Le "oui mais" de la CFDT à la réforme des retraites

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  780  mots
Laurent Berger, secrétaire général dela CFDT
Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, a apporté un appui mesuré à la future réforme des retraites. Il salue la prise en compte de la pénibilité et les facilitations décidées pour acquérir des trimestres de cotisation. En revanche, il regrette que davantage de petites pensions ne soient pas épargnées par certains points de la réforme. Il revendique aussi le droit de participer au débat sur le financement de la protection sociale qui ne doit pas concerner seulement le Medef. Une fois encore, la réforme des retraites fait ressortir une ligne de fracture entre les syndicats.

 

A l'occasion de la conférence de presse de « rentrée » de son syndicat, Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, l'a parfaitement assumé : il apporte son soutien à la réforme des retraites présentée la semaine dernière par le gouvernement. Pour lui, donc, pas question de descendre dans la rue le 10 septembre pour rejoindre les défilés organisés sous l'égide de la CGT, FO et Solidaires qui contestent, eux, la prochaine réforme.

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Pour autant, le soutien de la CFDT n'est pas total. Si Laurent Berger se félicite d'avoir été entendu, lors de la phase de concertation, sur la nécessité de ne pas désindexer les pensions ou de ne pas augmenter la CSG, il regrette cependant plusieurs autres dispositions du futur projet.

Pour la CFDT, toutes les petites retraites doivent continuer d'être revalorisées le 1er avril

Ainsi, il aurait souhaité que le maintien de la revalorisation des pensions au 1er avril concerne l'ensemble des retraités sous le seuil de pauvreté, soit 1,5 million de personnes percevant moins de 970 euros par mois, et pas seulement ceux qui touchent l'Aspa (le minimum vieillesse) d'un montant de 787 euros mensuels, soit environ 600.000 personnes. De fait, la ministre des Affaires sociales Marisol Touraine avait annoncé dimanche 1er septembre que dans le projet de loi sur les retraites, le report de l'indexation au 1er octobre -au lieu du 1er avril-, ne concernera pas seuls les retraités percevant le minimum vieillesse.

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Pour Laurent Berger, ce public est trop limité : « le minimum vieillesse concerne 600.000 personnes, or il y a aujourd'hui 1,6 million de retraités qui sont en-dessous du seuil du pauvreté. Nous souhaitons que ce million de salariés ne soient pas non plus impactés par le report".

La centrale veut peser dans le débat sur le financement de la protection sociale

Par ailleurs, Laurent Berger s'est dit d'accord pour participer à la concertation (qui débutera en septembre a annoncé Pierre Gattaz après avoir été reçu par le ministre des Finances Pierre Moscovici) organisé par le gouvernement sur le financement de la protection sociale. On sait, en effet, que pour faire avaler la pilule au Medef d'une augmentation des cotisation retraites des salariés et des entreprises, Jean-Marc Ayrault a proposé à Pierre Gattaz de transférer une partie des dépenses consacrée à la politique familiale, assurées jusqu'ici par les cotisations des entreprises, vers un autre mode de financement. De manière à ce que, in fine, le coût du travail soit réduit. Dans ce cas, affirme Laurent Berger, il faudra que toute nouvelle mesure soit "à coût neutre pour les salariés en terme de pouvoir d'achat".

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La CFDT serait ainsi favorable au transfert d'une partie des cotisations familiales (3,2 points sur un total de 5,4) sur la CSG à condition que le coût de la hausse des cotisations vieillesse prévue par le projet de loi soit assuré par le seul patronat. Actuellement le projet Ayrault prévoit une augmentation des cotisations retraites des salariés et des entreprises de respectivement 0,15% en 2014, puis de 0,05% entre 2015 et 2017, soit un rendement de 4,4 milliards.

La CFDT regrette aussi que le future projet de loi sur les retraites ne pose pas les « germes » d'une réforme systémique, comme le souhaitait le syndicat. Pour autant Laurent Berger ne se prive pas d'ironiser sur l'UMP qui propose maintenant cette réforme systémique… Alors qu'elle n'était pas à l'ordre du jour quand ce parti était dans la majorité.

Nouvelle fracture syndicale

En tout état de cause, la CFDT se félicite de l'instauration d'un compte pénibilité et des facilitations décidées pour valider des trimestres pour la retraite. Ainsi, avec la CFTC et l'Unsa, elle forme un « front » en faveur du texte. Ces trois centrales veulent continuer de peser en obtenant des nouvelles avancées d'ici l'adoption par le Parlement du projet de loi.

A l'inverse, la CGT, Sud et Solidaires ont dit tout le mal qu'elles pensaient de ce texte et notamment du rallongement de la durée de cotisation. Ces trois organisations descendront dans la rue le 10 septembre. Elles espèrent que cette date marquera le début d'un mouvement plus large. Il n'est pas encore certain que ce soit le cas. Surtout que le gouvernement a pris soin d'épargner les régimes spéciaux et la retraite des fonctionnaires…