Télécoms : ce que les Français attendent des opérateurs

Par Pierre Manière  |   |  692  mots
D'après une étude du cabinet AT Kearney, beaucoup de Français seraient prêts à acheter leurs applis sur la plateforme de leur opérateur, plutôt que sur Google Play ou l'Apple Store.
De la télévision payante, des bouquets d’applications... Beaucoup de Français attendent davantage de leurs opérateurs qu’une simple offre de connectivité.

Les Français attendent beaucoup plus des opérateurs télécoms qu'une simple offre de connectivité. De manière générale, ils perçoivent les Orange, Numericable-SFR ou Free comme des acteurs fondamentaux de leur vie digitale au sens large, susceptibles de leur proposer des services de télévision payante, de m-commerce, ou autres applications dédiées à la maison intelligente. C'est ce qu'il ressort d'une étude d'AT Kearney, publiée la semaine dernière. Dans son enquête, le cabinet a sondé quelques 15.000 clients d'opérateurs télécoms aux Etats-Unis et sur le Vieux Continent. Il ressort que les desideratas des consommateurs français sont bien différents de leurs homologues aux Etats-Unis et même sur le Vieux Continent.

En premier lieu, AT Kearney s'est intéressé aux « critères d'achats » pour choisir un opérateur. En France, ils sont, d'après le cabinet, « très clairement de deux ordres principaux : le prix le plus bas possible et le meilleur réseau ». Avec 32% des réponses chacun, ces deux critères « se distinguent nettement, loin devant le service client (14%), la sécurité (10%) ou bien encore l'offre mobile compris (5%) ». On note, sur ce point, une grosse différence avec les consommateurs américains. Pour ces derniers, la priorité est de bénéficier du « meilleur réseau » (pour 44% des sondés), loin devant la préoccupation d'un « prix faible » (22% des répondants).

Plus de services émanant des opérateurs

Côté services, les différences sont également très marquées. Ainsi, selon le cabinet, « les consommateurs français ne sont que 16% à acheter des services de télévision payante ou à la demande. Mais s'ils en sont consommateurs ou devaient l'envisager, 27% d'entre eux passeraient par un opérateur télécom local ». Au contraire des consommateurs américains, qui misent davantage sur des « fournisseurs globaux » comme Netflix, Amazon ou iTunes.

La tendance est similaire du côté du marché des applications payantes (jeux, musique, services de sécurité ou dédiés à la maison intelligente). Certes, ce marché « est aujourd'hui encore faible dans l'Hexagone », constate AT Kearney, qui précise que seuls 46% des Français envisagent d'en acheter. Pour faire leurs emplettes, ceux-ci misent largement sur les plateformes existantes des géants américains Apple et Google (56%). Mais une grosse part d'entre eux souhaiteraient acheter leurs applis en passant par des opérateurs locaux (26%).

Concurrencer les géants du Net

Comme le résume Hervé Collignon, associé d'AT Kearney en charge des télécoms, « les consommateurs français se distinguent donc fortement de leurs homologues américains ». Pour lui, aux Etats-Unis, on n'attend d'un opérateur qu'une bonne connectivité, et on mise largement sur les « OTT » (« Over The Top », comme les offres de VOD de Netflix ou Hulu) pour tous les contenus et services digitaux annexes. Au contraire des Français, pour qui il apparaît normal que ces services émanent de leurs propres opérateurs télécoms.

Résultat, AT Kearney souligne que deux stratégies pourraient s'avérer gagnantes pour les « telcos » français. La première consiste à devenir un « Data Utility », c'est-à-dire un « fournisseur de connexions » de choix et à bon prix auprès du grand public. C'est peu ou prou la stratégie de Free, le « trublion » low cost de Xavier Niel, qui mise à fond sur le déploiement du haut débit mobile (la 4G), pour ferrer ses clients. La seconde, elle, consiste à se muer en « Digital Navigator » (fournisseur de services). Ici, on retrouve des opérateurs comme Numericable-SFR, qui mise sur la « convergence » entre les médias et les télécoms, via des offres vidéo premium, pour accroître ses profits. Il y a aussi Orange, qui s'ouvre à d'autres secteurs (comme la banque avec Orange Cash) pour étoffer son offre. Ou encore Bouygues Telecom, qui veut être un acteur de premier plan dans l'Internet des objets. L'étude d'AT Kearney conforte, dans tous les cas, l'idée que les opérateurs français ont une carte à jouer en déployant de nouveaux services. Quitte, pourquoi pas, à marcher sur les plates-bandes des géants américains du Net.