"Il faut mettre en demeure Free" sur l’itinérance d’Orange

Par Delphine Cuny  |   |  583  mots
« Il faut que l’Arcep mette en demeure Free avant l’échéance réglementaire » selon le président de l'Autorité de la Concurrence.
Le président de l’Autorité de la concurrence estime que le gendarme des télécoms, l’Arcep, devrait agir en vue de mettre un terme à l’accord d’itinérance entre Free Mobile et Orange. Bruno Lasserre demande qu’une expertise soit diligentée sur la faisabilité technique d’une extinction par plaques géographiques.

C'est le sujet sensible du secteur des télécoms depuis l'arrivée de Free Mobile en janvier 2012 : l'accord d'itinérance 2G et 3G conclu avec Orange, qui lui permet de louer le réseau de l'opérateur historique (numéro un en qualité de service) là où il n'a pas encore déployé le sien. Bouygues Telecom en particulier essaie de le faire écourter ou suspendre. L'Autorité de la concurrence, saisie par Arnaud Montebourg, avait rendu en mars 2013 un avis appelant à la fin de cette itinérance nationale, de façon progressive, entre 2016 et 2018. Mais rien n'a été fait depuis, comme l'avait déjà déploré Bruno Lasserre, le président du gendarme de la concurrence, il y a un mois. Il est revenu à la charge ce jeudi, lors d'une conférence de presse dressant le bilan annuel de l'activité de l'autorité.

« L'itinérance doit prendre fin, en 2016 voire 2018. Comment ? Il faut que l'Arcep mette en demeure Free avant l'échéance réglementaire, il faut anticiper et ne pas attendre le dernier moment, pour vérifier qu'il est sur la bonne trajectoire d'investissement » a déclaré Bruno Lasserre.

Il a rappelé qu'il avait lui-même estimé que cette itinérance était une aide nécessaire au démarrage et qu'il ne reniait pas cette position. « Mais nous avons émis des doutes et des craintes sur la pérennisation de l'itinérance, qui crée une situation de dépendance financière d'un côté et stratégique de l'autre. » Il a souligné qu'il ne s'agit « pas de supprimer la licence » en mettant en demeure Free de façon anticipée, avant janvier 2015, qui correspond à l'obligation de couverture de 75% de la population en 3G inscrite dans sa licence. Le réseau en propre de Free couvrirait environ 65% de la population selon les déclarations de ses dirigeants, un niveau qui n'a pas été certifié par l'Arcep.

« Aucun calendrier, aucune proposition ou méthodologie »

« Nous n'avons vu aucune étude à la suite de cette proposition, aucune proposition concrète, aucune réunion menée par le régulateur pour mettre en place le calendrier et la méthodologie que nous avons suggéré. Nous sommes déçus que rien n'ait été fait depuis un an. C'est un peu dommage », a poursuivi Bruno Lasserre. Il a rappelé que l'avis préconisait « l'extinction par plaques», par zones réputées couvertes par Free: « il faut prendre Free au mot, ce n'est pas punitif mais incitatif, c'est l'aiguillon sur l'étrier du cheval. » Or certaines voix du côté des opérateurs concernés affirment que cette extinction n'est « pas faisable techniquement. »

« On aimerait que ce soit au moins expertisé. Réfléchir à une méthodologie pour envisager une extinction progressive par plaques régionales de l'itinérance, c'est un travail qui ne peut être mené effectivement que par l'Arcep » a fait valoir le président de l'Autorité de la concurrence.

Le président de l'Arcep, Jean-Ludovic Silicani, avait déclaré qu'il s'agissait d'un contrat de droit privé et qu'il ne sentait « à ce stade, pas d'enthousiasme à accélérer le calendrier [d'extinction de l'itinérance] chez l'opérateur qui en tire des revenus significatifs », c'est-à-dire Orange (720 millions d'euros en 2013 !).

« La seule chose qui peut déclencher la concentration du marché mobile français, c'est la fin de l'itinérance. Quand on sifflera la fin, Free sera obligé de bouger pour s'acheter un réseau » parie un spécialiste du secteur. Par exemple en rachetant Bouygues Telecom...