Le Parlement européen favorable à la libéralisation de l'énergie

Le Parlement européen a adopté mercredi matin un projet de directive sur l'ouverture des marchés de l'électricité et du gaz. La proposition a été votée par 351 voix contre 79 et 114 abstentions. Ce vote était nécessaire avant la présentation de cette directive au sommet européen de Barcelone des 15 et 16 mars prochains. Le texte adopté prévoit une ouverture des marchés de l'électricité et du gaz pour les professionnels, respectivement en 2003 et 2004, et une libéralisation des marchés pour les particuliers en 2005.Ce vote favorable du Parlement européen sur un texte critiqué par la France risque de rendre le sommet de Barcelone encore un peu plus houleux. La présidence espagnole de l'UE, soutenue par l'axe libéral Italie-Royaume Uni-Danemark, a en effet décidé de mettre à l'ordre du jour de cette réunion l'accélération du processus de libéralisation économique en Europe.L'agenda du sommet promet de belles prises d'armes entre les libéraux et ceux qui entendent freiner ou, du moins, maîtriser cette libéralisation, en tête desquels on trouve la France.L'affrontement devrait surtout avoir lieu sur la libéralisation du marché de l'énergie. La France refuse en effet, en pleine période électorale, d'accepter l'ouverture du marché aux particuliers et a bloqué la semaine dernière un compromis à ce sujet, ce qui a déclenché un tir de barrage de tous ses partenaires et des instances européennes (lire ci-contre). Aujourd'hui, dans une interview au Wall Street Journal, le président de Commission française de régulation de l'électricité (CRE), Jean Syrota, a lancé une pierre dans le jardin du gouvernement français en indiquant que le blocage français reposait sur des "choix politiques". "Industriellement, a-t-il ajouté, EDF est prête pour l'ouverture du marché français. Il est préférable d'avoir une EDF représentant 20% du marché européen plutôt que 90% du marché français", a-t-il conclu. Selon Jean Syrota, la France, soumise aux pressions de ses quatorze partenaires, pourrait se résoudre à un compromis. Elle accepterait ainsi l'ouverture du marché des particuliers en 2005 contre une reconnaissance de la nécessité de contrôler la bonne conduite du service public et d'assurer l'approvisionnement des plus pauvres.Un compromis qui n'est cependant pas acquis puisque, ce matin, Laurent Fabius rappelait son opposition à la libéralisation du marché de l'énergie. Selon lui, dans les pays "où l'ouverture du marché aux particuliers a eu lieu, les prix ont plutôt augmenté". Les discussions de la France avec ses partenaires sur ce sujet à Barcelone risquent donc de rester tendues.D'autant qu'une nouvelle difficulté semble surgir concernant la flexibilité des marchés du travail. Le gouvernement espagnol a fait de ce sujet une des priorités du sommet. Mais, la proposition espagnole heurte apparemment le ministre français de l'Emploi et des Affaires sociales, Elisabeth Guigou. Cette dernière a indiqué "refuser cette idée que nous devons demander aux personnes d'accepter n'importe quel emploi" au nom de la compétitivité de l'économie. Le plan proposé par l'Espagne entend faire de l'Europe une des économies les plus compétitives du monde en 2010, mais n'évoque pas de mesures sociales accompagnant ce processus. C'est ce "manque" qui inquiète Elisabeth Guigou et la commissaire grecque à l'Emploi et aux Affaires sociales, Anna Diamantopoulou.Elisabeth Guigou assure avoir le soutien dans ce refus du texte espagnol des trois pays du Benelux. Mais là encore, l'opposition aux vues françaises est forte. Ainsi, hier, le Premier ministre britannique Tony Blair et son homologue suédois Göran Persson ont affirmé dans un communiqué commun leur volonté de créer un marché européen du travail "plus flexible". Là encore, donc, la France risque de paraître isolée. Or, compte tenu de l'importance des forces hostiles à la libéralisation en France, le gouvernement pourrait ne prendre aucun risque, alors que la campagne présidentielle bat son plein. La possibilité d'un veto français à Barcelone n'est donc pas à exclure. Le gouvernement français compte en fait sur le ralliement de l'Allemagne, elle aussi en période électorale et dont la position à Barcelone n'est pas encore claire, pour parvenir à des textes de compromis plus proches de ses exigences. Gerhardt Schröder serait de plus en plus tenté d'axer sa campagne à gauche alors que son adversaire Edmund Stoiber a pris pour référence MM. Aznar, Berlusconi et Blair. Un ralliement aux positions françaises à Barcelone pourraient être un premier pas dans ce sens.La déclaration du ministre allemand de l'Economie et des Finances ce midi à Bercy semble confirmer une telle possibilité. En effet, Hans Eichel a indiqué "comprendre parfaitement" la position de la France sur la libéralisation du marché de l'énergie. Il a même esquissé l'existence d'un axe franco-allemand à Barcelone. En échange du soutien français dans le contentieux qui oppose la Commission à l'Allemagne au sujet des subventions à son industrie minière, le gouvernement allemand pourrait épauler la France à Barcelone sur l'énergie. "Si quelque chose n'est pas entièrement opposé aux intérêts allemands, nous essayons de faire un geste, et réciproquement", a résumé Hans Eichel.Le Premier ministre espagnol José Maria Aznar s'est d'ailleurs inquiété du risque d'immobilisme lié aux élections dans cinq pays membres cette année (Pays-Bas, Suède, France, Allemagne et Portugal). Il a rappelé hier soir sa volonté de parvenir à des "résultats concrets" dans le domaine de la libéralisation de l'économie européenne. La fin de semaine sera donc agitée dans la capitale catalane.latribune.fr
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