Immobilier : pourquoi les propriétaires n’ont pas intérêt à louer trop cher

Par Mathias Thépot  |   |  567  mots
A Paris, louer au loyer de marché a permis entre 1996 et 2007 de dégager une rentabilité moyenne de 3,73%
Louer à un loyer supérieur au loyer de marché est moins rentable à terme. Mieux vaut donc être raisonnable, si l’on est propriétaire bailleur.

Fixer un loyer supérieur au loyer de marché lorsqu'on est propriétaire-bailleur est paradoxalement moins rentable à terme, selon deux chercheurs de l'EDHEC Business School. Sur la période 1996-2007, ils constatent en effet que quel que soit le "type de bien considéré, les bailleurs ayant fixé un loyer 10% ou 20% au-dessus du loyer de marché observé localement ne parviennent pas à obtenir un rendement moyen supérieur à ceux obtenus avec les loyers de marché".  Au-dessus du loyer de marché, les rendements sont même plus faibles et nettement plus volatils.

Un risque de vacance accru

De fait, les propriétaires-bailleurs trop gourmands accroissent le risque de vacance de leur logement. D'abord, ils mettront plus de temps à trouver un locataire. Ensuite, le risque que le locataire se rende compte qu'il paie un loyer excessif et qu'il change de logement est fort. Tout particulièrement pour des petites surfaces où le coût du déménagement est faible.

Et enfin, réduire le revenu disponible du locataire accroît la probabilité d'être en situation d'impayés. "Pour le bailleur, il convient donc dans un premier temps de comparer les effets du premier ordre positifs (le surloyer) aux effets du second ordre négatifs (risque accru de vacance du logement)", conseillent les chercheurs de l'EDHEC.

Au loyer de marché : un rendement moyen de 4,47% pour un studio à Paris

Pour avancer ces hypothèses, ils s'appuient en fait sur les données de l'Observatoire des loyers de l'agglomération parisienne (l'Olap), et retiennent comme périmètre la Capitale et sa périphérie. Un marché tendu où le risque de vacance est très faible puisqu'un propriétaire peut le plus souvent retrouver un locataire en un rien de temps.
Et pourtant, le rendement annuel moyen d'un studio loué au loyer du marché fut entre 1996 et 2007 de 4,47% à Paris et de 4,92% en périphérie. C'est davantage que pour un studio loué 10% au-dessus du marché (respectivement 4.39% et 4.88%), ou même 20% au dessus (4,23% et 4,78%).

L'Etat doit se substituer à la main invisible du marché

Pour réduire les situations abusives et ubuesques qui ne profitent in fine à personne, une intervention publique se substituant à la main invisible du marché fait sens. L'État palliant au défaut d'information.

"Une première action consisterait à mettre les moyens pour développer un système d'observation suffisamment précis pour améliorer l'information et permettre à chacun de prendre des décisions mieux assises et de pouvoir juger du caractère abusif ou non de certains loyers", propose l'étude.

Le gouvernement est déjà dans ce cadre en train de mettre en place des Observatoires des loyers dans 29 agglomérations hexagonales.

Connaitre les informations sur les transactions

Plus difficile, "il faudrait aussi fournir des éléments d'information sur les volumes locaux de transactions locatives", prônent les chercheurs de l'EDHEC. "Cela permettrait aux bailleurs et aux locataires d'estimer les délais nécessaires pour effectuer leur recherche et d'éviter des situations de choix dans l'urgence", ajoutent-ils. Pas une mince affaire, car l'un des principaux maux de l'immobilier français est son manque de données sur toutes les sortes de transactions.

Pourtant, "si l'information est suffisamment riche et régulièrement mise à jour, elle aura un impact sur la dispersion des loyers et certaines situations de loyers déconnectés du marché, néfastes à chacun des acteurs du marché", pensent les auteurs de l'étude.