Le difficile dialogue gouvernement-Medef

Ce n'était pas ainsi que les choses devaient se passer. A la formation du gouvernement Raffarin, on avait décelé la présence de plusieurs anciens collaborateurs du Medef dans les cabinets ministériels. On avait été prompt à en conclure que la nouvelle équipe ferait, sinon la politique voulue par les chefs d'entreprises, au moins une politique qui pourrait difficilement leur déplaire.C'est bien ce que pensent accomplir aujourd'hui plus d'une équipe ministérielle, plus d'un élu UMP influent. Le sentiment d'avoir beaucoup fait pour améliorer le sort des entreprises est largement partagé au sein de la majorité. Les impôts baissent. Les 35 heures ont été largement remises en cause. Les retraites sont en train d'être réformées d'une manière qui prend en compte les préoccupations essentielles du monde des affaires : les futurs retraités cotiseront plus longtemps, leurs employeurs n'auront pas à cotiser davantage.Dans les palais de la République, on considère que ces efforts ne sont pas payés de retour. Au plus dur du conflit sur les retraites, le Medef n'a pas fait publiquement état de son soutien au gouvernement. Une telle expression aurait relevé de la provocation et accentué les tensions sociales, avancent, non sans raison, les partisans de ce silence. D'autres en revanche, au sein même de l'organisation, estiment que le patronat aurait pu s'exprimer sans mettre le feu aux poudres.Quand ils s'expriment, le Medef et son président Ernest-Antoine Seillière ne le font pas toujours dans des termes de nature à réjouir les artisans de la politique gouvernementale. "Nous ne voyons pas les éléments de la reprise se mettre en place", relevait dernièrement le patron des patrons. On n'est pas plus aimable envers un ministre de l'Economie et des Finances, Francis Mer, lui-même ancien patron, qui ne manque pas une occasion de souligner que "les conditions de la reprise sont réunies" et que la croissance ne demande qu'à repartir pour peu que les chefs d'entreprises y croient.Sur les retraites, le différend s'est récemment cristallisé sur un nombre : soixante-cinq. "Si on devait, comme le projet de loi actuellement l'indique, nous imposer de devoir garder jusqu'à 65 ans tout salarié qui le souhaiterait, le problème serait réglé, il n'y aurait plus rien à négocier. Nous n'acceptons pas l'idée que la loi vienne imposer à toutes les entreprises un comportement", a prévenu Ernest-Antoine Seillière il y a quelques jours. "Si c'était cela, notre propension à négocier quoi que soit serait amenuisée, nous le signalons au gouvernement", précisait-il. Un avertissement bien senti, que le gouvernement a choisi d'ignorer : ce report à 65 ans a été voté hier par l'Assemblée nationale... avec le soutien du PS, après avoir été fermement défendu par François Fillon.Devant le peu d'empressement que manifeste le Medef dans d'autres négociations - on pense notamment à celles, pourtant cruciales, relatives à la formation -, peut-être le ministre a-t-il pensé que les représentants des chefs d'entreprise pourraient difficilement être moins coopératifs encore. Peut-être attend-il que les employeurs, à leur tour, montrent des gages, par exemple en "changeant leur comportement" vis à vis de l'emploi des plus de cinquante ans, comme les y invite ce matin, dans nos colonnes, le député UMP et rapporteur du projet de loi sur les retraites à la Commission des finances, Xavier Bertrand.Une chose est sûre : de la part des représentants patronaux, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin attendait plus et mieux.
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