De loin, il ressemble au pavé classique qui équipe tous nos ordinateurs. De près en revanche, le clavier, dont la startup Piamot vient de lancer la commercialisation, affiche sa différence. Il compte autant de touches que son aîné, mais elle sont disposées symétriquement en demi-cercle pour une meilleure ergonomie. D'un côté les consonnes, de l'autre les voyelles.
L'agencement des lettres diffère sensiblement de celui qui s'est imposée en France depuis l'avènement de la machine à écrire. « Dans notre cas, le placement est le fruit d'une approche qui tient compte des bigrammes (des couples de deux lettres ndlr) les plus utilisés », détaille Damien Le Lann, associé et co-fondateur de Piamot, basé à Louvigny près de Caen. Le P voisine ainsi avec R, le F avec le L et le G se rapproche du N.
Exit la frappe lettre à lettre
Car sur ce « piano des mots » comme l'appelle ses concepteurs, oubliée la saisie lettre après lettre. L'utilisateur actionne plusieurs touches simultanément afin de former des syllabes. Ecrire le mot « bonjour » par exemple n'exige que deux frappes contre sept habituellement. En réalité, la technologie n'est pas nouvelle. Elle réinvente le vélotype, un clavier d'un abord très complexe mis au point dans les années 30 pour le sous-titrage.
Consultant pour la société caennaise Système Risp, connue pour retranscrire en direct les allocutions du président de la République, Guy Hollier Larousse, président de Piamot, a passé vingt ans à perfectionner le système. « La velotypie, qui exige au moins deux ans de formation, reste une spécialité onéreuse et confidentielle. Guy a voulu la démocratiser en simplifiant son utilisation », decrypte Damien Le Lann.
Pour parfaire le dispositif connectable à n'importe quel ordinateur, 11.000 locutions, raccourcis ou groupes de mots courants sont intégrés au logiciel qui pilote le clavier. Moyennant quoi, il suffit d'une frappe pour ajouter un « s'il vous plait » ou un « cordialement » en bout de phrase. À l'image de celui des smartphones, il est également proposé un système prédictif. S'y ajoutent un correcteur d'orthographe et un gestionnaire automatique de l'accentuation.
Frappe à très grande vitesse
Les quatre associés de la startup (12 salariés) assurent que les cinq « piamistes » qu'ils ont formés en quelques mois sont en capacité d'atteindre une vitesse de frappe de l'ordre de 1.200 caractères à la minute contre 800 pour un vélotypiste confirmé et... 150 pour un individu lambda. « Tous les professionnels pour qui la rapidité de saisie est gage de productivité peuvent être intéressés », soulignent-ils.
Quant au modèle économique, il combine BtoB et BtoC, s'adressant tant aux entreprises qu'aux particuliers. Epaulée par la BPI, la société a ouvert une école de formation au Piamot certifiée Qualiopi et se prépare à créer en parallèle une entreprise à mission qui proposera des prestations de sous-titrage, notamment à l'intention des sourds et malentendants. « L'inclusion est l'un des moteurs de notre projet », insiste Damien Le Lann. Une campagne de crowdfunding sera lancée ultérieurement pour des précommandes. À plus long terme, il est envisagé de dupliquer le modèle dans d'autres langues. Connaissant la plasticité des générations X ou Y, qui sait si le bon vieux clavier AZERTY n'a pas trouvé son rival.
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