Le régime de retraite complémentaire des cadres au plus mal

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  702  mots
Le régime complémentaire de retraite des cadres, l'Agirc, pourrait ne plus servir les pensions dès 2017
Un rapport de la Cour des comptes confirme la très forte dégradation financière des régimes complémentaires de retraites, notamment celui des cadres, l'Agirc, qui pourrait ne plus disposer de réserves suffisantes dès 2017. Patronat et syndicats sont appelé en 2015 à arrêter des mesures d'urgence.

Les finances des régimes de retraites complémentaires des salariés (Arrco) et des cadres (Agirc) sont au plus mal. Des mesures drastiques sont à attendre pour sauver le système, notamment pour la caisse des cadres qui pourrait ne plus avoir suffisamment de réserves pour servir les pensions dès 2017 ! Un scénario catastrophe que ne semble pas omettre la Cour des comptes dans un rapport intitulé « Garantir l'avenir des retraites complémentaires des salariés » qui devait être officiellement rendu public jeudi 17 décembre mais qui a « fuité » dans le quotidien "Le Parisien" du 15 décembre.

Selon le rapport, la Cour note une dégradation financière constante depuis 2009, avec des déficits qui ont atteint 4,4 milliards d'euros en 2013 et qui pourraient avoisiner 5,3 milliards d'euros cette année. A lui, seul, le régime des cadres aurait connu un trou de 3,2 milliards d'euros.

Pis, pour les deux régimes, la Cour des comptes anticipe un déficit de 15 milliards d'euros en 2030, portant l'endettement total à ... 100 milliards d'euros. Intenable.

Sans surprise, les magistrats de la rue Cambon préconisent donc de jouer sur les trois leviers possibles pour endiguer le dérapage : diminuer le montant des pensions servies, augmenter le niveau des cotisations et reculer l'âge du départ à la retraite à 64 ans. Ce qui serait un quasi retour à la situation qui prévalait avant 1981.

En vérité, la plupart des préconisations de la Cour des comptes sont déjà appliquées mais il va sans doute falloir les accentuer.

Le gel des pensions déjà effectif dans les faits

En effet, depuis un accord entre le patronat et les syndicats (gestionnaires des régimes de retraite complémentaire des salariés et des cadres), conclu dans l'urgence le 13 mars 2013 pour tenter de stopper la dégradation des finances, différentes mesures ont été adoptées. Ainsi, il a été acté une sous indexation partielle des pensions de retraite en prévoyant , pour les années 2014 et 2015, que ces pensions seraient revalorisées de un point de moins que l'inflation. Au 1er avril 2014, les pensions n'ont finalement même pas été revalorisées du tout au regard de la faiblesse de l'inflation constatée sur un an. Il y a fort à parier qu'il en sera exactement de même le 1er avril 2015.

Selon des données internes de l'Agirc et de l'Arrco, un gel total de la revalorisation en 2013 était censé rapporter 1,4 milliard en 2017. Mais il en faudrait bien plus.

Patronat et syndicats doivent prendre en 2015 des décisions drastiques

Pis, toujours a la suite de l'accord de 2013, les partenaires sociaux sont convenus d'augmenter les cotisations Arrco et Agirc de 0,1 point par an sur deux ans. Cette première augmentation a donc eu lieu le 1er janvier 2014. La deuxième va suivre le 1er janvier 2015. A cette date les cotisations Arrco seront de : 4,65% (part patronale) et 3,10 (part salariale) en tranche A; 12,15%  (part patronale) et 8,10% (part salariale)en tranche B. Et pour l'Agirc, 12,75% (part patronale) et 7,80% (part salariale) en tranche B.

Les partenaires sociaux doivent de nouveau se réunir début 2015 pour négocier de nouvelles mesures de redressement. Il est quasiment déjà entendu que seront reconduites les mesures de gel des pensions et de hausse des cotisations qui, initialement, ne devaient durer que deux ans. Mais cet effort ne sera pas suffisant non plus. Or, il faut impérativement trouver une solution. Le gouvernement est d'ailleurs très attentif. En effet, il faut garder à l'esprit que le « trou » des régimes de retraite complémentaire - à l'instar de celui de l'assurance chômage - fait partie des éléments pris en compte pour apprécier le respect par la France des critères de Maastricht, en l'occurrence un déficit limité à 3% du PIB.

Mais comment expliquer cette situation de crise, notamment à l'Agirc. Le régime s'est retrouvé confronté à une série de problèmes sans précédents. D'abord, les nombreuses générations issues du Baby boum partent actuellement à la retraite. Ce qui pèse sur les compte. Ensuite la croissance atone entraine une hausse du chômage des cadres ce qui réduit le montant des cotisation collectées. Les solutions s'annoncent donc très douloureuses .