Pourquoi Qualcomm a mis fin à son deal avec NXP

Par Pierre Manière  |   |  576  mots
Pour Qualcomm, cet échec est d’autant plus décevant que le groupe a dû batailler ferme, jusqu’alors, pour décrocher de nombreux feux verts pour boucler ce rachat. Ainsi, après une longue enquête, la Commission européenne a finalement donné le sien mi-janvier. (Crédits : Mike Blake)
Le géant américain des puces pour smartphones a été contraint d’annuler son méga-deal avec son concurrent néerlandais NXP, faute d’avoir décroché le feu vert de l’autorité de la concurrence chinoise.

Cet énorme deal, qui était dans les tuyaux depuis près de trois ans, a finalement capoté. En novembre 2016, alors que Barack Obama bouclait son second mandat à la tête des États-Unis, Qualcomm avait annoncé le rachat de son rival néerlandais NXP. Pour le champion des semi-conducteurs et des puces pour smartphones, cet énorme rachat à 44 milliards de dollars doit notamment lui permettre de se diversifier sur deux segments prometteurs : l'automobile (avec le développement de la voiture autonome), et l'Internet des objets (dont le marché est attendu en très forte croissance avec l'arrivée de la 5G). Mais patatras. Trois ans plus tard, le mastodonte américain a été contraint d'abandonner ce rachat, qui aurait constitué une des plus grosses fusions du secteur.

Steve Mollenkopf, le patron de Qualcomm, a décidé d'enterrer l'opération ce jeudi, faute d'avoir réussi à décrocher le feu vert de l'autorité de la concurrence chinoise. Plus précisément, le chef de file du géant américain, en accord avec NXP, avait averti, en amont, qu'il tirerait un trait sur le deal si celle-ci n'autorisait pas, d'ici mercredi avant minuit, cette fusion. En l'absence de réponse, le premier fabricant de puces pour mobiles a mis fin à son rachat.

Bras de fer sino-américain

Qualcomm semble payer au prix fort la bataille commerciale féroce entre les États-Unis et la Chine, laquelle s'est envenimée avec l'arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche - même si les deux pays assurent officiellement qu'il n'en est rien. Selon l'AFP, Gao Feng, le porte-parole du ministère chinois du Commerce, a ainsi affirmé que ce dossier « n'avait rien à voir avec les frictions commerciales sino-américaines »... Pour sa part, Steven Mnuchin, le secrétaire américain au Trésor, s'est dit « très déçu » que le régulateur chinois n'ait pas donné son accord. Avant d'affirmer « ne pas savoir » pourquoi cette décision a été prise.

On peut toutefois se demander si le gouvernement chinois n'a pas voulu faire capoter l'opération. Alors que les États-Unis et la Chine se livrent une guerre technologique - en particulier dans le domaine de la 5G -, Pékin a peut-être voulu empêcher la naissance d'un nouveau géant américain des semi-conducteurs... Le gouvernement chinois vient, en outre, d'essuyer plusieurs revers cinglants au pays de l'Oncle Sam. L'équipementier chinois ZTE a, ces derniers mois, été contraint de cesser son activité suite à une interdiction américaine d'acheter des composants électroniques américains. Un autre équipementier télécoms, Huawei, a lui carrément décidé, au printemps dernier, de ne plus faire affaire aux États-Unis. Et ce, après s'être vu interdire, pendant des années, de nombreux marchés outre-Atlantique.

Conflit avec Apple

Pour Qualcomm, cet échec est d'autant plus décevant que le groupe a dû batailler ferme, jusqu'alors, pour décrocher de nombreux feux verts pour boucler ce rachat. Ainsi, après une longue enquête, la Commission européenne a finalement donné le sien mi-janvier. Bref, une semaine à oublier pour Qualcomm. D'autant que ce jeudi, le fabricant de composants électroniques a indiqué qu'il s'attendait à ce qu'Apple boude ses puces pour son prochain iPhone. Ce qui devrait bénéficier à son rival Intel. Il faut dire que Qualcomm et Apple sont en conflit depuis un an et demi, sur fond d'accusation de violations de brevets et d'abus de position dominante.

(avec AFP et Reuters)