CAC 40, les 4.000 points sont envisageables

Les indices boursiers sont en berne. Le CAC en est un exemple significatif puisqu'il a perdu 25% en deux mois et près de 30% sur l'année. L'explication du repli est simple et tient en une seule phrase: les investisseurs n'ont plus confiance. Après divers scandales concernant des manipulations comptables (essentiellement aux Etats-Unis) et deux faillites retentissantes avec Enron, et plus récemment WorldCom, le marché doute de la sincérité des comptes fournis par les dirigeants. Dès lors, tout groupe qui présente une structure complexe ou un endettement spectaculaire est sujet à caution que ce soit aux Etats-Unis ou en Europe. En France, ces craintes ont en partie été à l'origine du limogeage de Jean-Marie Messier et des plongeons boursiers de France Télécom, Alcatel ou encore PPR. Bref, "le manque de confiance est aujourd'hui l'élément majeur qui freine les marchés. Ce qui entraîne un flight to quality vers l'obligataire", résume Jaona Ravaloson, directeur de la recherche chez Crédit Lyonnais Securities France. Pourtant, tous les observateurs estiment que les niveaux de valorisations sont désormais exceptionnellement bas.Le pire est déjà pris en compte. "A environ 3.300 points, le CAC 40 correspond à une situation de récession", ajoute même Marc Touati, économiste chez Natexis Banques Populaires. Or, les indicateurs économiques incitent plutôt à l'optimisme. Pour le premier trimestre, le PIB américain a gagné 6,1% et le deuxième trimestre, bien que moins spectaculaire, devrait lui aussi faire ressortir une hausse confortable. Marc Touati attend une croissance d'environ 3%. En Europe, la situation est plus contrastée, mais elle n'est pas pour autant inquiétante. La France tire notamment son épingle du jeu. L'investissement n'est pas son point fort mais la consommation reste soutenue. Certes, "il y a un décalage de 6 mois entre le retour à la croissance et l'amélioration des résultats des entreprises", précise Marc Touati. Néanmoins, pour les professionnels, il est évident qu'aujourd'hui le marché ne prend pas en compte les fondamentaux économiques.Même la baisse du dollar (entraînant une moindre compétitivité des entreprises européennes) ne peut pas constituer pour l'heure un handicap pour les marchés. "L'effritement du dollar (jusqu'à la parité avec l'euro) est déjà dans les cours", expliquait récemment à La Tribune Laura Delauzun, responsable de la gestion actions Europe chez SGAM (voir ci-contre). Car les couvertures des entreprises vis-à-vis d'une baisse du billet vert paraissent suffisantes. Le repli du dollar pourrait d'ailleurs attirer des investissements étrangers sur les places européennes. Selon Laura Delauzun, seul le débordement d'un niveau de 1,15-1,20 dollar par euro deviendrait problématique pour les entreprises.D'une manière plus générale, on peut donc dire que tous les indicateurs plaident pour un rebond prochain, principalement la prime de risque des marchés d'actions qui, revenue sur ses niveaux du 11 septembre, est historiquement haute. Mais actuellement, les cours ne tiennent plus compte des fondamentaux et les marchés semblent être leurs propres bourreaux . "Les cours anticipent un scénario catastrophe qui tend à s'auto-réaliser", observe Jaona Ravaloson.Il faut un déclic. C'est pourquoi, dans le climat de défiance actuel, les marchés auront certainement besoin d'un déclic pour renouer avec la confiance. Et là, les avis sont plus partagés. Pour beaucoup, ce "coup de pouce" viendra des Etats-Unis. Hugues de Montvalon, directeur des études économiques d'Oddo-Pinatton, voit notamment deux éléments positifs. "D'une part, les profits des entreprises, au sens macro-économique et sur une base fiscale, sont en hausse. Par ailleurs, la responsabilités des CEO vis-à-vis de leurs comptes sera accrue à partir du 14 août", explique-t-il. Philippe Brossard, directeur de la recherche de Fortis Securities France, estimait quant à lui, dans une interview du mois de juin, que "les perspectives bénéficiaires des entreprises devraient peu à peu être révisées à la hausse" et que "nous pouvons attendre de bonnes nouvelles sur les résultats des sociétés, particulièrement au début du quatrième trimestre" (voir ci-contre). Pour d'autres, les intervenants devront montrer l'exemple. Marc Touati estime notamment qu'il serait temps que les agences de notation "arrêtent de jeter de l'huile sur le feu" en dégradant les notations de dettes à tour de bras. "Comme elles ont été accusées de passivité, elles cherchent à se dédouaner, mais cela ne sert plus à rien. Ces agences s'apparentent à la cavalerie arrivant après la bataille", lance-t-il. Enfin, pour Jaona Ravaloson, le rebond reste conditionné à une réaction des grands investisseurs. "La baisse provient d'un phénomène mécanique, alimenté par les hedges funds et les assurances, observe-t-il. Lorsque les marchés se replient, les assureurs doivent céder des actions pour respecter leurs ratios de solvabilité. Ce processus a entraîné une spirale baissière et pour casser cette spirale, il faut une intervention technique, réglementaire ou financière afin que les assureurs arrêtent de vendre des titres. On pourrait notamment imaginer un assouplissement temporaire de leurs ratios prudentiels". Les 4.000 points en ligne de mire. S'ils sont partagés sur ce qui pourrait constituer "le déclic", les professionnels sont en revanche plus unanimes pour dire que le CAC 40 peut rebondir d'ici la fin de l'année. Et le sursaut pourrait même être assez brutal. "Il faut s'attendre à une réaction technique violente (...) Les fonds alternatifs ou hedge funds, ces fonds spéculatifs accusés d'avoir précipité la baisse de certaines grosses valeurs, ont commencé à racheter leurs positions et devraient poursuivre le mouvement", observe Christian Cambier, PDG de Prigest (voir ci-contre). Dès lors, pour la majorité des professionnels, ce sont les valeurs les plus "massacrées", comme les télécoms et les technologiques, qui profiteront en premier lieu d'une éventuelle reprise, et ce au détriment des défensives.Quant à l'ampleur de ce rebond, de nombreux professionnels estime que le CAC peut atteindre les 4.000 points cette année, même si la prudence reste de mise. D'ici la fin de l'année, "il y a de la place pour un retour vers les 4.000 points. Ce serait un simple phénomène d'ajustement sur un marché survendu", déclare Jaona Ravaloson qui ajoute que tout dépendra de la confiance future des investisseurs, laquelle reste une inconnue. Car la crise actuelle est inédite. Les 4.000 points semblent également envisageables pour Marc Touati, mais toujours avec une pointe de prudence. Quant à Hugues de Montvalon, il se veut un peu plus réservé. Il voit plutôt l'indice parisien à 3.500 points, estime que "le rebond à court terme sera technique" et que pour la suite "il y a bien peu de visibilité". Quant à Christian Cambier, il se risque à un pronostic à plus longue échéance. Pour lui, les performances de 20 à 25% par an appartiennent au passé et il va falloir s'habituer dans les prochaines années à des rendements plus modestes de 5 à 6%. "Il faut bien redouter une évolution boursière comparable à celle enregistrée sur la période 1966-1982", prédit-il.Quelque soit l'évolution future de la Bourse, la crise actuelle aura au moins eu le mérite de rappeler une caractéristique des marchés que les épargnants avaient peut-être oubliée: "les investisseurs ont redécouvert que les marchés d'actions étaient risqués", conclut Hugues de Montvalon.Olivier DecarreLe CAC 40Base de référence: 1.000 points au 31 décembre 1987Capitalisation au 23/07/2002: 673 milliards d'eurosPER de l'indice: 18,32Le Crédit Agricole remplacera Dassault Systèmes le 6 août
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