Débat international autour du dilemme réduction des déficits-croissance

L'OIT a mis en garde ce mercredi contre des réductions trop rapides des déficits publics qui pourraient ralentir, voire stopper, la croissance et provoquer une nouvelle poussée du chômage. La question de la rigueur budgétaire sera d'ailleurs au centre de la réunion des pays du G20 dès jeudi, alors que les avis sur la manière de réduire les déficits divergent.

Comment réduire les déficits publics sans peser sur une croissance encore fragile ? C'est toute la question qui agite les marchés financiers depuis plusieurs semaines, alors que les plans d'austérité en zone euro se multiplient. Ce mercredi, l'Organisation internationale du travail (OIT) est venu rajouter aux interrogations.

L'OIT a en effet mis en garde contre des réductions trop rapides des déficits publics qui pourraient ralentir voire stopper la croissance en ayant des conséquences sociales désastreuses face à un chômage mondial galopant. "Il n'y a pas de reprise durable sans relance de l'emploi", a souligné le responsable du secrétariat de l'OIT, Juan Somavia, en ouvrant la 99ème Conférence internationale du Travail.

L'OIT et d'autres recherches montrent "qu'une réduction prématurée des déficits pourrait ralentir ou stopper la reprise. Ceci augmenterait le chômage et, dans les deux années à venir, pourrait provoquer un élargissement des déficits en raison de la plongée des revenus fiscaux", a insisté Juan Somavia.

"Coups de volants trop brutaux"

Un son de cloche repris ce mercredi par la ministre française de l'Economie, Christine Lagarde. A la veille de la réunion des ministres des Finances et des présidents de banques centrales des pays du G20 en Corée, "un des sujets débattus" sera "comment on concilie une consolidation budgétaire nécessaire (...) et d'autre part un soutien à la croissance" a-t-elle indiqué. "C'est toute la difficulté de l'exercice (...) il faut être extrêmement attentif à ne pas donner des coups de volant trop brutaux".

"On va examiner la situation économique de l'ensemble des pays (...) avec pour objectif de mieux coordonner nos politiques économiques pour les rendre un peu plus favorables à une croissance durable", a-t-elle ajouté. Une coordination qui fait défaut aujourd'hui au sein même de l'Union européenne, entre les deux partenaires que sont la France et l'Allemagne.

Certes, les deux pays se sont engagés à réduire de façon drastique leurs déficits qui ressortent bien au-delà de l'objectif de 3% du PIB imposé par les critères de Maastricht. La France s'est ainsi engagée à réduire son déficit public de quelque 8% en 2010 à 6 % en 2011, 4,6% en 2012 puis 3% en 2013 ou au plus tard 2014.

De son côté, l'Allemagne espère revenir dans dans les limites autorisées par le pacte de stabilité européen également d'ici 2014, alors que son déficit public en 2010 devrait être moins élevé (6% du PIB).

Hausse des impôts nécessaire ?

Le délai est donc le même, mais la méthode est bien différente. Quand Paris refuse absolument de toucher aux impôts, le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a lui confirmé que non seulement les impôts ne baisseraient pas mais que les prélèvements obligatoires devraient être augmentés. 

Selon le quotidien allemand Bild, le gouvernement pourrait revenir sur le taux de TVA réduit à 7% sur certains produits, augmenter la TVA dans l'hôtellerie à 19%, voire instaurer un taux normal de TVA à 25%. L'impôt sur le revenu pourrait aussi être mis à contribution, comme certaines dépenses sociales qui seraient réduites.

La France de son côté mise sur la maîtrise de ses dépenses publiques via le gel en valeur des dépenses de l'Etat, la baisse de 10% sur trois ans des dépenses de fonctionnement et d'intervention ou l'inscription dans la Constitution d'une règle destinée à ancrer dans la durée la réduction du déficit.

Mais le gouvernement écarte fermement toute hausse des impôts, hormis des mesures sur les niches fiscales. Une politique qui suscite le specticisme dans les rangs de l'opposition. Pour le président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, le socialiste Jérôme Cahuzac, des mesures supplémentaires seront nécessaires pour ramener à 3% le déficit public de la France en 2013. "Aujourd'hui, aucun des éléments qui ont été communiqués, en tout cas au Parlement, ne permettent de comprendre comment la France pourrait diminuer son déficit public à 3% en 2013", a-t-il indiqué ce mercredi.

Dimanche, l'ancien premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, avait lui aussi estimé que le retour à 3% de déficit en 2013 était impossible, en l'état des annonces. "Je dis très franchement qu'on n'atteindra pas les 3% du PIB de déficit en 2013, c'est une illusion. C'est impossible aujourd'hui, sauf à augmenter drastiquement les impôts".

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