Deux ans après l’élection de François Hollande, où en est l’économie française ?

Par Fabien Piliu  |   |  1146  mots
Après deux premières années moroses, la suite du quinquennat sera-t-elle plus heureuse dans le domaine économique ?
Le 6 mai 2012, les Français élisaient François Hollande à la présidence de la République. Deux ans après, son bilan dans le domaine économique est très mal perçu malgré quelques réforme importantes, en cours ou à venir.

Deux ans après son accession au pouvoir, quel premier bilan peut-on tirer de l'action de François Hollande et de son gouvernement dans le domaine économique ?

Le début du quinquennat a tout d'abord été marqué par une erreur sérieuse de diagnostic, erreur reconnue  en mars 2013 par François Hollande lui-même lors d'un entretien télévisé sur France 2 : les effets dévastateurs de la crise de 2008-2009 sur l'économie française ont été sous-estimés par le candidat socialiste.

Une erreur de jugement dès le début du quinquennat

" La France a failli déposer le bilan quand je suis arrivé" , a déclaré ce mardi François Hollande sur BFM TV et RMC Radio.

Tenter de comprendre comment François Hollande et son camp ont pu ainsi se tromper servirait-il à quelques chose ? Pour les uns, l'éloignement du pouvoir, pour les autres, la tentation de multiplier les promesses électorales pour rafler la mise élyséenne, pourraient par exemple expliquer cette erreur de jugement qui a conduit le gouvernement à privilégier initialement une augmentation des recettes, qui pesa sur la croissance, plutôt qu'une réduction des dépenses de l'Etat pour tenter d'équilibrer les comptes publics. Toujours est-il  que les recettes fiscales n'ont pas été au rendez-vous - la France a dû se résoudre à demander un sursis à Bruxelles pour respecter ses engagements communautaires - et que la popularité de l'exécutif a sombré.

La croissance ne fut pas au rendez-vous

Au-delà du ressenti, des résultats des sondages et des enquêtes d'opinions, l'observation des grands agrégats macroéconomiques permet d'affiner le diagnostic sur les deux premières années de François Hollande à la tête de l'Etat. Première indication : la croissance économique ne fut pas au rendez-vous au début du quinquennat. Après avoir progressé de 1,4% et de 1,5% en 2010 et 2011, le PIB s'est stabilisé l'année suivante avant d'augmenter de 0,3%.

Dans le domaine industriel, ces deux dernières années sont surtout émaillées par les coups de gueule d'Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif aujourd'hui ministre de l'Economie, et par ses tentatives de sauvetages d'entreprises.

Frappée par l'atonie de la demande, la production manufacturière a très légèrement augmenté sur la période pour dépasser à peine sa moyenne de longue période. Concrètement, la production des entreprises manufacturières retrouve le niveau observé en 2010. Dans ce contexte morose, à 61 milliards d'euros en 2013, le déficit commercial tricolore reste abyssal quand celui de l'Allemagne tutoie les 200 milliards d'euros d'excédents:  il s'est élevé à 61 milliards d'euros en 2013. Le dernier excédent commercial date de 2003.

Quant aux défaillances d'entreprises, provoquées par la faiblesse de la croissance, leurs difficultés à résoudre leurs problèmes de trésorerie et une compétitivité-prix dégradée, elles restent très élevées.

Dans ce contexte délicat, rien d'étonnant à ce que le nombre de demandeurs d'emplois ait augmenté. Depuis mai 2012, plus de 400.000 chômeurs de catégorie A supplémentaires se sont Inscrits à Pôle emploi. Certes, en 2013 cette augmentation a été moindre qu'en 2012. Mais l'objectif d'inversion de la courbe du chômage affiché de façon trop optimiste par le Président de la République pour la fin de 2013 n'a pu être tenu.

Des réformes en cours et à venir

Le gouvernement est-il resté inactif ? Loin s'en faut. Parallèlement aux mesures d'urgences pour sauver l'existant, en particulier pour abaisser le chômage des jeunes, l'exécutif a multiplié les mesures structurelles pour dégager l'horizon de l'économie française. Citons notamment, le Pacte de compétitivité et de croissance et sa mesure-phare, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), la banque publique d'investissement, (Bpifrance), le crédit d'impôt innovation, l'accord national interprofessionnel de janvier 2013 qui assouplit le marché du travail.

D'autres réformes, notamment celles contenues dans le Pacte de responsabilité, devraient permettre d'amorcer le redressement de la compétitivité tricolore. Mais toutes ces réformes ne produiront pas leurs effets avant un certain temps. En attendant, le gouvernement ne peut compter que sur une amélioration de la conjoncture, en particulier au sein de la zone euro où se concentre la plupart de ses partenaires commerciaux.

L'économie française est-elle dans une bonne passe ?

Actuellement, l'économie retrouve quelques couleurs. Selon l'Insee, les industriels prévoient d'augmenter leurs investissements de 4% cette année après que celui-ci ait chuté de 7% en 2013.

" Après avoir été au plus bas début 2013, la confiance des ménages et le climat des affaires se sont considérablement améliorés, même si ces deux indicateurs sont encore nettement en-dessous de leurs moyennes à long terme. L'activité dans le secteur du bâtiment reste faible, mais la production manufacturière et les dépenses d'équipements sont reparties à la hausse ; les chefs d'entreprise prévoient désormais une forte progression de l'investissement en 2014. La consommation privée a commencé à se redresser progressivement, même si elle a un peu fléchi au début de 2014, en grande partie du fait de circonstances exceptionnelles, notamment une baisse de la consommation d'énergie liée à un hiver clément et des mesures prévues pour janvier qui ont conduit à des achats anticipés à la fin de 2013. Bien que le nombre de chômeurs déclarés ait continué d'augmenter, le taux de chômage standardisé a cessé de monter à la fin de 2013, grâce à la baisse du chômage des jeunes dans le cadre des dispositifs de contrats aidés. Compte tenu de la mollesse de la reprise jusqu'à présent et des pressions que la faiblesse des bénéfices continue de faire peser sur l'emploi dans le secteur privé, le travail via les agences d'intérim aura été le seul autre signe de vitalité sur le marché du travail », indique la version préliminaire des perspectives économiques de l'OCDE dévoilée ce mardi. L'exécutif est-il trop optimiste

Cette légère amélioration de la conjoncture, que pourrait fragiliser une nouvelle appréciation de de l'euro, donne des ailes à l'exécutif. Bercy vise une augmentation de 1% du PIB cette année, prévision sur laquelle s'accorde la plupart des économistes mais aussi la Commission européenne et l'OCDE. Selon l'Insee, l'indicateur de retournement calculé au niveau France qui vise à détecter le plus tôt possible le moment où la conjoncture change d'orientation reste dans la zone indiquant une situation conjoncturelle favorable.

En revanche, lorsqu'il anticipe une augmentation de 1,7% du PIB en 2015, le gouvernement semble assez optimiste. Bruxelles et l'OCDE notamment tablent plutôt sur une progression de 1,5% de l'activité, François Hollande et son gouvernement ont-ils appris de leurs erreurs ? Ne surestiment-ils pas la reprise après avoir sous-estimé la crise ? La question reste ouverte.