Avenir des retraites : le retour à l'équilibre financier reste très incertain

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  737  mots
Les réformes de 2010 et 2013 vont permettre, selon le COR, de restaurer à court terme, l'équilibre pour le régime de base.
Les dernières projections sur le financement des retraites réalisées par le Conseil d’orientation des retraites (COR) montrent une légère amélioration de la situation du régime de base... à court terme. En revanche, le retour à l'équilibre de l'ensemble du système à moyen terme dépendra totalement du niveau de la croissance.

Pour une fois, les perspectives à court terme sur l'avenir des retraites ne sont pas trop mauvaises, si l'on en croit les dernières projections financières du Conseil d'orientation des retraites (COR) officiellement publiées ce mardi 16 décembre. En revanche, à moyen et long terme, c'est moins brillant, sauf dans un cas de figure fondé sur des estimations de croissance qui semblent bien optimistes.

Toujours est-il que les projections du COR montrent une embellie par rapport à 2012, notamment grâce à la réforme des retraites décidée par le gouvernement Ayrault en 2013 (hausse des cotisations et allongement à 43 ans (en 2035) de la durée de cotisation nécessaire pour percevoir une retraite à taux plein. Pour le COR, cet allongement de la durée de cotisation est bénéfique car il permet "l'amélioration du rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités".

Amélioration à court terme du régime de retraite de base

Actuellement, le solde financier annuel du système de retraite français est négatif, à hauteur d'environ 0,5 point de PIB, soit 10 milliards d'euros. Le COR explique que le régime de retraite de base des salariés du privé, géré par la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav),  pourrait revenir à l'équilibre vers 2017 grâce aux réformes de 2010 (gouvernement Fillon) et 2013 (gouvernement Ayrault, déjà mentionné). Il n'y a donc pas urgence à modifier une nouvelle fois les règles. En revanche, cela sera sans doute utile à moyen terme.

Pour établir ses projections à l'horizon 2030-2050, le COR travaille sur la base de cinq scénarios différents (baptisés A, A', B, C, C') en matière de taux de chômage, de taux de natalité, de croissance et d'inflation.

A moyen terme, le système de retraite peut être à l'équilibre, avec un taux de chômage ramené à... 4,5%.  Irréaliste!

Dans les scénarios les plus optimistes, bâtis par le COR, le retour à l'équilibre de l'ensemble du système des retraites vers 2023/2025 serait possible dès lors que le taux de chômage redescendrait à 4,5 % (contre 10,4 % actuellement) et si la croissance dépassait 2 % entre 2020 et 2030 (scénarios A et B). Selon le COR, le système pourrait même dégager des excédents "à plus long terme"!.

Ces deux scénarios ne semblent pas très réalistes. D'abord, Il faudrait que le chômage chute de 6 points en moins de dix ans. Très difficile. Ensuite, comment espérer ramener le taux de chômage à 4,5%, soit son niveau « structurel », alors qu'il na plus jamais été atteint en France depuis quarante ans ? Idem pour la croissance. Comment croire que la France puisse renouer durablement avec une croissance annuelle supérieure à 2% ?

En revanche, dans les autres scénarios, certes plus pessimistes mais nettement plus réalistes, le retour à l'équilibre n'est pas du tout assuré à court, moyen et long terme (2050). Ainsi, avec un taux de chômage ramené à 7 % - ce qui serait déjà pas si mal - et une croissance moyenne de 1,8 %, le système de retraite resterait déficitaire d'environ 0,5% du PIB, soit environ 10 milliards d'euros à l'horizon 2030 (scénario C).

Pis, avec une croissance limitée à 1,5% - ce qui n'est pas à exclure- , les finances du régime continueraient de se dégrader pour atteindre 1% du PIB (soit 20 milliards d'euros) vers 2030, puis 1,5% (30 milliards) vers 2050.

L'enjeu majeur des retraites complémentaires

Par ailleurs, à l'instar de la Cour des Comptes, le COR émet à son tour un signal d'alarme sur la situation catastrophique dans laquelle se trouvent les régimes complémentaires de retraite des salariés (Arrco) et des cadres (Agirc) qui verraient leur besoin de financement se creuser jusqu'en 2018, passant de -2,1 à -5,5 milliards d'euros.

Les décisions vont être très douloureuses et l'enjeu est majeur puisque les pensions versées par ces caisses représentent approximativement un tiers de la retraite totale des non-cadres et deux tiers de celle des cadres.

Enfin, selon le COR, alors qu'il a "relativement peu fluctué au cours des années 2000, entre 60 ans et demi et 61 ans", l'âge de départ moyen à la retraite passerait à 62,1 ans en 2018, puis 64,1 ans à partir de la fin des années 2030 (64,4 ans s'il n'y avait plus de départ anticipé), note par ailleurs le COR.

Quant au rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités de droit direct, il  diminuerait progressivement, passant de 1,7 en 2018 à environ 1,4 à partir de la fin des années 2040.