Méthode Mer, méthode Coué ?

Désormais à l'aise dans son costume de ministre, après un peu plus d'un an à Bercy, il a mené la réunion à sa manière : sans fioriture ni effets de manche, dans un langage direct auquel il faut reconnaître que les Français ont assez peu habitué leurs partenaires. A la fin du week-end, l'hommage au style Mer a été appuyé et, autant que l'on puisse en juger, sincère.Voilà pour la forme. Mais le fond ?De ses déclarations à l'issue des travaux des ministres des Finances, on a surtout retenu son appel à un "déclic psychologique" pour faire repartir la croissance. Les "fondamentaux" de l'économie française sont bons, a-t-il asséné une nouvelle fois. L'inflation est inexistante, les taux d'intérêt sont historiquement bas, tout comme le prix du pétrole. Il ne tiendrait qu'aux agents économiques de faire le reste. Car, comme l'avait déclaré Francis Mer quelques jours plus tôt, la croissance, c'est aussi une affaire "d'envie, de plaisir". Si l'Amérique avait si bien réussi à la fin des années 90, devait-il observer, ce fut aussi "un sursaut lié à la fierté, à l'orgueil, au drapeau.""La méthode Coué que l'on nous reproche", selon l'expression du ministre lui-même, a un réel mérite : il est juste de dire que le rôle du gouvernement est aussi d'encourager les Français à "penser positif", comme disent les Américains, et juste de souligner que cet optimisme collectif est un puissant facteur de développement économique.Le problème est que cet optimisme se nourrit autant de faits et d'actes que de discours. Les Français ont des raisons objectives de s'abstenir de consommer frénétiquement - à commencer par l'incertitude qui pèse sur l'avenir de leurs retraites et de la protection de leur santé. De la même manière, les entreprises sont fondées à ne pas investir massivement : pour satisfaire quelle demande, alors que nombre d'entre elles souffrent aujourd'hui de capacités de production excédentaires ?La politique budgétaire de Bercy, prétendant tout à la fois réduire impôts, dette et déficit, n'est pas non plus d'une lisibilité telle qu'elle incite à un optimisme débridé. Et il ne suffit pas de vouloir pour que l'Allemagne sorte de la récession ou pour que l'euro retrouve un cours moins pénalisant face au dollar. Plutôt que de voir son homologue John Snow lui tenir la main et écarter toute idée de brouille franco-américaine, on aurait préféré que le secrétaire au Trésor s'abstienne de déclarations qui allaient provoquer un nouvel et net affaiblissement du dollar, lequel fait bien plus de mal à l'économie française que n'importe quelle menace de boycottage.C'est la limite du style Mer, aussi sympathique soit-il par ailleurs.
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