Chassé des Etats-Unis, Huawei caresse la France dans le sens du poil

Par Pierre Manière  |   |  555  mots
Ken Hu, le président de Huawei. (Crédits : Reuters)
Au salon Vivatech ce jeudi, Ken Hu, le président de Huawei, a loué le potentiel économique de la France en matière de nouvelles technologies. Il s’est bien gardé, en revanche, de revenir sur la décision des Etats-Unis, la veille, d’interdire ses équipements de réseaux télécoms.

Opération séduction. Ce jeudi 16 mai, Ken Hu, le président de Huawei, était l'un des invités de marque du salon Vivatech, consacré aux nouvelles technologies. Le dirigeant du géant chinois des équipements télécoms, leader incontesté dans la 5G, la prochaine génération de communication mobile, est intervenu dans un contexte particulièrement difficile. La veille, Donald Trump a signé un décret interdisant aux opérateurs américains de recourir aux produits du groupe de Shenzhen pour leurs réseaux. Un sacré revers pour Huawei. Même si cette décision n'est guère surprenante : l'équipementier fait l'objet, depuis des mois et dans un contexte de guerre commerciale sino-américaine, d'attaques du pays de l'Oncle Sam. Celui-ci le soupçonne d'espionnage pour le compte de Pékin, et fait son possible pour pousser l'Europe à chasser aussi le dragon chinois.

Dans ce contexte, l'intervention de Ken Hu à Vivatech était très attendue. Pourtant, il n'a pas pipé mot des déboires du groupe aux Etats-Unis. Le dirigeant est venu avec un objectif clair : caresser la France dans le sens du poil, alors que Paris, à l'instar d'autres pays européens, cherche à limiter Huawei pour ses propres réseaux mobiles, pour des motifs de sécurité nationale. Ken Hu a ainsi jugé que la France était « en bonne position pour être au cœur de l'innovation dans le monde ». Il a aussi rappelé que Huawei était un acteur important dans l'Hexagone, où il est « présent depuis 17 ans », et compte désormais « près de 1.000 collaborateurs ».

Emmanuel Macron critique la décision américaine

De passage à Vivatech, Emmanuel Macron l'a peut-être un peu rassuré. Evoquant les attaques américaines à l'égard de Huawei, le président français a estimé qu'il n'était « pas approprié (de) lancer maintenant une guerre technologique ou commerciale vis-à-vis de quelque pays que ce soit ». Surtout, il a indiqué que la « perspective » de la France « n'est pas de bloquer Huawei ou tout autre entreprise, mais de préserver notre sécurité nationale et la souveraineté européenne ». Avant de se livrer à plaidoyer pour en faveur de « la coopération » et du « multilatéralisme ».

Concernant la 5G, qui doit voir le jour à partir de l'année prochaine sur le Vieux Continent, Emmanuel Macron a souligné que « nous faisons très attention à l'accès aux technologies des cœurs de réseaux pour préserver notre sécurité nationale ». Sachant qu'aujourd'hui, en France, les opérateurs n'utilisent pas d'équipements chinois pour les cœurs de réseaux. Lesquels sont particulièrement sensibles, puisque c'est là que transitent toutes les données et communications.

« J'ai tout fait pour qu'on soit réaliste sur la 5G et que l'Europe défende ses intérêts pour ne pas dépendre des composants chinois », a poursuivi Emmanuel Macron. Toutefois, « il faut des composants », a ajouté le locataire de l'Elysée, soulignant que « les Européens » doivent « forcément y avoir accès ». Pour l'heure, la position de la France à l'égard de Huawei n'est pas tout à fait claire. Si Emmanuel Macron affirme qu'il ne veut pas « bloquer » l'équipementier, le gouvernement travaille actuellement sur une loi visant à limiter ses infrastructures dans les réseaux mobiles.