Apple : les iPhone pèsent moins de 50% du chiffre d'affaires

Par François Manens  |   |  1136  mots
Pour la première fois depuis 2013, les ventes d'iPhones pèse moins de 50% du chiffre d'affaires d'Apple. (Crédits : Andrew Kelly)
Si l'iPhone reste de loin le produit phare d'Apple, son poids dans les ventes de l'entreprise est amené à diminuer. Pour prendre son relais, l'entreprise californienne compte sur le succès de ses accessoires et sur sa transformation en entreprise de services.

Ce sont peut-être les prémisses de la fin d'une ère pour Apple. Pour la première fois depuis 2013, les ventes d'iPhone représentent moins de 50% de son chiffre d'affaires. Si les smartphones pèsent encore près de 26 milliards de dollars, leurs ventes ont chuté de 11,8% par rapport à l'an dernier. La faute à une concurrence exacerbée, notamment de la part des marques chinoises, et à une saturation du marché. Malgré la baisse des recettes tirées de sa vache à lait, Apple est parvenu à augmenter son chiffre d'affaires de 1% par rapport à 2018, à 53,8 milliards de dollars, après deux trimestres consécutifs en baisse.

D'un côté, la firme californienne a pu compter sur le reste de ses ventes de matériel (iPad, MacBook et accessoires), en progression de 19,8% à 16,3 milliards de dollars. De l'autre, les efforts consacrés au développement de ses activités de service (Apple Pay, App Store, Apple Music, iCloud...) portent leurs fruits, avec une augmentation des ventes de 12,6%, à 11,5 milliards de dollars. En conséquence, Apple a maintenu un bénéfice trimestriel à plus de 10 milliards de dollars, en baisse de 13% par rapport à l'an dernier mais supérieur aux prévisions. Ces résultats ont été suffisants pour rassurer les marchés, qui ont sanctionné l'annonce par une augmentation de 4% de l'action à la fermeture de la Bourse à New York.

L'iPhone pèse moins... en attendant 2020 ?

La sortie de l'Iphone X et de ses déclinaisons à l'été 2018 avait conduit Apple à des chiffres records. Mais face à la concurrence chinoise de Huawei, Oppo ou encore Xiaomi, l'entreprise américaine perd du terrain. Elle prenait 11,8% des parts de marché au premier trimestre 2019, contre 19,4% au dernier trimestre de 2017. Sur la même période, Huawei présente une dynamique inverse (selon IDC). Par ailleurs, le marché du smartphone stagne, ralenti par le manque d'innovation de rupture. Les consommateurs ne changent plus aussi rapidement de smartphone. La nouvelle génération de smartphones pliables, qui aurait pu débloquer la situation, accuse un important retard, après le lancement raté puis décalé du Samsung Galaxy Fold, et le report du Huawei Mate X. Mais malgré tout, la baisse des ventes d'iPhone s'avèrent moins importante que celle anticipée par les analystes.

"Les chiffres présentés par Apple vont être perçus de façon positive d'autant que de nombreux sceptiques cherchaient des signes de faiblesse sur le front de l'iPhone à cause des turbulences dans l'industrie du smartphone et en Chine", a tempéré pour l'AFP Daniel Ives, analyste chez Wedbush.

D'après les analystes, la prochaine génération d'iPhone, qui sortira en 2019, ne proposera que des améliorations de performances et de puissance. Il faudra probablement attendre 2020 pour voir émerger les premiers modèles compatibles 5G. Cette nouvelle technologie offrira une vitesse de téléchargement plus importante qui pourrait ouvrir la voie à de nouveaux usages. Les acteurs du secteur comptent sur cette nouveauté technologique pour convaincre les clients d'investir à nouveau plus de 1.000 euros pour renouveler leur smartphone.

Écouteurs et montres, nouvelle porte d'entrée dans l'univers Apple

Si les smartphones d'Apple se vendent moins, ce n'est pas le cas des accessoires qui l'accompagnent. Dans son bilan financier, le géant de la tech regroupe sous la même étiquette les AirPods (écouteurs sans fils), les Apple Watch (montre connectée), les HomePod (enceintes connectés) ou encore les écouteurs Beats (acquis en 2014). Cette division est en plein boom par rapport à l'an dernier, avec des ventes en hausse de 48% à 5,5 milliards de dollars. La seconde génération de AirPods a conforté le produit dans sa position de référence de son marché, encore peu concurrentiel, tandis que la quatrième génération d'Apple Watch a corrigé de nombreux défauts qui ralentissaient son développement.

Côté matériel, les ventes de Mac ont également augmenté de 16% par rapport à l'an dernier, tandis que celles d'iPad ont grimpé de 8% Ce sont des bons signes pour l'entreprise de Tim Cook. Apple a construit son succès sur son écosystème fermé, avec des synergies logicielles entre ses différents produits. A titre d'exemple, la fonction AirDrop permet un transfert de fichiers très simple et rapide entre les appareils de la marque sous iOS, mais pas avec d'autres appareils. Les consommateurs sont donc incités à acheter tous leurs produits électroniques chez Apple afin d'en profiter, dès lors qu'ils en possèdent un. Si jusqu'ici l'iPhone a été la principale porte d'entrée dans l'écosystème Apple, d'autres produits, comme les AirPods, pourraient prendre son relais. Ils fonctionnent sur Android, et ne nécessitent pas un iPhone. Mais ils pourraient attirer les consommateurs vers l'écosystème Apple, pour lequel ils sont optimisés.

Les services vont peser de plus en plus

Apple a entamé depuis un peu plus de trois ans son pivot vers les activités de services. Luca Maestri, directeur financier du groupe, a rappelé les objectifs pour 2020 : doubler la taille des activités de services par rapport à 2016, et atteindre les 500.000 abonnés payants dans l'écosystème Apple.

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En plus de Apple Pay et de Apple Music, le géant californien va lancer d'autres services d'ici la fin de l'année. D'abord une carte de crédit, Apple Card, dès août. Puis à l'automne suivront un service de jeux vidéo et surtout une plateforme de vidéo en streaming, Apple TV+, amenée à concurrencer Netflix.

"Il faut garder à l'esprit qu'il y aura des périodes d'essai de différentes longueurs pour tous ces services. La monétisation prendra un peu de temps", a tempéré Luca Maestri, face aux analystes.

D'un autre côté, Apple rencontre des résistances face à ses pratiques sur l'App Store. Le magasin d'application, unique point d'entrée pour atteindre les 900 millions d'iPhone, concentre près d'un tiers des ventes de la division service du groupe. Mais de plus en plus de développeurs pointent du doigt la marge prise sur les transactions de l'App Store, surnommée "taxe Apple". Spotify, principal concurrent de Apple Music, a même ouvert un dossier de plainte auprès des autorités européennes de la concurrence. L'entreprise suédoise aurait des difficultés à faire sa publicité sur l'App Store, ce que dément Apple.

L'entreprise se trouve ainsi à un tournant, avec d'un côté une diminution de son activité de constructeur, et de l'autre des activités de services en plein lancement. Pour son quatrième trimestre (juillet-août-septembre), Apple prévoit donc un chiffre d'affaires compris entre 61 et 64 milliards de dollars. Les investisseurs restent préoccupés par les possibles effets néfastes de la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, où Apple fait assembler la plupart de ses appareils.