EXCLUSIF Bercy met la pression sur la fiscalité des multinationales

Le fisc s'en prend au dispositif des prix de transfert, qui permettent aux multinationales d'échapper à l'impôt, selon un projet que La Tribune s'est procuré.

L'administration fiscale a de la suite dans les idées. En novembre dernier, Bercy avait renoncé provisoirement à inclure dans le collectif budgétaire l'obligation pour les entreprises de documenter - pour la justifier - leur politique de prix de transfert. Par prix de transfert, on entend les prix pratiqués entre filiales d'un même groupe international. Ces opérations intragroupes représenteraient plus de 60% du commerce mondial. L'intérêt du fisc s'explique d'autant mieux qu'elles peuvent constituer un outil d'optimisation fiscale, en permettant à une multinationale d'allouer les bénéfices aux filiales des pays où ils seront le moins taxés, par le biais de sur- ou de sous-facturations.

Des sommes importantes peuvent ainsi échapper à l'impôt et ces opérations sont souvent retoquées par l'administration. Le Conseil des impôts chiffrait pour 2003 à 531 le nombre de redressements pour un montant total brut proche d'un milliard d'euros. Mais le montant réellement dû par les entreprises - et donc encaissé par l'Etat - est inférieur. C'est le caractère disproportionné des obligations et des sanctions envisagées à l'époque contre les contrevenants qui avait fait capoter le projet.

Mais depuis le mois de février, les discussions ont repris entre le fisc et les organisations professionnelles. Un texte est même prêt. Selon ce projet, que La Tribune s'est procuré, les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel est égal ou supérieur à 400 millions devront tenir à disposition du fisc, et ce dès le premier jour du contrôle, une documentation sur la politique de prix de transfert pratiquée.

Si, après un délai de trente jours, l'entreprise ne fournit pas cette documentation, ou si celle-ci est incomplète, une amende minimale de 10.000 euros par exercice vérifié pourra être infligée. C'était 50.000 euros dans le précédent projet. L'entrée en vigueur de cette obligation est prévue pour le 1er janvier 2010. Ce projet de texte, soumis aux entreprises, ne provoque pas de leur part d'opposition majeure.

"Ce texte est équilibré et on ne met pas à la charge des entreprises des obligations qu'elles ne pourraient assumer. Il correspond aussi aux principes de l'OCDE, puisque cette documentation permettra d'assurer que la politique de prix de transfert pratiquée est conforme au principe de pleine concurrence. Quant aux sanctions, elles sont plus acceptables", dit-on de source patronale.

Derrière ce sujet très précis des prix de transfert se dessine l'intention du gouvernement d'aller plus loin dans la mise en musique des décisions issues du G20 quant à la lutte contre l'évasion fiscale. Le cabinet d'avocats Landwell et Associés évoquait récemment un nombre de mesures destinées à lutter contre l'évasion fiscale que l'administration aurait l'intention de présenter, parmi lesquelles l'instauration d'une obligation de déclaration préalable au fisc des schémas d'optimisation fiscale.

Dans l'entourage d'Eric Woerth, on dément qu'il existe une commande politique sur ce dernier sujet. Selon nos informations, il semble que, dans les services du ministère du Budget, certains fassent le forcing pour imposer cette réforme après une tentative avortée en 2005. Le risque existe que des parlementaires se saisissent de ces sujets...

Commentaires 10
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
Enfin! J'avais réalisé en 1990 ou alentour une étude de marché sur l'Epargne salariale avec des interviews auprès de Dr Financiers de multinationales qui m'avait révélé cette pratique tout à fait déloyale d'évaporation des bénéfices via des systêmes ...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
N'oublions pas que les "multinationales" françaises ne peuvent vivre et se développer que grace à l'étranger; Eric WOERTH veut-il tuer la poule aux revenus d'or? Il faudra bien qu'un jour la France devienne une démocratie aux finances assainies respe...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
Enfin! on s'occupe de la délocalisation des bénéfices.

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
J'étais encore directeur financier d'un groupe industriel à "taille humaine" il n'y a guère, le problème des prix de transfert ne m'est donc pas étranger, mais n'est pas simple à régler : pourquoi ? Certes les entreprises ont une -fâcheuse- tendance...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
Attention à l?usine à gaz ! Le problème est particulièrement délicat. Fixer une valeur entre un acheteur et un vendeur résulte de la réalité d?une discussion et d?une transaction finale. Quand l?acheteur et le vendeur sont la même personne (ce qui, d...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
Je me demande pourquoi personne ne se pose la question de la nécessité pour notre pays de faire des économies de fonctionnement qui permettraient d'avoir un taux d'impôt raisonnable et accepté par la majorité de la population et des entreprises. Quan...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
@déçu de la France: houla! dites nous (presque) tout! Que nous comprenions enfin les problèmes des chefs d'entreprise; cela nous évitera de les mettre sous clef, ce qui n'est pas la solution

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
Quand on lit les sommes faramineuses que détournent maintes et maintes entreprises à la faveur de tous ces politiques et nos Présidents de la République de tous horizons depuis des lustres on reste pantois ... la dette de la France elle est là ! comm...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
Les Etats Unis ont mis en place une règlementation sur les prix de transfert il y a 20 ans, avec des informations à tenir à la disposition de l'administration fiscale, et des méthodes de calcul pour l'établissement des prix de transfert qui sont très...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
Signaler
Quand l'état prélèvera moins, pour garantir leurs revenus (qui sont surement optimisé dans des paradis fiscaux) ou qu'il ne prépareront la futur concurrence des entreprises avec l'auto entrepreneuriat.Tout en garantissant les coûts d'entreprises venu...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.