La "4G"... La révolution de l'ultra-mobilité !

Le très haut débit mobile, dix fois plus rapide que la 3G actuelle, devient une réalité en France, le réseau de Bouygues Telecom couvrant même 63 % de la population. Il coiffe au poteau Orange et SFR, qui sont autour de 40 %, tandis que Free se fait attendre. Vidéo, TV, ultramobilité..., avec la 4G les opérateurs espèrent donner aux Français le goût de la vitesse et les convaincre de consommer davantage de gigaoctets, en souscrivant des forfaits un peu plus chers.
57 % des Français se déclarent « peu ou pas du tout susceptibles » de prendre un abonnement 4G, selon un sondage publié en septembre par Deloitte, mais réalisé en juin 2013, quand les réseaux couvraient seulement quelques villes. / DR

« La 4G, c'est magique » , s'enflamme le directeur marketing de SFR, Guillaume Boutin. « La 4G, ça m'a changé la vie » , confie même Martin Bouygues, se réjouissant de pouvoir enfin surfer et consulter ses mails à la campagne, où il n'a pas de connexion ADSL. Moins emphatique, Stéphane Richard, le PDG d'Orange, explique que c'est « tout ce que l'on fait déjà en 3G, mais en mieux » . Alors, la 4G, dont les opérateurs nous rebattent les oreilles, est-ce une révolution ou une simple évolution, une énième amélioration, comme la 3G+ ?

La 4G, appelée aussi LTE (Long Term Evolution) succède à l'UMTS et au GSM : c'est le très haut débit mobile, la promesse de 100 mégabits par seconde, soit en résumé une connexion dix fois plus rapide que la 3G et cinq fois plus que la 3G+ actuelle. Concrètement, si cela ne change rien, bien sûr, pour les appels et les SMS, la vitesse libère tous les usages qui nécessitent beaucoup de débit et dont on se prive, attendant de rentrer chez soi ou au bureau pour bénéficier d'un bon accès wi-fi ou filaire : téléchargement d'applications, envoi de fichiers volumineux, de photos ou de vidéos, télévision en direct, etc. « La 4G est à la 3G ce qu'une autoroute à vingt voies est à une route nationale » , résume un dirigeant de l'opérateur américain Verizon.

La 4G, c'est l'Internet mobile sur son smartphone ou sa tablette sans limitation, le partage et la communication sans contrainte. La « révolution » de la 4G, si révolution il y a, est celle des mégabits par seconde et des gigaoctets à foison : elle ne porte pas sur de nouveaux services ou applications en tant que tels, mais sur un plus grand confort d'utilisation, une instantanéité et une fluidité qui vont changer la façon dont on se sert de son téléphone et de tous ses appareils connectés, et sans doute favoriser, à terme, l'émergence d'innovations encore insoupçonnées. Une promesse d'immédiateté séduisante à l'heure où le temps réel s'impose dans nos modes de communication professionnels et personnels, où les réseaux sociaux ont créé le besoin impérieux d'échanger sans retenue.

« Nous sommes devenus de plus en plus impatients, on veut tout, tout de suite, l'information, le partage, sans latence, sans attente : la 4G donne aux opérateurs la capacité de répondre à cette demande des utilisateurs » , souligne Thomas Husson, du cabinet Forrester Research. « Impossible de revenir en arrière quand on a goûté à la 4G », selon les opérateurs, qui font le parallèle entre le passage du noir et blanc à la couleur ou du modem poussif à la box constamment connectée.

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La fin du petit sablier qui tourne sans fin

Passer à la 4G, c'est en finir avec le sablier ou le petit cercle qui tourne, interminablement, lorsque le débit est trop bas pour se connecter à Internet et ouvrir une page Web, un mail, ou démarrer une vidéo. Du moins à condition d'être équipé d'un smartphone de dernière génération compatible et de se trouver dans une zone où l'on capte la 4G. Cette nouvelle technologie s'adresse naturellement en priorité aux ultra-connectés, utilisateurs quotidiens de l'Internet mobile qui se trouvent entravés aujourd'hui par les limites de la 3G, ou son absence, dans les quartiers très fréquentés des grandes villes, du fait de l'engorgement des réseaux, ou dans les zones les plus reculées, difficiles ou insuffisamment rentables à couvrir.

Officiellement, Orange et SFR couvrent en 3G plus de 99 % de la population métropolitaine de l'ordre de 90 % du territoire Bouygues Telecom 95 % et Free Mobile plus de 50 %, un accord d'itinérance avec Orange lui permettant de combler ses carences. La couverture des nouveaux réseaux 4G est encore plus limitée que celle de la 3G, et pour cause : les opérateurs ont acheté leurs licences à l'État fin 2011 peu ou prou un milliard d'euros chacun pour Orange, SFR et Bouygues, quatre fois moins pour Free qui a en conséquence récupéré moins de fréquences et ils ont commencé à installer les nouvelles antennes l'an dernier, en pleine guerre commerciale due à l'arrivée du quatrième entrant, Free Mobile. Leurs licences les obligent à couvrir 25 % de la population en 4G au plus tard à l'automne 2015 et 40 % des zones peu denses en 2017. « La 4G pour tous » , comme le promet Bouygues, c'est en fait plutôt pour 2023. Et pour l'instant, pas de 4G chez Free ni chez les marques low cost.

Cependant, la 4G est en train de devenir réalité dans l'Hexagone, car les trois opérateurs « historiques » sont allés beaucoup plus vite que leurs obligations, motivés par cette occasion de convaincre les Français de se réengager en souscrivant des forfaits un peu plus chers, après dix-huit mois marqués par la généralisation des offres illimitées « low cost » et une baisse prononcée des prix.

« La 4G est un moyen pour les opérateurs de se différencier par rapport à Free Mobile » , relève l'expert de Forrester.

Ils bénéficient d'une fenêtre de tir pendant que le nouvel entrant est concentré sur la construction de son réseau 3G : Free doit atteindre 75 % de la population dans seize mois et l'accord d'itinérance avec Orange ne concerne pas la 4G. Le trublion Free Mobile (6,8 millions de clients conquis en un an et demi) fait nettement plus profil bas dans ce domaine : s'il déploie des antennes compatibles 4G, il n'en a qu'une quinzaine en service, contre plusieurs milliers chez ses concurrents, et il est le seul à ne pas avoir ouvert commercialement le très haut débit mobile ni communiqué sur une date de lancement, suscitant quelques impatiences chez ses abonnés les plus à la pointe de la technologie. Les clients des marques low cost des opérateurs, Sosh, Red ou B&You , et leurs abonnés aux forfaits d'entrée de gamme sont aussi privés de 4G pour l'instant. Ceux des MVNO, les opérateurs virtuels comme Virgin Mobile, n'y auront accès au mieux qu'en 2014. Pour l'instant, donc, la 4G est réservée aux abonnés de SFR, Orange ou Bouygues payant un forfait de plus de 30 euros, s'engageant généralement sur deux ans. Les premières offres grand public sont apparues à l'automne dernier chez SFR, en avril chez Orange, et la 4G reste confidentielle : environ 300 000 clients chez le premier, 250 000 chez le second, quelques milliers à ce stade chez Bouygues. Mais le battage médiatique ne fait que commencer.

L'argument commercial de la couverture du réseau

Aujourd'hui, Bouygues Telecom mène nettement la course en tête : le numéro trois français du mobile, qui a longtemps souffert de son image de réseau plus petit et incomplet, vient d'allumer le 1er octobre des milliers d'antennes 4G et son réseau couvre 63 % de la population, environ 40 millions de personnes, même si cela correspond seulement à 20 % du territoire. C'est deux fois plus que ses concurrents Orange et SFR, qui couvrent entre 25 % et 30 % de la population actuellement et promettent « au moins 40 % » à la fin de l'année.

Bouygues peut donc se targuer d'avoir un réseau 4G « national », grâce à un petit coup de pouce du gouvernement et du gendarme des télécoms : il a obtenu l'autorisation, moyennant 60 millions d'euros par an, de réutiliser pour la 4G des fréquences GSM (1 800 MHz), ce que ses concurrents Orange et SFR n'ont pas demandé car ils les utilisent encore pour véhiculer les appels en 2G de leurs clients sachant que Bouygues a environ deux fois moins d'abonnés (11 millions) que les deux premiers acteurs du marché.

La bataille est cruciale, la couverture constituant un argument commercial de premier ordre. Bien couvrir les zones de vie, à défaut du territoire, est indispensable pour que la réalité du débit soit à la hauteur de la promesse, que le logo 4G s'affiche bien en haut de l'écran du smartphone presque tout le temps, et pas furtivement lorsque l'on passe près d'une antenne ! Un moyen d'attirer, et si possible de verrouiller, de fidéliser les clients, ce qui pourrait rebattre les cartes du marché. Aux États-Unis, l'opérateur Verizon Wireless, le numéro deux américain, est leader sur la 4G parce qu'il a investi à marche forcée, parvenant à couvrir plus de 95 % de la population deux ans et demi après avoir lancé son service. Résultat : près de 60 % de son trafic de données passe par son réseau 4G, plus de 31 millions de ses clients, environ un tiers de son parc, sont équipés de smartphones 4G et 36 % de ses abonnés se sont convertis au forfait à partager, une enveloppe d'Internet mobile de 1 à 10 gigaoctets à consommer au sein d'un foyer sur plusieurs appareils.

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Un décollage beaucoup plus rapide que la 3G

La France, et plus généralement l'Europe, est en retard principalement pour des raisons d'attribution de fréquences , d'environ deux ans en matière de déploiement par rapport aux États-Unis et à certains pays d'Asie comme la Corée du Sud et le Japon. Ce qui présente un avantage : les appareils compatibles sont déjà là, ce qui n'était pas le cas au démarrage de la 3G. Il existe plus d'une quinzaine de smartphones, de Samsung à Apple en passant par Nokia et Motorola, sans compter les tablettes et les clés 4G, dont certaines permettent de connecter plusieurs appareils en wi-fi.

« Cela va exploser, car de toute façon tous les terminaux vendus sont désormais 4G », observe un dirigeant d'opérateur.

Les applications et les contenus sont là, les consommateurs savent utiliser l'Internet mobile. Le décollage de la 4G devrait donc être beaucoup plus rapide que la 3G, lancée en 2004 en France, mais dont l'essor commercial ne remonte qu'à 2008-2009. Orange et SFR visent 1 million de clients à la fin de l'année et en espèrent le double l'an prochain. À l'étranger, des millions de personnes utilisent déjà la 4G : 126 millions d'abonnés à fin juin 2013 sur 6 milliards de connexions dans le monde, selon le cabinet Informa Telecoms. En Corée du Sud, plus de 60 % des abonnés sont en 4G, aux États-Unis on avoisine 20 %, comme au Japon.

Un client 4G consomme trois plus de datas

Et ces clients 4G consomment plus, plus de vidéos notamment, plus de tout : en moyenne 150 % de données supplémentaires. En France, un client 4G consommerait 2 Go par mois, contre 700 à 800 Mo pour les clients 3G. Verizon a ainsi réussi à augmenter de près de 10 dollars en un an le revenu moyen généré par compte (par foyer), à plus de 152 dollars.

C'est évidemment tout le pari des opérateurs français, car il reste difficile de faire payer plus uniquement pour une vitesse de connexion supérieure. Ils ne retomberont pas dans l'écueil de l'illimité proposé au démarrage de la 3G. Mais Bouygues propose un forfait de 16 Go pour les très gros consommateurs de bande passante. Au Royaume-Uni, l'opérateur EE (codétenu par Orange et Deutsche Telekom) vend même un forfait de 20 Go ! Certains opérateurs misent beaucoup sur les services inclus, comme la possibilité de regarder les matchs de la Ligue 1 chez Orange ou les films à la demande de Canal+ chez SFR. Ils espèrent que les clients, grisés par la vitesse et la qualité de surf, regarderont moins à la dépense. Et se mettront à utiliser leur smartphone, leur tablette, n'importe où, sans compter.

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