Pourquoi l'Irlande a tort de ne pas augmenter son impôt sur les sociétés

Face à l'Union européenne et notamment Paris, Dublin défend âprement son impôt sur les sociétés à un taux de 12,5%, un des plus bas de tous les pays de l'OCDE. Les grandes multinationales installées en Irlande que La Tribune a rencontrées estiment cependant qu'une hausse limitée de l'impôt est possible.
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C'est devenu le principal point d'accrochage entre l'Irlande et la France : la première demande que le taux punitif imposé par l'Union européenne à son plan de secours soit abaissé ; la seconde réplique qu'il n'en est pas question si l'Irlande n'augmente pas son impôt sur les sociétés. A 12,5%, celui-ci est l'un des plus bas de tous les pays de l'OCDE, et jugé comme du dumping fiscal par Paris. Depuis trois mois, le débat a plutôt tendance à s'envenimer. "Les négociations semblent bloquées", reconnaît Dermot Clohessy, un des dirigeants de l'Investment and Development Agency (IDA), l'agence d'investissements étrangers.

Pourquoi l'Irlande s'accroche-t-elle ainsi à son bas impôt sur les sociétés ? Après plus de trois années de récession, Dublin compte relancer son économie en misant tout sur les exportations, qui comptent pour un cinquième du PIB. Cet unique espoir, seule lueur au bout du tunnel, risquerait d'être annihilé en cas d'augmentation de l'impôt sur les sociétés. Pourtant, à écouter les grandes multinationales installées en Irlande, l'argument tient difficilement.

Gabarit de joueur de rugby, pas loin de deux mètres de haut, Ron Buchan n'est pas du genre à garder sa langue dans sa poche. Le patron d'Allianz Worldwide Care, une division du groupe allemand en charge des assurances santé internationales, estime que l'impôt sur les sociétés n'était "qu'un des facteurs" qui l'a incité à s'installer à Dublin en 1999. "Nous cherchions un pays où nous pouvions trouver des gens qui parlaient différentes langues et où nous pouvions avoir un contact direct avec le régulateur financier."

Louise Phelan, qui dirige les opérations de PayPal pour l'Europe, tient le même discours : "l'impôt sur les sociétés était un facteur très bas dans la liste des raisons (de notre installation en Irlande)." Elle cite de façon proéminente la qualité de la main-d'oeuvre ainsi que l'aide apportée par l'IDA, notamment dans la recherche et développement.

Quant à SAP, un géant allemand du logiciel, il peut affirmer sans suspicion ne pas s'intéresser à l'impôt. Son centre de Dublin a longtemps été dédié à des tâches administratives, qui ne rapportaient pas d'argent (et donc pas de profits, ce qui signifie pas d'impôt).

Dans ces conditions, pourquoi l'Irlande s'obstine-t-elle à ne pas augmenter ses impôts ? Evidemment, il n'est pas question d'augmenter le taux au niveau de ceux la France (33%) ou du Royaume-Uni (26%), ce qui changerait clairement la donne pour les entreprises. Mais pourquoi pas 15% ou 16% ? Cela permettrait à l'Irlande de faire d'une pierre deux coups : le pays augmenterait ses recettes venant des multinationales et obtiendrait une réduction de 400 millions d'euros par an sur son plan de secours, grâce à la baisse du taux d'intérêt.

Sans surprise, les patrons des multinationales se montrent beaucoup plus hésitants face à cette idée. "Cela créerait une instabilité, et tout le monde se demanderait : si ça a augmenté une fois, est-ce que cela augmentera une deuxième fois ?", estime Liam Ryan, le directeur local de SAP. Mais la plupart le reconnaissent : ils ne fuiraient pas. "En cas de hausse de l'impôt, nous ne partirions pas immédiatement", estime Liam Ryan. Même chose du côté de PayPal : "Si cela augmente, nous regarderons les effets, mais nous ne déménagerons probablement pas", considère Louise Phelan. Comme raison de rester, elle cite les investissements faits par son entreprise sur place : un grand bâtiment en cours d'agrandissement, et 1.400 employés formés et efficaces. "Un impôt à 15% ou 16% ne ferait pas de différence", conclut Ron Buchan, d'Allianz, qui a 430 employés parlant 26 langues.

Certes, réplique Dermot Clohessy de l'IDA, mais "cela risque de nous faire perdre beaucoup de nouvelles opportunités". Pourtant, même ce dernier argument est balayé du revers de la main par un patron d'une entreprise financière, qui veut rester anonyme : "augmenter légèrement l'impôt sur les sociétés en Irlande serait logique. Jusqu'à présent, ce sont les employés qui ont porté toute la charge de la cure d'austérité, et ce n'est plus tenable."

Curieusement, l'explication du refus de Dublin semble avant tout politique. Tous les principaux partis promettent de maintenir l'impôt sur les sociétés à 12,5%, considéré comme le symbole des années "Tigre celtique". "Toucher à ce sujet relève presque du vaudou", juge Liam Ryan. Pour le nouveau gouvernement en place, capituler sur le sujet serait admettre une grave défaite, et cela laisse penser que Dublin ne fléchira pas. Pour le redressement du pays, c'est sans doute dommage.

Commentaires 40
à écrit le 17/08/2011 à 12:12
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C'est de la faute de L'irlande la dette de la France??? Les francais manquent de culture economique, 50% confondent dette publique et dette exterieur. Les memes qui ont fait les manifestations anti-retraite sont les memes qui ont laisse filer la de...

le 11/04/2012 à 20:24
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Vous, c'est de culture tout court dont vous semblez manquer. Et si (peu probable) vous avez suivi les cours d'économie, ceux de lecture et de grammaire ont du vous échapper ! C'est pa l'tout de recevoir des "éléments de langage"; encore faut il savoi...

à écrit le 21/06/2011 à 14:35
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Et les économies au niveau des états, ça ne les inspirent pas les dirigeants européens?.

à écrit le 21/06/2011 à 11:33
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L'Irlande a parfaitement raison de maintenir son taux d'imposition pour deux raisons : La première est que l'euro fait boxer des poids plume avec des supers lourds, ce qui à la base n'est pas bien raisonnable comme d'ailleurs reproché dans d'autres c...

le 21/06/2011 à 15:20
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Tu as lu l article??? même certainens E sont d accord pour une hausse raisonnable de L IS.... Faut arreter l'Irlande n est plus le PVD qu elle etait a l entree dans l euro et continue le dumping fiscal et social, a l extreme on a la france qui pra...

le 24/06/2011 à 13:56
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Sauf que personne ne l'a force a rejoindre l'Euro. Sans L'euro, l'Irlande cesserait d;attirer les investisseurs/multinational, donc ils y trouvent quand meme leur compte

à écrit le 20/06/2011 à 12:04
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Pourquoi l'Irlande ne défend elle pas son point de vue auprès des agences de notation ? Si elle est crédible, elle pourra ainsi emprunter directement aux marchés et se passer de l'aide européenne. CQFD.

le 21/06/2011 à 3:12
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Bah oui c'est ce qu'ont fait les Etats Unis depuis 30 ans ... pipoter le monde entier via leurs agences de notations ... ils sont en réalité peut être encore plus endettés que l'Irlande ... n'ont ni entreprises a privatiser comme la Grèce, ni service...

à écrit le 20/06/2011 à 10:01
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Pourquoi ne pas conditionner l'aide européenne à l'Irlande à l'augmentation de son Impôt sur les sociétés (IS)? Aujourd'hui, ce pays"émergent" pratique une concurrence déloyale et malhonnête: je te vole tes employeurs et tu combles mes déficits. Tr...

le 21/06/2011 à 2:57
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Pays "émergent" quand il lui faut des sous .. Tigre celtique quand il revend des produits financiers américains et qu'il héberge des multinationales ... Il était en 2008 le NUMERO 2 de l'indice de développement humain (chercher IDH 2010) ... Ce pays...

à écrit le 20/06/2011 à 9:14
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Le demonstration n'est pas faite ! Si le pays est multiculturel, c'est parceque les gens vont la ou les entreprise sont, pas l'inverse ! Facilement 70% des gens a la Defense sont des Anglais, si Allianz le voulait ils auraient tout autant de langues ...

à écrit le 20/06/2011 à 8:50
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L'Irlande a tort de persister. L'application d'un taux d'IS très faible correspondait à du dumping au détriment des autres pays européens. Ceci alors que l'Europe avait été particulièrement favorable pour l'Irlande. Continuer dans cette voie est se m...

à écrit le 19/06/2011 à 19:04
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Prosélytisme à la française très caractéristique, je n'aime pas cet article. En clair, on explique que c'est aux irlandais d'augmenter les impôts et pas aux bons français de diviser par deux le cout de leur État. La relance et le maintient du busines...

le 19/06/2011 à 19:59
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Ben voyons, c'est tellement facile. L'irlande veut continuer à pratiquer son dumping fiscal et en meme temps toucher les aides de L'U.E. dont la dernière ateignait la bagatelle de 85 milliards d'euros.

le 20/06/2011 à 6:48
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Je suis d'accord avec Peter dans le principe. Le problème est que l'Irlande n'arrive pas à tenir son budget, c'est à dire que l'investissement sur les entreprises, c'est ses "collègues" européens qui la paye via les aides accordées !!!! D'où le du...

le 20/06/2011 à 8:00
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La France a reçu en son temps de nombreuses aides pour son agriculture, et ses zones sinistrées ce n'est pas le sujet.

le 20/06/2011 à 9:16
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Peter, tu crois qu'ils viennent d'ou les sous des aides ? Des impots payés par les entreprises des autres pays! Réfléchis un peu avant.

le 20/06/2011 à 10:34
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à Peter : il faut savoir raison garder. Le taux de l'IS irlandais constitue du dumping. On ne peut pas faire des cadeaux aux entreprises pour les attirer, pénaliser ainsi ses voisins et leur demander des aides en même temps. C'est malhonnête et hypoc...

le 20/06/2011 à 10:47
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On ne peut tout avoir. En attendant l?Irlande peut sortir de la zone Euro et se débrouiller toute seule. Elle verra bien.

le 20/06/2011 à 17:44
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bien evidemment les irlandais doivent maintenir leur impôts bas, car tous les beaux parleurs plus haut ne comprennent pas un point fondamental : les irlandais ont parfaitement raison de jouer l'exportation, l'allemagne fait pareil et s'en sort partic...

le 21/06/2011 à 3:07
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Mais avoir des impôts bas n'est absolument pas signe de bonne gestion : la preuve l'Irlande !! et les états unis aussi (qui par ailleurs pourront pas baisser leur dépenses en services publiques .. ils n'en ont pas !! et sont quand même surendetté !! ...

à écrit le 19/06/2011 à 7:55
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Cette rebelion de l'Irlande signifie bien le peu de crédibilité de cette Europe! Qui a souvent fermer les yeux sur les critères d'admision des pays dans l'UE par simple idéologie: l'uniformisation forcé des peuples par l'accélération du processus!

à écrit le 19/06/2011 à 4:20
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Que les boites qui bénéficient de ces bas impôts payent pour renflouer les banques Irlandaises !

à écrit le 18/06/2011 à 22:18
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Quel est le taux punitif en question ? Peut-être l'Irlande espère-t-elle emprunter sur les marchés financiers a un taux inférieur, ce qui lui permettrait de conserver son libre-arbitre.

le 20/06/2011 à 0:40
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excellent :) ils vont avoir des difficultes a emprunter pendant quelques temps quand meme !

à écrit le 18/06/2011 à 18:21
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Et oui l'Irlande ne veut pas toucher au symbole des années du tigre celtique .... pourtant les faits l'histoire montrent : QUE CELA N'A PAS FONCTIONNE ....

à écrit le 18/06/2011 à 17:56
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L'article est mal ficelé, il est clair que si je suis chef d'entreprise et que tout chose étant égale par ailleurs, en Europe, je choisis le pays qui m'offre un avantage fiscal, si je dois payer sur 10 millions 3,3 millions ou 1,25 millions, le reste...

le 24/06/2011 à 13:48
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il est sure que les multinationales comme google et consors ne sont venu que pour le soleil irlandais!!! Mais de qui se moquent-ils. L'Irlande a recu combien d'argent du contribuable europeen lors de son entree dans la CEE. Avec un chomage de 14% en ...

à écrit le 18/06/2011 à 17:41
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L'Irlande défend son pain? quoi de plus normal. L'Irlande depuis 2006 à subit une augmentation de près de 7,5% de son taux de chômage qui est aujourd'hui à 14%. Ce qui ce cache sur cette polémique c'est un certain protectionnisme puisque les prêteurs...

à écrit le 18/06/2011 à 15:51
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Ce n'est pas la peine de pondre un tel article si, parallèlement, on leur donne 60 milliards d'euros sur un plateau pour continuer à faire du dumping anti-européen.

à écrit le 18/06/2011 à 15:17
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L'Angleterre et l'Irlande ont un mentalité insulaire et resteront en périphérie de l'Europe.L'Irlande étant devenuse la zone franche de l'impot sur les sociétés,il faut donc lui faire payer assez cher son emprunt.

à écrit le 18/06/2011 à 15:07
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C'est incroyable que le gouvernement d'un pays qui bénéficie de tellement d'aides extérieures se permette de dicter ses exigences!! Combien de temps cela va-t-il durer? Ces politiciens irlandais ont des comptes à rendre à ceux qui les ont élus. Mais1...

le 20/06/2011 à 0:44
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on en profite pour faire la meme chose avec la france qui n a pas eu un budget a l'equilibre de 1980?

le 21/06/2011 à 10:17
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tout a fait, et allez voir les aides que l'ont recoit egalement pour l'energie, et l'agriculture; les premiers d'europe !!!

à écrit le 18/06/2011 à 15:07
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Trés bien Allianz Pay Pal et les autres ne sont pas seulement en Irlande pour le taux bas d'impôt mais aussi pour "avoir un contact direct avec le régulateur financier". Très bien et qu'ils se mettent encore plus en contact avec et qu'ils les fassen...

à écrit le 18/06/2011 à 12:38
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L'Irlande et l'Angleterre ont toujours eu le droit de dire non à l'Europe. Mais la France se l'interdit. Allez les roms, allez la délocalisation, la France vous dit Oui avec le sourire.

à écrit le 18/06/2011 à 9:38
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cet article est une blague... une entreprise va t elle declarer qu elle vient uniquement pr le taux? tout cela c du bullshit et l irlande a bien raison de garder son taux contre les collectivistes francais

le 18/06/2011 à 12:19
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Bravo vous vez tout compris...mais qu'es-ce que vous faites en France ?

le 18/06/2011 à 15:01
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Banquier pourquoi ?

le 21/06/2011 à 10:15
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c'est pasparce qu'on est d'accord avec l'irlande que "qu'est ce que vous faites en france? a felix !! moi aussi je suis d'accord avec l'iralnde; la france n'a qu'a faire de meme, cela relancera bien notre economie car il y aurait une attirance de l...

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