La descente aux enfers des anciens salariés de PIP

Partagés entre des sentiments de trahison et de gâchis, d'anciens salariés de PIP évoquent le coeur lourd leur passé dans cette société française accusée d'avoir commercialisé des prothèses mammaires défectueuses dans le monde entier.
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Fondée en 1991, Poly Implants Prothèses fonctionnait comme une société "patriarcale" sous le direction de son fondateur Jean-Claude Mas, ont déclaré à Reuters quatre personnes qui ont passé entre deux et dix ans au sein du groupe.

"Cette affaire est extrêmement pénible. On s'est fait embarquer là-dedans comme les chirurgiens, comme les patientes et aujourd'hui on se sent peinés par toute cette affaire", dit l'un deux qui, comme ses collègues, a requis un strict anonymat.

"A côté de ce que vivent les patientes, ce n'est pas très grave, mais moralement, psychologiquement, professionnellement ça pose quand même un certain nombre de soucis."

Trois de ces salariés évoquent un sentiment de trahison et de frustration face à une société qui semblait avoir toutes les chances de réussir si elle n'était pas sortie des clous.

L'avocat de PIP, Yves Haddad, a reconnu l'utilisation d'un gel non conforme et la société a vu ses prothèses mammaires en silicone interdites de commercialisation en 2010 à la suite d'une inspection des autorités de contrôle françaises.

Une information judiciaire a été ouverte le 8 décembre par le parquet de Marseille pour blessures et homicide involontaire.

Les anciens cadres de la société varoise, dont Jean-Claude Mas, devraient aussi répondre à l'automne 2012 devant le tribunal correctionnel de Marseille de faits de "tromperie aggravée" dans un deuxième volet.

Les ex-salariés assurent que les employés n'avaient pour l'immense majorité aucune idée de cette fraude.

DE LA POULE AUX OEUFS D'OR AU "POULPE CUIT"

Ils évoquent un accès limité au laboratoire de production, le fait qu'ils auraient de toute façon, pour la plupart, été bien incapables de distinguer la nature du produit et, surtout, que les documents auxquels ils avaient accès faisaient état d'un gel médical certifié conforme auprès des organismes de contrôle.

"Les chirurgiens ont implanté des gens qui leurs sont proches, alors vous pensez bien que s'ils avaient eu un doute sur le produit, ils n'auraient pas fait ça", dit l'un d'eux.

Avant de connaître une véritable "descente aux enfers" à partir de sa mise sous protection judiciaire en 2009 et sa liquidation en 2010, la société varoise était à la pointe de l'innovation, se développait agressivement à l'international et rencontrait un vif succès auprès des chirurgiens, raconte pour sa part un ancien cadre de PIP.

"On était la société qui lançait le plus grand nombre de nouveaux produits", note-t-il. "Ça plaisait aux chirurgiens, surtout la prothèse asymétrique, une prothèse miraculeuse qui permet d'épouser le thorax de façon très fidèle et de donner un côté naturel et esthétique à la poitrine."

L'essentiel du chiffre d'affaires de PIP était réalisé à l'étranger, d'après une source au fait de la stratégie commerciale du groupe, qui évoque un "âge d'or" en 2006.

"On était quand même leader français, leader européen, troisième mondial", souligne un salarié qui brosse le portrait d'une société aux effectifs croissants de 2000 à 2007.

Mais à partir de 2007-2008, des ruptures de plus en plus fréquentes des prothèses ont lieu, soulignent deux sources au fait du dossier. A cette époque, PIP se penche sur le problème et tente d'améliorer la résistance des enveloppes des prothèses ainsi que la consistance du gel utilisé pour les remplir.

En attendant, la société perd de l'argent, tout comme certains de ses clients à l'étranger, qui peinent à rembourser leurs créances. La chute de PIP se précise après son placement sous sauvegarde judiciaire en mars 2009.

"Là, ça a été la descente aux enfers", explique l'un des salariés. "Comme disait M. Mas, 'le poulpe est cuit'. C'était son expression (...), que c'était fini, quoi."

GESTION PATRIARCALE

Les anciens salariés de PIP joints par Reuters décrivent Jean-Claude Mas comme un patron généralement apprécié pour les efforts qu'il déployait pour empêcher sa société de couler, mais qui décidait de l'avenir de celle-ci comme il l'entendait.

"Il savait tout et c'était à lui de décider", dit l'un d'eux, qui a fini par démissionner, las de cette situation. "Je n'ai pas trouvé que c'était sérieux comme entreprise. On n'arrivait jamais à faire les choses comme il fallait."

"Il gérait sa boîte de façon très patriarcale. C'était sa boîte", confirme un autre. "C'était quelqu'un qui n'avait pas peur de l'échec, qui rebondissait toujours. C'est ça qui étonnait tout le monde, son opiniâtreté."

Certains échanges avec les salariés donnent l'impression d'un Jean-Claude Mas passionné par la physique, qui se risquait à jouer aux apprentis sorciers.

Un homme doté d'une "intelligence très vive", aux "idées intéressantes, mais après l'idée il faut faire des études cliniques, et c'est là où il n'était pas bon."

Un salarié regrette que PIP soit passé par toutes les phases d'homologation de ses produits pour ensuite "sortir des plots".

"Beaucoup de personnes pensent à la rigueur que si Mas avait validé son gel, avait fait vraiment toutes les études, peut-être qu'il aurait été certifié et il n'y aurait pas eu de scandale. Quand on y réfléchit, c'est dommage", ajoute un autre.

"C'est fou parce qu'il y a plus de cent salariés qui sont tombés le nez dans le ruisseau, des distributeurs qui ont été floués, des centaines de milliers de personnes en plein désarroi", conclut-il. "C'est fou, c'est fou. C'est horrible."

Commentaires 6
à écrit le 02/01/2012 à 8:39
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Que fait l ?at il devrait interdire ?e monsieur et sa famille de fabriquer m? desbroques

le 02/01/2012 à 16:45
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Songez que lorsque vous écrivez, c'est pour être lu. Essayez de faire l'effort d'écrire correctement, afin que votre propos soit compréhensible ! Il me semble aussi que c'est dans la spécialisation qu'on finit par perdre son sens commun, ce que vou...

à écrit le 31/12/2011 à 16:48
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Ils ne savent plus à quels seins se vouer!!!.

le 02/01/2012 à 14:41
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très drôle ! j'espère que vous aurez autant d'humour facile si un jour il vous arrive une tuile ( ce que je ne vous souhaite pas )

à écrit le 31/12/2011 à 16:44
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les dés étaient pipés! et voici que ce monsieur ouvre une autre enseigne sous le couvert de ses enfants! Lui il sait rebondir le bougre! Quand aux pauvres femmes lésées qu'elles se débrouillent! Responsables mais pas coupables c'est ça la france (on ...

à écrit le 31/12/2011 à 10:22
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PIP crève la bouche ouverte

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