Altice veut lever les inquiétudes sur sa dette et sa stratégie

Par Pierre Manière  |   |  744  mots
Patrick Drahi, le fondateur et chef de file d'Altice, maison-mère de SFR.
La maison-mère de SFR s’est fendue d’une mise au point la nuit dernière. Dans un communiqué, le groupe du milliardaire Patrick Drahi, qui a suscité la défiance des marchés, assure qu’il ne prépare aucune levée de fonds. Il précise aussi sa stratégie de désendettement.

Dans l'œil du cyclone après deux semaines de dégringolade boursière, Altice s'est fendu d'une nouvelle mise au point la nuit dernière. Dans un communiqué, le géant des télécoms et des médias a voulu rassurer les marchés sur différents sujets. En premier lieu, balayant certaines rumeurs, le groupe assure qu'il ne prépare aucune levée de fonds. Il n'a « aucune intention de le faire, y compris aux Etats-Unis ». De quoi apaiser, a priori, ceux qui redoutaient une dilution.

Le groupe du milliardaire Patrick Drahi, maison-mère de SFR, affirme une nouvelle fois que dorénavant, il donne la priorité au désendettement. Sachant que, pour rappel, la dette totale du groupe dépasse les 50 milliards d'euros, et inquiète nombre d'investisseurs. « Altice confirme son intention d'atteindre un niveau d'endettement conforme ou inférieur aux objectifs fixés », lit-on dans le communiqué. Le groupe réaffirme aussi qu'il fait une pause côté fusions et acquisitions.

Vente de pylônes

Dans le même temps, Altice précise comment il compte se désendetter. Pour y arriver, le groupe va vendre certains « actifs non-stratégiques », et en particulier ses milliers de pylônes de téléphonie mobile. « Altice a initié des processus de cessions, qui débuteront dans le courant du premier semestre 2018 », affirme le groupe. Interrogé par La Tribune, Altice ne souhaite pas, pour l'heure, communiquer sur l'ampleur et le montant de ces ventes. Il n'est pas le premier groupe de télécoms à choisir cette option pour faire rentrer de l'argent dans les caisses. Outre Telefonica en Espagne, ou Deutsche Telekom en Allemagne, Bouygues Telecom a vendu un grand nombre de ses pylônes ces dernières années. En janvier dernier, l'opérateur de Martin Bouygues a conclu un accord avec le groupe espagnol Cellnex concernant l'exploitation et la vente de 3.000 sites d'antennes de téléphonie mobile. Cette opération lui a permis de récupérer environ 500 millions d'euros.

L'autre levier sur lequel Altice mise pour honorer sur le moyen et le long terme ses échéances de remboursement, c'est bien sûr « le redressement opérationnel en France ». Sur ce front, il s'agit de relancer SFR. L'opérateur est confronté, depuis 2014 et son rachat par Altice, à des fuites massives de clients déçus à la concurrence. C'est la raison pour laquelle vendredi dernier, Patrick Drahi s'est fendu d'une lettre aux salariés de l'opérateur au carré rouge pour leur demander de tout faire pour « mieux servir » les abonnés.

Inquiétude sur la situation des holdings

Une autre inquiétude concerne la situation financière des holdings à travers lesquels Patrick Drahi contrôle Altice. « Si, à ce niveau, Patrick Drahi a fait beaucoup de dette, et s'il existe des contreparties liées au cours d'Altice - comme des processus de remboursement anticipé, de renégociation des conditions des crédits, ou encore de cession immédiate de titres -, le groupe pourrait être en danger, explique un analyste financier sous couvert d'anonymat. Dans ce cas de figure, Patrick Drahi pourrait être contraint par ses créanciers de faire remonter du cash d'Altice à ses holdings. »

Patrick Drahi a déjà été confronté à cette situation. En novembre 2015, il a cédé 7,5% d'Altice suite à une restructuration de la dette de Next, son principal holding personnel. A l'époque, l'opération avait entraîné une chute du titre de près de 10%. Lors de l'introduction d'Altice en Bourse, l'année précédente, Patrick Drahi avait, à travers Next, racheté des actions du groupe. Pour ce faire, il avait souscrit un crédit, appelé « margin loan », en offrant en garantie des titres Altice. Mais suite à une baisse du cours, les créanciers ont demandé des compensations, qui ont au final été soldées par une cession de titres. Aujourd'hui, Altice affirme que la situation est sous contrôle malgré sa lourde chute en Bourse. Dans son communiqué, le groupe l'assure : « Altice confirme que son actionnaire majoritaire, Next, ne dispose d'aucun 'margin loan' lié à Altice. »

Ces mises au point ont visiblement permis à Altice de relever un peu la tête. A la clôture de la Bourse d'Amsterdam ce lundi, le titre progressait de 5,2% à 8,52 euros. Mais il en faudra plus pour remonter la pente. La capitalisation boursière du groupe a presque fondu de moitié en un peu plus de deux semaines, à 11,5 milliards d'euros.