement

« Nous nous engageons à investir 2 milliards d'euros par an sur les réseaux fixes et mobiles, en particulier dans le domaine de la fibre optique 400 millions d'euros par an. »

Actuellement, Bouygues Telecom investit entre 700 et 750 millions d'euros dans les réseaux, hors achat de fréquences, dont un peu moins de 100 millions dans la fibre. De son côté, SFR investit environ 1,6 milliard d'euros chaque année dans ses réseaux, dont 150 millions par an dans la fibre optique, où il se revendique "le seul opérateur alternatif investissant massivement dans le FTTH (Fiber to the home, fibre jusqu'à l'abonné)", titre que Free veut s'arroger.

2. Startups

« Nous nous engageons à augmenter les capacités d'investissement de notre incubateur de façon à amplifier le soutien que nous offrons déjà à de nombreuses start-up du numérique »

Créé en 2009, Bouygues Telecom Inititiaves a réalisé 9 investissements et incubé une vingtaine de startups dont Recommerce (reprise et vente de mobiles d'occasion), Ijenko (solution de maîtrise de la consommation d'énergie des foyers), Melty (sites d'actu dédiés aux 18-30 ans) et Visibrain (veille et analyse de Twitter). De son côté, SFR n'a pas d'incubateur mais un fond d'investissement baptisé SFR Développement qui a des participations dans une douzaine de startups, dont Ifeelgoods et Nomotech.

3. Emploi

« Nous nous engageons à ne procéder à aucun licenciement collectif, plan social, plan de départs volontaires dans le cadre de cette fusion »

Initialement, Martin Bouygues s'était engagé sur « zéro départ contraint », ce qui laissait la porte ouverte à des plans de départs volontaires. Bouygues Telecom et SFR emploient tous les deux 9.000 personnes. Ils ont tous deux mis en oeuvre des plans de départs volontaires en 2012, portant sur 550 postes chez Bouygues et présenté comme « le premier de l'histoire du groupe Bouygues », et sur 850 départs nets chez SFR.

4. Centres d'appels

« Nous nous engageons à rapatrier plusieurs centres d'appels en France »

Le groupe ne s'engage pas sur un chiffre précis d'autant que Bouygues Telecom compte six centres d'appels internalisés, tous en France, employant 2.500 personnes. Mais il a également recours à des sous-traitants, comme Webhelp et Teleperformance, dont les call centers sont situés à l'étranger, au Maroc, au Portugal ou à Madagascar, pour B&You par exemple : environ 2.500 personnes travailleraient pour l'opérateur. SFR a davantage externalisé, notamment chez Teleperformance, essentiellement en France, mais l'opérateur possède plusieurs centres d'appels en interne, à Massy, AIx-en-Provence, Nantes et Bordeaux, où il emploie environ un millier de personnes.

5. Cotation à Paris

« Nous nous engageons à coter le nouvel ensemble à la Bourse de Paris. »

Le groupe Bouygues est coté à Paris, tout comme Vivendi et SFR devait également être introduit en Bourse par une scission en juin à la Bourse de Paris. Toutefois, le groupe Numericable est également coté à Paris et doit le rester dans le cas d'un rachat de SFR, a promis sa maison-mère Altice, qui est elle cotée à Amsterdam.

6. Siège social en France

 « Nous nous engageons à maintenir le siège social en France »

 On imagine mal le groupe Bouygues délocaliser le siège du nouvel ensemble hors de France. Cependant, c'est une tendance chez certains groupes du CAC 40. Par exemple, Publicis qui va fusionner avec le géant américain Omnicom a indiqué que le siège social du futur groupe sera à Amsterdam.

7. Patriotisme économique

 « Nous nous engageons à favoriser, à chaque fois que cela est pertinent sur le plan technique, les fournisseurs français. »

Actuellement, Bouygues Telecoma pour fournisseur d'équipements télécoms le suédois Ericsson et le chinois Huawei dans le mobile, pour le fixe un appel d'offres est en cours; pour la fibre il s'agit du français Alcatel-Lucent et de Huawei. Enfin sa dernière Box est signée Samsung et le français Sagemcom. De son côté, SFR se fournit auprès du finlandais NSN et de Huawei pour ses équipements radios, auprès d'Alcatel-Lucent et de l'américain Cisco pour le coeur de réseau. La Box est conçue en interne et fabriquée par Sagemcom, Sony et Cisco.

La réponse indirecte d'Altice Numericable

Dans l'après-midi, Altice, le premier actionnaire de Numericable lui a indirectement rétorqué, dans une annonce présentée comme une réponse aux demandes de la ministre à l'Economie numérique, Fleur Pellerin. « Suite à la demande d'engagement plus formel exprimée hier par Madame Fleur Pellerin, le groupe Altice confirme volontiers qu'il est tout à fait prêt à inscrire ses engagements en matière d'emplois et d'investissements dans les licences d'opérateur détenues par SFR » indique le groupe de Patrick Drahi dans un communiqué. Il répète qu'il s'engage « à maintenir les effectifs de SFR et de Numericable, et à ne pas effectuer de suppression de postes, sous quelque forme que ce soit » et à « poursuivre les investissements dans le très haut débit » mais pas spécifiquement dans la fibre optique jusqu'au domicile (FTTH), ce que privilégie le gouvernement dans son plan France Très haut débit...